Dans une interview exclusive, Sébastien Philippe, franco-malien installé depuis plus de 20 ans au Mali, où il exerce la profession d’architecte, chercheur et écrivain nous donne d’amples informations sur son dernier ouvrage qui a pour titre : “Figure des Arts plastiques du Mali”.
Aujourd’hui-Mali : Depuis le 12 septembre votre dernier livre ” Figure des Arts plastiques du Mali ” est dans les librairies. Pourquoi un tel ouvrage consacré aux arts plastiques ?
Sébastien Philippe : Parce que je suis moi-même collectionneur et je m’intéresse depuis longtemps au travail des plasticiens maliens. Je suis devenu ami avec un grand nombre d’entre eux et c’est Noumouké Camara qui, connaissant mes ouvrages précédents, m’a soufflé l’idée d’en écrire un sur les plasticiens. Je me suis donc lancé dans cette nouvelle aventure et je me suis vite pris au jeu car en allant les interviewer chez eux, dans leur milieu, j’ai appris à encore mieux les connaître.
Dans la culture malienne, les arts plastiques sont prisés seulement par une certaine classe très aisée de la société. Pensez-vous que vous avez fait le meilleur choix?
Il est vrai que les œuvres d’art ont un coût, comme les livres d’ailleurs, et les réalités locales font que hélas peu de Maliens peuvent se permettre d’en acquérir. Mais au-delà de l’achat d’œuvres, l’Art est accessible gratuitement au plus grand nombre à travers les nombreuses expositions qui sont organisées dans plusieurs endroits, comme les musées, les galeries ou encore certains bars restaurants qui exposent régulièrement les artistes locaux. Ces plasticiens abordent des thématiques de société qui touchent tout le monde et je pense qu’ils sont des exemples pour la jeunesse car ils se battent sans cesse pour créer et évoluer, avec le peu de moyens à leur disposition.
Apparemment, c’est une première du genre au Mali ou bien il y’a d’autres livres similaires ?
Il y avait eu en 2004 un “guide des artistes plasticiens du Mali”, réédité en 2010, réalisé par l’association culturelle Acte Sept de Adama Traoré. Un ouvrage de référence dont je me suis inspiré pour concevoir ce livre dans un format différent, avec des échanges personnels avec les artistes, sur leur parcours et leurs techniques, et en présentant en grand format certaines de leurs œuvres.
Pouvez-vous nous citer quelques figures des arts plastiques du Mali qu’on pourrait retrouver dans votre œuvre ?
J’ai dédié l’ouvrage à Amara Sylla dit Amsyl, décédé juste après l’interview qu’il m’avait accordé, et nous avons perdu dernièrement le grand Amahiguéré Dolo, qui est également présent dans le livre. Les artistes sont présentés par ordre alphabétique, ils sont au total 62, en cette année des 62 ans du Mali indépendant, des doyens que l’on ne présente plus, aux plus jeunes, pour certains, tout juste, sortis du conservatoire.
Ce travail vous a pris combien de temps et comment vous avez fait la sélection des artistes, notamment les critères ?
Le premier entretien a eu lieu en octobre 2020. Il m’a donc fallu deux années pour faire l’ensemble des interviews, les photos, écrire les textes, concevoir le livre et enfin l’imprimer. Il n’y a pas eu de critères spécifiques de sélection, si ce n’est que je voulais que l’artiste soit encore en phase de création, et qu’il ait participé à au moins une exposition, même collective. Il en manque bien sûr, ce qui pourrait donner lieu à de futures mises à jour.
Quelle appréciation faite-vous de la culture malienne d’une manière générale et des arts plastiques en particulier ?
J’ai découvert la Culture malienne à mon arrivée ici en 2001. Elle est bien entendu très riche et les sujets sont tout aussi vastes que passionnants. Les arts plastiques démontrent à eux seuls cette grande diversité. Des artistes très différents les uns des autres, avec leurs particularités, leurs techniques, leurs thématiques. Certains sont déjà reconnus au Mali et à l’étranger, alors que d’autres sont au début de leur carrière, des talents en devenir. Les voir évoluer donne de l’espoir et fait rêver. Je pense que cela fait du bien de rêver, dans cette période troublée que nous vivons, aussi bien au niveau national qu’international.
De nos jours combien d’ouvrages avez-vous à votre actif ? Peut-on savoir quelques noms et les lieux d’édition ?
Ce livre est mon 7ème. Mon premier, “Une Histoire de Bamako”, est paru en 2009. J’ai ensuite écrit “Ségou, une région d’histoire” en 2013, “Koulouba, le palais du Mali” en 2017, “Symboles de la République du Mali” en 2020 et j’ai écrit 2 romans, dont le second, “Toubabou Dramane”, est paru en 2021.
L’écriture est une passion pour vous ou votre métier principal ?
Je suis architecte de profession et c’est mon activité principale, celle qui me fait vivre. L’écriture est une passion, et surtout la phase de recherches qui précède celle d’écriture et de conception du livre. Ma maison d’édition s’appelle MEMORIA.
A quand le prochain ouvrage et peut-on savoir aussi le titre ?
Je travaille actuellement sur une mise à jour de mon livre sur l’histoire de la ville de Bamako, qui est aujourd’hui épuisé. Il est paru en 2009 et beaucoup de choses se sont passées depuis à l’échelle de la ville. Notre capitale a beaucoup évolué. Il s’agira donc d’une refonte du premier livre, en revoyant certaines parties et en ajoutant ces dernières années. Il devrait paraître, en principe, fin 2023 ou début 2024.
Votre mot de la fin ?
Je voudrais vous remercier pour votre fidélité, à présenter mes ouvrages lors de leur sortie. Il est agréable d’écrire des livres, mais il est passionnant de pouvoir échanger avec les lecteurs, et ce sont des articles comme les vôtres qui permettent de faire connaître nos œuvres et donner envie au public de les lire. Merci à vous !
Propos recueillis par Kassoum THERA
Source : Aujourd`hui-Mali