MALI-CÉDÉAO
Se donner enfin l’accolade de la réconciliation
Comme dans un épique combat de boxe aux rounds interminables, le clash entre le Mali et la CÉDÉAO ressemble à ces affrontements fratricides où chacun y épuise ses forces et où nul ne peut sortir vainqueur. D’où la nécessité, après avoir mis sur le ring trop de hargne à se donner des uppercuts, d’enlever chacun ses gants pour se donner l’accolade de la fraternité renouée. Un appel à la raison qui, espérons-le vivement, sera entendu à Accra.
Qui a dit qu’un match de boxe devait forcément se terminer par une victoire par K.O. d’un des jouteurs ?!!! Dans certaines arènes, où l’intensité de l’affrontement a fini par essouffler chacun des boxeurs, il est souhaitable (même préférable) que le combat (si déterminé soit-il) se solde par le scénario du ni vainqueur ni perdant. Ainsi, les deux adversaires, s’étant frottés avec ténacité et ayant cogné leurs gants avec âpreté, peuvent accepter un partage raisonnable des points avec la conviction pour chacun d’avoir gardé l’honneur sauf.
Telle est la situation dans laquelle se trouve le Mali et la CÉDÉAO qui, depuis des mois, sont engagés dans un corps-à-corps où aucun des deux camps ne peut sortir gagnant. Car, les deux antagonistes étant liés par des organes vitaux interdépendants, chaque uppercut assené par l’un à l’autre provoque aussitôt une douleur partagée dont le choc donne réciproquement le vertige aux deux lutteurs.
Après avoir passé des mois à bomber le torse sur des principes que chacun de son côté jugeait « non-négociables », à se donner coup pour coup, à se bousculer, à s’acculer mutuellement dans les filets du ring… le Mali et la CÉDÉAO en sont arrivés au round où chacun, quasiment à bout de forces, serait soulagé de voir enfin “l’interminable” catch diplomatico-économique arriver à son terme.
C’est pourquoi, on peut fonder l’espoir que le sommet de la CÉDÉAO, prévu demain samedi 04 juin, sera l’heure des concessions de raison et le rendez-vous du compromis trouvé qui dissiperont les brouillards de la mésentente fratricide si préjudiciable à tous. Sans préjuger avec certitude de ce qui sera décidé, il est probable (beaucoup de signaux le laissent penser) qu’on soit, et côté malien et côté CÉDÉAO, dans les meilleures dispositions pour fumer le calumet de la réconciliation.
Une perspective rapprochée qui, depuis plusieurs jours, sème un doux vent d’espoir chez les populations (toutes les populations de l’espace CÉDÉAO) prises en tenaille par la contraction économique exacerbée par des sanctions (disons-le) poussées jusqu’aux frontières de la cruauté géopolitique. Ayant mis trop de temps à s’opposer, trop d’ardeur à se saborder, trop de persévérance à se pourfendre, trop de passion à se bousculer l’un l’autre, le Mali et la CÉDÉAO sont au point de la rixe où il faut savoir remplacer l’énergie implacable de l’adversité par l’esprit assagi de la flexibilité. Céder un peu de ses principes pour sortir de la décrispation, renoncer quelque peu à sa rigidité intransigeante pour dénouer le goulot de la crise, rompre avec la logique du “zéro concession” pour aboutir à un accord ; c’est le deal que les citoyens maliens et les peuples de l’espace communautaire attendent de leurs gouvernants.
Un espoir fondé que “ceux d’en haut” ont le devoir historique de transformer en réalité.
Mohamed Meba Tembely
Source: Les Échos- Mali