Etablissement public à caractère administratif, l’Agence d’exécution des travaux d’entretien routier (Ageroute) ne cesse de jouer sa partition dans les travaux d’entretien et de réhabiliter des routes. Dans un entretien accordé au journal La Preuve, le Directeur général de l’Ageroute, Sékou Kontaga, ne cachepas son optimisme quant à la réussite des missions à lui assignées.
La Preuve :Voulez-vous vous présenter à nos lecteurs?
Sékou Kontaga: Je suis Sékou Kontaga, directeur général de l’Ageroute. Je suis ingénieur de construction civile. J’ai commencé comme agent, et aujourd’hui je suis le directeur général de l’Agence.
Quelles sont les missions dévolues à l’Ageroute ?
L’Ageroute est une agence d’exécution des travaux d’entretien routier. Avant, les travaux routiers étaient gérés par une seule agence qu’on appelait Travaux publics. Et vers les années 2000 à 2004, ce service a été divisé en trois structures : Direction nationale des routes, Fonds d’entretien routier communément appelé Autorité routière, et Agence d’exécution des travaux d’entretien routier (Ageroute). La Direction nationale des routes a pour mission la programmation, les études. Elle est responsable du programme routier dans le cadre du budget-programme. Et l’Autorité routière est chargée de la mobilisation de l’argent qui servira à exécuter les programmes élaborés par la Direction nationale des routes. L’Ageroute est chargé d’exécuter les programmes élaborés par la Direction nationale des routes et financés par l’Autorité routière. En un mot, l’Ageroute fait faire à travers des dossiers d’appel d’offres. L’Ageroute donne le marché des travaux aux entreprises et les contrats de travail aux bureaux d’études. Nous faisons la supervision, le contrôle et le paiement. Toutes les trois structures citées ci-dessus sont sous la tutelle du ministère des Transports et des Infrastructures.
Faites-nous l’état des lieux de l’Ageroute ?
Jusque-là, l’Agence a exécuté toutes les conventions qui ont été mises à sa disposition. Elle n’exécute que ce qui est mis à sa disposition. Nous essayons de faire le maximum avec les moyens de bord. Nous disons à la population que nous sommes entrain de nous moderniser et nous sommes entrain de voir avec le département comment faire pour trouver d’autres sources de financement afin que les routes maliennes soient à souhait.
On a l’impression que les choses bougent beaucoup mieux maintenant. Quel est votre secret ?
Je ne dirais pas un secret, mais engagement, en tant que Malien, à apporter notre pierre à la construction de ce pays. C’est l’engagement de tout le personnel qui doit être salué. Quand nous sommes venus, nous avons rassemblé tout le monde pour essayer de comprendre. Nous avons mobilisé le personnel, les entreprises, l’organisation des bureaux d’études. Ensemble, nous avons analysé les dysfonctionnements. Et tout le monde s’est engagé à donner le meilleur de lui-même.
Où en êtes-vous avec les projets de construction et de réhabilitation des routes du Mali ?
Cette question doit être posée à la Direction nationale des routes. Mais je peux vous dire qu’il y a une politique de réhabilitation des routes au Mali. Je ne saurais vous citer tous les projets qui sont en cours. Les routes sont classées en routes nationales, régionales et locales. Le transfert de compétences étant en cours, vous apprécierez dans les jours à venir qui fait quoi.
Qui parle de construction et de réhabilitation de routes parle forcément de moyens financiers. Avez-vous les ressources financières suffisantes pour réaliser vos ambitions ?
Malheureusement, c’est ça le problème. Et malheureusement, c’est ce que la population ignore. Nous nous débattons avec le peu que nous avons. Et nous sommes engagés à donner le meilleur des résultats avec le peu que nous avons. En 2006, l’entretien routier a commencé avec 6 milliards FCFA.Aujourd’hui, nous sommes à 20 milliards FCFA. En 2021, l’évaluation des besoins d’entretien de toutes les routes s’élève à 120 milliards. Avec un besoin de 120 milliards, il faut exécuter les travaux de 20 milliards. Le département et ses services rattachés choisissent les priorités en fonction du degré de dégradation des routes. Autrefois, les travaux d’entretien étaient financés par le Trésor public. À ce niveau, il y avait des retards dans les paiements. Les gens finissaient les travaux et leur paiement prenait du temps. L’Etat a donc mis en place le système de ‘’la route qui finance la route’’. Il s’agit du paiement de taxes dans les péages et sur le carburant. Sur chaque lettre de carburant, il y a une somme pour l’entretien routier. Nous sommes arrivés à un moment où cette méthode ne suffit plus. Il a été entamé une étude au niveau de l’Autorité routière pour trouver les moyens adéquats pour financer l’entretien routier et la construction routière. La Direction nationale des routes vous le confirmera, il ya beaucoup de routes dont les études sont terminées, mais les ressources financières manquent. A un moment donné, la Direction nationale des routes avait voulu ouvrir certaines routes au partenariat public-privé (PPP) pour pouvoir exécuter ces routes et voir comment ils vont être payés.Mais cela aussi tarde à se réaliser. Mais, je vous rassure que le peu qu’on met à notre niveau, nous allons l’utiliser rationnellement afin que les routes soient carrossables. Les moyens de financement ont atteint leurs limites et l’Etat est entrain de réfléchir à comment améliorer les méthodes de financement. Vous avez dit que ça bouge beaucoup à Bamako, c’est parce que nous avons bousculé l’Etat à faire un effort supplémentaire en fin 2020, afin que nous puissions nous occuper de certains grands chantiers. Car Bamako, c’est la capitale. Autrement dit, la vitrine du Mali. Nous sommes également encore entrain de voir avec l’Etat comment faire la même chose en fin 2021 pour que nous puissions répondre favorablement aux besoins des populations. Les choses sont en bonne voie et si ça aboutit, nous avons l’ambition de réhabiliter en 2021 l’ensemble des routes déjà construites au Mali. Les gens ont cette habitude de nous comparer aux pays voisins, tels le Sénégal et la Côte-d’Ivoire. Ces pays ont plus de ressources à mettre à la disposition des instances. Imaginez le Fonds d’entretien de Dakar fait plus de 30 milliards FCFA par an, et Abidjan fait plus de 50 milliards FCFA. Et tout le Mali, nous sommes à 20 milliards FCFA comme fonds. Notre réseau routier est plus vaste et plus long que tous ces deux pays. Nous faisons l’effort que nous devons faire.
Y a-t-il une politique en place ?
La politique mise en place est déterminée par la Direction nationale des routes. Il y a cinq ans, la Politique nationale de construction routière a changé. Nous étions à 3 cm de béton bitumé, et aujourd’hui nous sommes à 5 cm. Nous sommes entrain d’appliquer les règlements de l’Uemoa en termes de construction routière. Le Mali ne peut pas être en marge de cette politique. D’ailleurs, nous sommes au-devant par rapport à certains pays de la sous-région sur cette politique. Nous avons des routes aujourd’hui, mais nous voulons être pionniers en construction routière.
Quels sont les autres services qui interviennent dans l’entretien des routes et comment s’effectue la coordination ?
Nous sommes l’agence créée pour l’entretien routier. Il se trouve que l’entretien routier est très vaste. Nous avons l’entretien courant, l’entretien périodique et la réhabilitation. À ce niveau, la Direction nationale des routes et le département de tutelle ont jugé pour le moment de convier les services d’entretien courant et périodique et souvent la réhabilitation. Il y a d’autres services qui agissent dans le même secteur, tels l’Agetip et l’Agetier. Ces services sont des associations, mais nous sommes un établissement public à caractère administratif. Nous sommes le seul instrument de l’Etat qui est chargé des travaux d’entretien routier. Mais comme nous sommes dans un système libéral, les associations qui sont créées travaillent aussi dans ce sens. Dans les régions, vous avez les Ader. En un mot, nous ne sommes pas les seuls. La coordination s’effectue au niveau du département et au niveau des collectivités. C’est le département de tutelle qui confie les tâches aux différentes structures. Et pour le cas des collectivités, les discussions sont en cours pour faire le transfert des ressources d’entretien routier vers les collectivités afin qu’elles confient les travaux à la structure de leur choix. Aussi, l’association des régions est en passe de signer un protocole d’accord avec l’Ageroute pour pouvoir exécuter leurs programmes d’entretien routier. Les discussions sont avancées et je pense que nous avons pu les convaincre de notre disponibilité. Et si tout se passe bien, nous aurons la possibilité d’exécuter leurs travaux d’entretien routier.
Quelles sont les difficultés rencontrées par l’Ageroute ?
Les difficultés que connaît l’Ageroute sont d’ordre financier. Mais, je pense que c’est la situation économique du pays qui fait ça. Je préfère ne pas m’étaler sur ça. Par contre, les difficultés techniques que nous connaissons sont duesau lieu d’exécution de nos travaux. Dans les campagnes, nous avons la possibilité de créer des déviations. Mais ici en ville, nous avons des usagers qui ne sont pas patients. La seconde difficulté est que les routes maliennes sont vielles. Nous avons des routes qui n’ont pas connu les entretiens nécessaires au moment où il fallait. La vieillerie des routes est un handicap pour pouvoir donner la meilleure qualité des travaux que nous menons. Une autre difficulté est le problème de charge. Certaines de nos routes supportent des charges qu’elles ne doivent pas subir. Cela crée une dégradation précoce.
Quel message avez-vous à lancer aux populations ?
Nous demandons aux populations de nous aider à les aider. Nous leur disons : n’utilisez ni les fosses, ni les caniveaux, ni les collecteurs comme déversoirs. Car, en bouchant ces infrastructures, l’eau, au lieu d’aller dans les directions indiquées, monte sur la route. Or, comme on le dit dans notre jargon,‘’l’eau est le premier ennemi de la route’’. Que la population comprenne que les moyens que nous avons ne suffissent pas à mettre toutes les routes à niveau. Les problèmes sont nombreux. Il y a aussi certains usagers qui, au lieu de se garer à côté pour réparer leurs véhicules, le font sur le goudron. Cela aussi accélère la dégradation des routes. Une fois de plus, nous demandons aux populations de nous aider à les aider.
Adama TRAORÉ
Source : La Preuve