Depuis l’attribution définitive de la troisième licence de téléphonie globale à la société Alpha Télécom Mali SA (Atel-SA), les réactions d’indignation fusent de partout. Malgré tout, le gouvernement de transition, qui est à l’origine du scandale, feint de ne pas comprendre la colère des Maliens.
Bréhima Tolo, ministre des Postes et des Nouvelles technologies
Cette affaire de troisième licence avait suscité beaucoup d’engouement chez les Maliens, contents qu’ils fussent d’accueillir un 3e opérateur sur le marché, au moment où dans certains pays on en compte 5 à 6. La fierté des Maliens était d’autant plus grande et légitime que dans le consortium d’adjudicataires, figurait un Malien, Cessé Komé. Après l’attribution en 2012 de la licence au groupement Planor/Cessé Komé/Monaco Télécom, dont la société de droit malien est Alpha Télécom Mali SA (Atel-SA), qui avait misé gros avec une offre de 84 millions d’euros, soit 55,1 milliards de Fcfa, l’on croyait que les dés étaient à jamais jetés. Mais, c’était sans compter avec le gouvernement de la transition, lequel, pour des raisons non encore avouées, s’est abjuré en 2013 en réattribuant la même licence par entente directe au même Alpha Télécom Mali SA (Atel-SA), mais en en excluant le malien Cessé Komé. Au final, le groupe se compose de Planor et Monaco Télécom. Pour justifier cet état de fait, le gouvernement argue que l’ancien consortium n’a pas pu honorer ses engagements.
Cet argument n’a pas eu l’effet escompté. Au contraire, des soupçons demeurent. D’autant que, dit-on, si les choses avaient été faites dans les règles de l’art, le gouvernement aurait dû procéder à un nouvel appel d’offres suite à l’annulation de la première convention. Ce qui n’a pas été fait. Et, à la grande surprise de tout le monde, «Le gouvernement a décidé, à la suite d’un dossier présenté par celui-ci, d’accorder au Groupement Planor-Monaco Telecom International la troisième licence de la téléphonie globale par entente directe. Il a approuvé la convention de concession de ladite licence pour une durée de quinze ans renouvelable et un montant de 55.100.388.000 FCFA (84 millions d’euros)», précise le communiqué du conseil des ministres du 21 janvier 2013. Ainsi, «Conformément aux dispositions de la convention de concession entre le gouvernement du Mali et le groupement Planor-Monaco Telecom International qui prévoyait la création d’une société d’exploitation de la licence, la société Alpha Télécommunication Mali SA (Atel-SA), société de droit malien, a été désignée attributaire de la licence», poursuit le communiqué. Selon le même texte, le processus d’appel d’offres pour l’attribution de cette licence de téléphonie globale avait précédemment conduit au choix d’un groupement qui n’a pas pu honorer ses engagements. Bamako a donc décidé d’annuler la procédure et d’attribuer la licence à un investisseur crédible dans les meilleurs délais et dans les conditions prévues par les textes relatifs à la passation des marchés publics et des délégations de service public, d’où l’entente directe.
Comme on le voit, les autorités de la transition n’ont même pas cherché à savoir la clause de solidarité et d’indissociabilité qui liait Cessé Komé à son partenaire de Monaco Télécom International. Pourtant, ce n’est pas faute d’avoir été averti par l’avocat de Cessé Komé en son temps. Selon l’avocat de Cessé Komé, «à la date du 15 octobre fixée pour le règlement du premier acompte de 33 milliards de FCFA à la charge de l’autre membre du groupement, M. Cesse Komé a réitéré son offre de régler non seulement sa quote-part de 22 milliards de FCFA à date (trois mois après le premier acompte) mais également toutes les sommes restant dues, totalement ou partiellement au titre du premier paiement».
Visiblement, ce dossier a connu plusieurs impairs qui ont provoqué l’indignation de plus d’un Malien. Nous avons tenté d’en savoir plus en approchant le département des Postes et des Nouvelles technologies. Ici, le sujet semble quelque peu tabou. Selon un membre du cabinet, le ministre Bréhima Tolo aurait interdit à ses collaborateurs d’en parler pour l’instant. Histoire, dit-on, de ne pas engendrer des versions contradictoires. Question somme toute logique : pourquoi laisser la confusion prospérer ?
Dioukha SORY