Transféré de l’Ecole de gendarmerie de Bamako à Sélingué, où il est incarcéré depuis la semaine dernière, l’ex-chef de la junte militaire, le capitaine-général Amadou Haya a entamé, depuis le mardi dernier, une grève de la faim en protestation de sa privation de liberté qu’il considèrerait comme » injuste au vu du travail abattu pour le Mali « . En effet, l’auteur du coup d’Etat contre ATT estime, selon des sources concordantes, qu’il devait être considéré comme » un héros » par les autorités du pays et cela au vu » du rôle historique » qu’il a eu à jouer le 22 mars 2012. De ce fait, il ne mériterait pas ce traitement car, selon lui, c’est grâce à lui que le Mali est dans cette situation qui a permis à un nouveau pouvoir de s’installer à la suite d’élections démocratiques. Fou de rage contre les nouvelles autorités, il a décidé d’entamer une grève de la faim à l’issue incertaine.
Incarcéré à 140 km de Bamako depuis la semaine dernière, le chef de l’ex-junte militaire, le capitaine propulsé général Amadou Haya Sanogo serait-il en train de péter les plombs ? Tout porte à le croire au vu de cette grève de la faim qu’il vient d’entamer dans sa nouvelle résidence de Sélingué. Sous le poids de lourds soupçons « d’assassinats et de complicité d’assassinats » dans la double affaire des bérets rouges et des bérets verts portés disparus à la suite des affrontements meurtriers de la nuit du 30 avril au 1er mai 2012 et de la mutinerie du 30 septembre 2013, le capitaine-général Sanogo ne semble toujours pas vouloir accepter l’inévitable procès qui le rendra blanc ou noir. Son dossier étant dans les solides mains du juge Yaya Karembé et du côté de la CPI à la Haye, l’on se demande à quoi servirait une grève de la faim à la phase actuelle. Surtout qu’une mission internationale vient de juger ses conditions de détention acceptables. Une faveur dont les quatre-vingts militaires (dont des officiers et sous-officiers) arrêtés à la suite du contre coup d’Etat contre celui qui n’était alors que capitaine n’avaient pas bénéficié.
Ceux-ci avaient passé presque dix mois en isolement (dont deux en isolement total) à Kati et au camp 1 de la gendarmerie sans broncher. Une partie d’entre eux (21 bérets rouges) avaient été par la suite froidement assassinés et leurs corps jetés dans un charnier à Diago. Cette macabre découverte de corps de militaires tués par l’ex-junte, dans la nuit du 3 au 4 décembre 2013, sera suivie par d’autres enfouis dans des tombes clandestines sur la route de Ségou, aux environs de Kati, à Bamako et le corps dépecé de l’ex-chef des opérations spéciales de la junte, le colonel Youssouf Traoré, retrouvé dans le puits d’une résidence supposée appartenir au capitaine-général lui-même à Kati-Malibougou.
Ainsi, depuis le mardi 18 mars, le détenu de Sélingué a entamé une grève de la faim pour protester contre ce transfert qui l’isole davantage des siens et des autres personnes inculpées dans le cadre de ces dossiers d’assassinats et de complicité d’assassinats dont il se trouve être la pièce maîtresse. L’homme, qui se considère comme un héros, aurait très mal ressenti ce transfert qui présage d’une longue période d’incarcération dans la perspective d’un procès qui sera historique.
Pourquoi cette grève de la faim ? C’est la question que se posent les observateurs, tous surpris par ce brusque changement de comportement de la part de l’ex-chef putschiste. S’agit-il d’une stratégie afin d’attirer l’attention de ses partisans très peu nombreux actuellement sur son sort ? Ou bien pense-t-il pouvoir ainsi exercer une pression sur IBK et son gouvernement dans le but de le libérer des mailles de la justice ? La grève de la faim n’étant pas une tradition ancrée dans notre pays, les uns et les autres pensent qu’il finira bien par demander à manger. Attendons donc de voir.
Mamadou Fofana