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Sanction de la CEDEAO et de l’UEMOA, chronogramme des élections, coopération militaire Mali-France : Dr Choguel Kokalla Maïga dit tout !

Durant plus d’une heure de temps, le Premier ministre de la transition, Dr Choguel Kokalla Maïga s’est prononcé, dans une interview accordée à la télévision nationale du Mali, sur les questions brûlantes de l’actualité, notamment les sanctions « illégales et illégitimes » de la CEDEAO et de l’UEMOA contre le Mali, l’organisation des Assises nationales de la refondations au sortir desquelles les Maliens ont demandé une prolongation de la transition de 6 mois à 5 ans , la nécessité de la diversification des partenaires dans le cadre contre le terrorisme , la campagne de diabolisation du Mali orchestrée par la France…Dans un ton  respectueux mais très véridique, le patron de la primature a défendu l’agenda Mali et a sollicité le monde entier, en particulier les Africains et les Maliens à accompagner les autorités actuelles dans leur combat pour une vraie souveraineté. Lisez plutôt l’interview !  

 

ORTM : Le Mali est sous sanctions de la CEDEAO et de l’UEMOA depuis peu. Le temps des émotions passé, quel est votre état d’esprit aujourd’hui ?

Dr Choguel Kokalla Maïga : Notre pays vit une situation difficile dont nous allons certainement sortir. Nous sommes une vieille Nation, plus que millénaire, qui a vécu de multiples épreuves pendant son parcours. Celle-là n’est qu’une de ces épreuves. Comme toutes les grandes Nations qui ont connu des périodes de déliquescence ou de faillite dans leur histoire, mais qui se sont relevées, le peuple malien va se relever grâce à ce régime de Transition. Nous sommes déterminés et confiants en l’avenir. Les sanctions de la CEDEAO et de l’UEMOA visent, officiellement, à aider notre peuple à sortir de cette situation difficile ; mais quand on y regarde de près, la finalité de ces mesures, c’est de déstabiliser l’État malien. Il n’y a aucun doute là-dessus. Ces mesures sont par conséquent illégales et illégitimes.

Je vous rappelle que la CEDEAO est née au Mali en 1975, à l’initiative des présidents du Mali et du Nigéria. L’idée a ensuite été partagée par les autres chefs d’État de la sous-région. Ils se sont donc tous mis ensemble pour mettre en place cette organisation à vocation économique qui, par la suite, a évolué pour prendre des dimensions politiques. Je dis souvent que le Mali et la CEDEAO, c’est comme un père et son fils. Aujourd’hui, le vieux père est malade. Ce qu’il attend de son fils, c’est de l’aider, de lui tenir la main pour qu’il puisse se relever. Depuis quelques années, il faut le reconnaître, la CEDEAO fait de son mieux. Comme un père et son fils, nous pouvons nous disputer, mais jamais nous séparer. Nous allons nous retrouver dans les semaines, les mois et, peut-être, les années à venir.

L’UEMOA, elle, est une organisation à caractère économique et financier. La jonction des sommets de la Cédéao et de l’UEMOA, le 9 janvier 2022, sur le Mali était déjà suspecte, mais la dureté des sanctions prises procède d’un abus de pouvoir au regard des textes fondateurs de ces deux organisations. Celles-ci ont profité de l’extrême faiblesse où l’Etat malien a été plongé par un manque de leadership éclairé et de maturité stratégique. Aujourd’hui, le Mali est devenu le grand malade, voire la risée de la sous-région et du monde. Certains pays se servent de la CEDEAO et de l’UEMOA pour régler des comptes inavoués avec le gouvernement malien d’aujourd’hui.

Nous avons expliqué à la CEDEAO, à plusieurs reprises, que la Transition au Mali était différente de toutes les autres transitions ; que la situation au Mali devait être analysée avec discernement, et non pas à partir de clichés établis depuis des années. Si nous ne réglons pas les conditions qui ont provoqué l’avènement de cette Transition, nous nous retrouverons dans de nouveaux coups d’État. Notre pays en est déjà à quatre coups d’État en moins de trente ans. Il faut à présent se poser les bonnes questions et les résoudre définitivement. Or, ce qu’on fait généralement en Afrique, c’est que quand un caniveau est plein d’ordures, on prend une pelle, on enlève les ordures qu’on dépose ensuite au bord du caniveau : avant la prochaine saison des pluies, il se remplit de nouveau d’ordures. Nous, nous voulons faire en sorte qu’à la fin de cette Transition, il n’y ait plus d’intervention de l’armée dans la vie politique nationale.

Les sanctions de la CEDEAO et de l’UEMOA sont illégales non seulement au regard des textes de ces organisations, mais aussi au regard des conventions internationales. La convention internationale appelée “Convention des Pays sans littoral”, que notre pays a ratifiée en 1987, interdit l’embargo contre un pays sans littoral, c’est-à-dire sans accès à la mer. La CEDEAO et l’UEMOA n’en ont eu cure. L’UEMOA s’est transportée à Accra pour son sommet, en l’absence du Mali, qui n’a été invité que 48 heures auparavant, sans même qu’on lui indique l’ordre du jour. C’est dire qu’elle a traité le Mali comme moins que rien ! Nous ne pouvons pas accepter cela ! Aucun dirigeant malien ne peut accepter l’humiliation de son peuple. Nous avons fait savoir à l’UEMOA que nous ne savions pas l’ordre du jour de la rencontre et que nous ne pouvions pas nous y rendre si elle ne nous le communiquait pas. Mais son but réel était d’humilier notre peuple, de déstabiliser notre pays, car les mesures qu’elle a décidées ne sont prévues nulle part dans ses propres textes.

La CEDEAO, pour sa part, nous a demandé de présenter, avant le 31 décembre 2021, un chronogramme électoral, quel qu’il soit, pour servir de base de discussions. Nous l’avons fait. Ce que nous ne voulions pas, c’était de présenter à la CEDEAO un chronogramme non validé par le peuple malien. Mais dès qu’un chronogramme a été validé le 30 décembre 2021, de commun accord avec le Président, une délégation s’est rendue à Accra pour le présenter à la CEDEAO. Nous avons remarqué que le document a aussitôt fait l’objet d’une fuite, suivie d’une forte campagne de diabolisation du gouvernement malien. Quelques jours plus tard, l’Envoyé spécial de la CEDEAO, le président Goodluck Jonathan, un homme que nous respectons beaucoup pour tous les efforts qu’il fournit, est venu à Bamako. Il a discuté avec le Président de la Transition. Il a été convenu que le Mali fasse une nouvelle proposition de chronogramme. Pour ne pas donner l’impression aux chefs d’Etat de la Cédéao que nous les défiions, nous avons présenté ce nouveau chronogramme. Nous nous attendions, entre partenaires, entre amis, entre frères, que la CEDEAO nous dise : « Votre chronogramme, nous l’acceptons”, ou bien qu’elle nous dise: “Asseyons-nous pour discuter du nouveau chronogramme». Au lieu de cela, les chefs d’Etat se sont réunis et, en toute illégalité, ont décidé de punir le Mali, un pays pourtant victime de terrorisme, enclavé, frappé par le coronavirus, la sécheresse, la faim (à cause des récoltes brûlées par les terroristes), un pays à terre… C’est pendant que notre pays se trouve dans ces périls qu’on prend un marteau pour l’achever !

Mais notre peuple a appris à s’assumer tout au long de l’histoire. La pénétration coloniale a duré six mois dans certains pays voisins. Chez nous, elle a duré de 1878 au 16 mai 1916, soit 38 ans de combat ! Il a fallu 38 ans pour que, par les armes, la puissance coloniale puisse soumettre notre pays ! Pendant les 70 années suivantes, elle n’a jamais passé une année en paix. Toutes les ethnies maliennes, les Touaregs, les Peuls, les Bwas, les Bambaras, les Miniankas, les Senoufos, etc., se sont soulevées tour à tour ou simultanément. Nous ne sommes pas un peuple qu’on peut vassaliser, qu’on peut rendre esclave par procuration comme on tente de le faire aujourd’hui !

Sur le plan légal, de quels recours dispose aujourd’hui le Mali ?

Nous avons élaboré un Plan de riposte contre ce processus de vassalisation de l’État malien. Un plan destiné à sauvegarder la souveraineté et l’intégrité territoriale de notre pays. Parmi la batterie de mesures élaborées figurent des mesures juridiques. Nous allons contester les décisions de sanctions devant les instances appropriées au niveau sous-régional, africain et international.

Qu’est-ce que vous avez à dire aux citoyens paniqués par ces événements ?

L’effet recherché par les décisions de la CEDEAO et de l’UEMOA, c’est exactement cela : l’effet de surprise et de panique ! Un peuple qui est déjà à terre, on veut l’achever ! Mais vous avez vu comment les Maliens ont repris le courage qui les caractérise. Nous savons qu’il y en a, parmi les décideurs de la sous-région, qui comptaient sur un soulèvement populaire pour renverser le gouvernement malien. Mais ils ne connaissent pas l’état d’esprit des Maliens ! Dans certains aéroports, y compris ceux de pays non membres de la CEDEAO, on a bloqué des Maliens en leur disant que c’est le gouvernement malien qui refusait l’atterrissage des avions au Mali alors que c’était faux. C’est une guerre perdue d’avance contre le Mali. Les Maliens comprennent très bien les jeux et enjeux qui se cachent derrière ces sanctions, lesquelles n’ont rien à voir avec les intérêts supérieurs du peuple malien. Il y a là un savant habillage que nous comprenons très bien !

Le Président de la Transition a appelé les Maliens à la mobilisation. Qu’est-ce qu’il a voulu dire : qu’ils se serrent les coudes parce qu’il y a une situation difficile à vivre ? Ou plutôt qu’il n’y a pas le feu en la demeure ?

Le Président de la Transition a fait passer un certain nombre de messages d’une très grande portée politique et morale. Il a d’abord invité la CEDEAO à tenir compte de la complexité de la situation au Mali et de l’état psychologique de notre pays. Il a ensuite lancé un appel patriotique aux Maliens, pour qu’ils se retrouvent et fassent l’union sacrée pour sauver notre pays. Le Président a ensuite invité au dialogue. Il n’a pas fermé la porte ! Nous sommes un pays de dialogue, mais ce que nous ne voulons pas, c’est de nous laisser humilier, piétiner et réduire à l’esclavage. Le peuple malien ne l’acceptera jamais !

Faut-il craindre un isolement du pays ? Sur quoi peut-on compter aujourd’hui ?

Notre pays ne sera jamais isolé. Nous avons des amis. Je voudrais saisir l’occasion pour remercier certains chefs d’État qui font preuve de compréhension et de compassion envers notre peuple. Nous comprenons les pressions et les influences qu’ils subissent. Nous ne confondons pas vitesse et précipitation. C’est pour cela que nous ne fermons pas la porte au dialogue et aux négociations. Nous voudrions remercier, de façon particulière, nos frères de Guinée, d’Algérie, de la Mauritanie, qui ont pris une position ouverte en notre faveur. Nous saluons aussi l’ensemble des peuples africains, que nous savons solidaires de notre cause. Sans exagération, le destin de l’Afrique se joue aujourd’hui au Mali. C’est dans les difficultés qu’on reconnaît ses amis. Même les gouvernements des pays qui ont pris des sanctions contre le Mali sont, en âme et conscience, avec nous aujourd’hui.

Que dit exactement le chronogramme soumis à la CEDEAO ?

Nous avions tenu d’abord à ce que le peuple malien se prononce à travers les Assises nationales de la Refondation, qui ont été un grand lieu de débats, avec 84.000 à 90.000 participants – du jamais vu dans l’histoire du Mali ! Toutes les forces politiques significatives, toutes les forces sociales et religieuses y ont participé. La CEDEAO prétend que ces assises n’ont pas été inclusives alors qu’il n’y a pas un seul parti dont les militants de base n’y aient pas participé. Des présidents de partis, des maires ont présidé les travaux à la base et ont signé les procès-verbaux au nom de leurs partis. Certains ont confirmé à la direction de leurs partis qu’il ne pouvait y avoir d’élections actuellement dans leurs localités. Les assises ont bel et bien été inclusives, le peuple s’est prononcé et nous avons, sur la base des décisions du peuple, dégagé un chronogramme électoral pratique. Une Transition n’est pas une fin soi, pas plus qu’une élection. L’erreur de la CEDEAO, c’est de tout réduire aux élections. Le Mali n’a fait que des élections depuis 30 ans et depuis 30 ans, il n’a cessé de sombrer, de vivre des coups d’État, dont le dernier est même intervenu à la suite d’élections ! Je voudrais rappeler que les jeunes officiers patriotes qui ont parachevé, le 18 août 2020, la lutte du peuple malien portée par le M5-RFP ne sont pas sortis spontanément des casernes pour prendre le pouvoir. Ce sont des officiers qui ont passé 15 à 18 ans sur le théâtre des opérations militaires au nord ; ils connaissent les réalités, ils ont vécu toutes les trahisons et tous les coups bas que notre armée a subis. Ils ont vu comment on utilisait une partie de l’armée pour tirer sur la population dans les mosquées, pendant des jours. Le peuple a, malgré tout, continué sa lutte pendant des mois, laissant des dizaines de morts sur le champ de bataille… Où était la CEDEAO en ce temps ? Lorsque nous avons rencontré les dirigeants de la CEDEAO, nous leur avons demandé comment un pouvoir dit démocratique pouvait faire tirer sur sa population et que la Cédéao continuait d’exiger son maintien. La CEDEAO nous a répondu qu’elle ne pouvait pas demander la démission d’un Président de la République élu…

Il y a des Transitions qui surviennent parce le chef de l’Etat est décédé. Il y en a d’autres qui surviennent parce que le Président a violé la loi et a été destitué. Chez nous, la Transition est survenue pour cinq raisons.

La première montre les incohérences de la CEDEAO elle-même. En effet, en 2018, lorsque l’ancien président Ibrahim Boubacar Keïta a été déclaré réélu, une crise politique a éclaté et a duré 8 mois. La CEDEAO a alors envoyé au Mali une délégation de haut niveau dirigée par le ministre des Affaires étrangères du Nigéria. Après plusieurs jours de concertation avec les acteurs maliens, elle a déposé un rapport qui date d’octobre 2018 et qui stipule qu’ « on ne doit plus organiser des élections en République du Mali avant de faire des réformes qui sont reportées depuis plus de 20 ans ». C’est la CEDEAO qui l’a écrit ! Le gouvernement d’IBK a refusé de faire ces réformes et le résultat est là !  L’étincelle qui a mis le feu aux poudres, c’est la falsification des résultats des élections législatives. Donc, le peuple malien exige de faire en sorte que les élections soient désormais transparentes, qu’on minimise les risques de contestation des élections. Voilà la première demande du peuple malien.

Deuxième demande du peuple : la fin de l’impunité. Nous avons vu un pouvoir politique utiliser une partie des forces armées et de sécurité contre le peuple pendant des jours. Le peuple demande là-dessus des comptes.

Par ailleurs, l’une des causes principales de la déliquescence de l’Etat malien est la corruption, qui a gangrené tous les corps de notre société, désarticulé notre armée dont 20 à 30% des ressources ont été détournées. L’Etat commande, par exemple, six hélicoptères, mais au finish, seuls deux sont présentés aux Maliens, sans que l’on sache où sont partis les quatre autres. Trois mois plus tard, on se rend compte que les deux présentés sont des hélicoptères d’occasion achetés au prix du neuf et qui sont dépourvus de certaines fonctionnalités ! En 2012, le gouvernement de Transition avait évalué les besoins de l’armée à 400 milliards de FCFA. Arrivé au pouvoir, l’ancien président Ibrahim Boubacar Keïta les a réévalués à 1.230 milliards. Les Maliens ont applaudi des deux mains, y compris l’opposition qui a voté la loi de programmation militaire… Sept ans plus tard, nos soldats meurent de soif et de faim; quand ils sortent pour aller chercher de l’eau, les terroristes les tuent ! Est-ce qu’on a besoin d’avoir été dans les grandes écoles d’ingénieurs pour savoir qu’on ne peut pas construire un camp dans le désert sans prévoir un forage d’eau ? Le premier besoin de l’homme dans le désert, c’est l’eau. Quand vous voyez tout cela, vous finissez par vous poser des questions. L’ex-chef de l’opposition, Soumaïla Cissé (paix à son âme!), a saisi l’Assemblée nationale à l’époque pour qu’on ouvre des enquêtes. Sa demande a été rejetée. Un ambassadeur d’un grand pays a même eu à dire qu’il n’encouragerait jamais les citoyens de son pays à venir investir au Mali à cause de la corruption. La lutte contre la corruption est donc la troisième revendication du peuple !

Quatrième revendication du peuple: les réformes politiques et institutionnelles. Cela fait 20 ans qu’on tente de réformer la Constitution dont les tares bloquent notre système démocratique. Le peuple demande que le gouvernement de Transition procède aux réformes politiques et institutionnelles nécessaires.

Enfin, le peuple demande la restauration de son outil de défense, qui a été désarticulé, détruit… Il faut sécuriser les Maliens avant d’aller aux élections. En 2013, lorsqu’un gouvernement démocratique a été élu, l’insécurité se limitait à Kidal. Sept ans plus tard, malgré la présence de Barkhane, de Takuba, du G5-Sahel, d’EUCAP et d’EUTM, elle s’est étendue dans le pays comme une gangrène et a atteint 80% du territoire. Le fait d’être élu ne vous donne pas droit de vie et de mort sur les citoyens. Le premier élément de légitimation d’un pouvoir politique, pour ceux qui connaissent l’histoire de la constitution des Etats, c’est la capacité de l’Etat à assurer la sécurité des citoyens. Un Etat qui ne peut pas assurer la sécurité des personnes et de leurs biens ne peut pas être légitime !

Voilà les cinq revendications du peuple malien. Si on juge la Transition en ignorant ces revendications, on se trompe. Notre rôle aujourd’hui, c’est de faire en sorte que la Transition règle ces cinq problèmes avant de passer le pouvoir à un gouvernement qui n’aura plus qu’à s’occuper des questions de développement.

Donc, ce sont tous ces chantiers que le chronogramme prend en compte ?

Bien sûr ! Et on a prévu tout, avec des dates… On nous dit : “Non, faites les élections et le démocratiquement légitime élu va faire les réformes !”. Mais comment ce gouvernement dit démocratique va-t-il être élu ? Aucun chef de parti ne peut aller battre campagne aujourd’hui à l’intérieur du pays ! Si les militaires et le gouvernement de Transition voulaient tricher avec le peuple malien, ils présenteraient un candidat qui passerait facilement car à part l’armée, personne ne pourrait aller à l’intérieur du pays ! Or, si on procédait ainsi, ce sont les mêmes gens qui feraient des manifestations pour dire que les élections n’ont pas été transparentes et ceux qui ont un agenda caché de déstabilisation de l’État malien les soutiendraient… Nous n’allons jamais tomber dans ce piège-là !

Vous parlez de chronogramme provisoire : quand est-ce que le chronogramme sera définitif ?

Le peuple demande une Transition de six mois à cinq ans. Le gouvernement, en fonction des problèmes et des délais nécessaires pour les résoudre, a élaboré un chronogramme. Nous n’allons jamais, aussi longtemps que nous aurons le soutien de notre peuple, commettre l’erreur d’organiser des élections dont sortirait un Président contesté et qui déboucheraient sur un nouveau coup d’État !

Quid donc du respect des engagements qui avaient été préalablement pris vis-à-vis de communauté internationale et dans la Charte de la Transition ?

Dans l’armée, il y a une maxime très pédagogique selon laquelle « la mission est sacrée, mais c’est le terrain qui commande ». Lorsque nous sommes venus aux affaires suite à la rectification de la Transition, quelle était la situation du Mali ? Des grèves illimitées partout, un pays bloqué…Même les opérations militaires sur le terrain étaient menacées. Aujourd’hui, nous avons pacifié le front social. Lorsque nous venions, il n’y avait aucune poursuite dans le cadre de la lutte contre la corruption. Aujourd’hui, tous les dossiers emblématiques de corruption sont entre les mains de la justice. Ce sont des gouvernements légitimes qui ont orchestré la corruption, qui ont mis les dossiers de corruption dans les tiroirs, qui ont bloqué tout ! Aujourd’hui, il y a une volonté politique de combattre le fléau : la justice est libre et sort les dossiers. Il s’agit de dossiers qui existaient bien avant la Transition, ils n’ont pas été fabriqués par le gouvernement de Transition !

Ensuite, on nous invite à organiser les élections sans passer par l’organe unique de gestion des élections. Si nous prenions cette voie, nous tomberions dans les mêmes contestations postélectorales qui ont provoqué la chute du précédent régime ! Les réformes, ce sont les gouvernements légitimes qui ont refusé de les faire ! L’Accord pour la paix et la réconciliation, signé depuis 2015, exige des réformes que les gouvernements dits légitimes n’ont jamais pu faire !… Nous voulons qu’à la fin de la Transition, nous ayons un pays réhabilité, un Etat stable, des institutions solides.

Quelle réponse donnez-vous à ceux qui vous reprochent de ne pas tenir parole ?

La politique, c’est l’art de réaliser ce qui est possible et de rendre possible ce qui est nécessaire. Ce qui est nécessaire aujourd’hui, c’est de restaurer la dignité du peuple malien, sa sécurité, son indépendance… Ce qui est possible, c’est de se donner le temps d’une Transition responsable… Ceux qui sont dans la propagande et les formules-chocs ne sont pas connectés à la réalité.

Jusqu’où peut aller la crise avec la CEDEAO ?

Je suis persuadé que si vous enlevez les pressions et les influences étrangères, qui procèdent d’un autre agenda, nous allons nous comprendre entre Africains. La Constitution malienne dit que le Mali est prêt à léguer tout ou une partie de sa souveraineté pour réaliser l’unité africaine. C’est pourquoi le Mali fait partie des fondateurs de toutes les organisations africaines et régionales. Tous les peuples soutiennent le Mali dans son combat, parce que c’est un combat de dignité.

Certains vous demandent de sortir de l’UEMOA et de la CEDEAO…

C’est une question qui nécessite des réflexions à long terme. S’il y a un choix à faire entre la restauration de la dignité, de la souveraineté, de l’intégrité territoriale de notre pays et la sortie des organisations sous-régionales, le peuple malien saura le faire. Ma conviction est qu’on n’en arrivera pas jusque-là. Ni le Mali, ni la CEDEAO n’y ont intérêt.

La CEDEAO est-elle à la solde de quelqu’un ? Si oui, de qui ?

Les décisions de la CEDEAO sont manifestement influencées par des prises de positions extra-africaines. On a besoin de rafraîchir la mémoire des uns et des autres. La crise malienne est survenue en 2012. Et l’une de ses raisons, c’est l’absence de leadership éclairé et de maturité stratégique qui a fait qu’on a détruit notre outil de défense. Ceux qui ont détruit la Libye pour reprendre les mercenaires et leur dire d’aller couper le Mali en deux, ce n’est pas nous, ce sont des responsables français dont nous avons les noms – tout est documenté. Des responsables des ex-mouvements rebelles affirment que c’est la France qui leur a dit : « On va diviser le Mali et vous donner l’indépendance ». Ils ont compris plus tard que la France voulait plutôt les utiliser pour asservir l’Etat malien.

La CEDEAO parle de force d’attente pour nous intimider. En 2012, il y a eu le sommet de la CEDEAO à Dakar. Comme par hasard, surgit le ministre des Affaires étrangères de la France, Alain Juppé. Quand la CEDEAO décide de mobiliser une force d’attente de 3000 hommes pour libérer le Mali, M. Juppé répond que ce nombre (3000 hommes) est trop élevé par rapport à 500 combattants irrédentistes. Le Mali et la CEDEAO, à travers l’Union Africaine, demandent alors la création par l’ONU d’une force internationale appelée MISMA. Ceux qui ont commencé à dénigrer cette MISMA, ce sont des diplomates français… On a fait traîner les choses de manière à créer la MINUSMA. À la création de la MINUSMA, il a été dit qu’elle aiderait le Mali à lutter contre le terrorisme. Plus tard, on est venu nous raconter qu’elle devait plutôt servir au maintien de la paix et non faire la guerre.

Quant à l’opération française Serval, elle avait officiellement trois objectifs : éradiquer le terrorisme, aider à restaurer l’intégrité du territoire malien et appliquer les résolutions des Nations Unies. Huit ans après sa création, le terrorisme, au lieu d’être éradiqué, a quitté l’extrême nord du Mali pour se répandre dans 80% du pays ; l’intégrité du territoire n’a été pas restaurée ; les résolutions des Nations-Unies, elles, changent chaque année… Tirez vous-même la leçon !

En 2014, lorsque l’armée malienne a décidé de recouvrer l’intégrité du territoire national, il y a eu des affrontements dans l’extrême nord ; des soldats se sont réfugiés dans le camp de la MINUSMA. Ces soldats ont été désarmés et leurs armes confisquées. Quand on a réclamé ces armes, le commandant de la Minusma, le général français Hervé Gomard, a répondu que c’était un butin de guerre qui appartenait désormais à la MINUSMA! En 2016, lorsque l’opération Barkhane a été installée, son commandant a fait le tour de ses forces dans les pays concernés. Il est allé au Tchad où il fait la revue des troupes. Savez-vous ce qu’il a dit ? Comme le rapporte un journaliste français, le commandant de Barkhane a dit à ses troupes : « Nous sommes venus ici il y a 100 ans, nous sommes partis il y a 60 ans (au moment des indépendances), nous sommes revenus pour 100 ans !». Les Africains comprendront maintenant pourquoi au Mali nous avons toutes ces forces internationales alors que la situation sécuritaire ne fait qu’empirer. La lettre que le Président malien Dioncounda Traoré a écrite à l’Etat français pour demander son intervention en janvier 2013, aucune copie n’en existe ni à la présidence, ni au ministère des Affaires étrangères du Mali. L’original de cette lettre se trouve en France et c’est sur le site du Sénat français que nous l’avons retrouvée lorsque nous en avons eu besoin récemment pour demander la relecture des accords militaires déséquilibrés qui font que notre armée ne peut même pas survoler son territoire sans l’autorisation de la France. Ces accords militaires, nous voulons les relire et cela fait partie des raisons pour lesquelles la France dresse le monde entier contre nous. Le 17 novembre 2015, le commandant de Barkhane a animé une conférence de presse où il a affirmé que certains groupes armés avaient un pied chez les mouvements terroristes et un pied dans l’accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger.

Il n’était pas prévu de militaires français sur notre sol en 2013. Les Français ont respecté cet accord à Konna, à Gao… mais arrivés à l’extrême nord du pays, ils ont bloqué l’avancée de l’armée malienne et fait venir sur le territoire malien 4000 militaires français, avec un budget d’un milliard de FCFA par jour. Ils ont ensuite fait venir d’autres Africains, puis la MINUSMA, tout en interdisant à l’armée malienne d’accéder à une partie de son territoire, alors qu’ils clamaient que leur intervention avait pour but de recouvrer l’intégrité territoire malien ! L’actuel Exécutif de Transition, avec à sa tête le colonel Assimi Goïta, a décidé que nous n’allions plus demander d’autorisation à qui que ce soit pour survoler notre territoire.

Est-ce à dire que vous allez interdire le survol de notre territoire par des aéronefs militaires étrangers ?

C’est la CEDEAO qui a pris cette mesure. Le lendemain, on a débarqué des Maliens à l’aéroport de Paris en leur disant que ce sont les militaires maliens qui interdisaient que les avions atterrissent à Bamako, ce qui n’était pas vrai. Après cela, les mêmes gens ont dit que c’était sur ordre de l’Élysée. Mais pendant ce temps, un avion quitte un pays de la CEDEAO et pénètre sur notre territoire, ne sachant pas qu’aujourd’hui, nous nous sommes donné des moyens de surveillance. Nous l’identifions. Quand l’avion a su qu’on l’avait identifié, il éteint le transpondeur. Quand il a compris que nous continuions à suivre ses mouvements, il éteint la radio. Nous avons publié un communiqué pour mettre en garde. Pendant que le Cédéao songe à mettre en place une force d’attente contre nous, nous avions intérêt à savoir ce qu’il y avait dans cet avion intrus, pourquoi il est entré sur notre territoire et pourquoi il tentait de se cacher. Nous avons demandé aux propriétaires de l’avion d’arrêter de telles intrusions et nous avons désormais les moyens de défendre notre territoire.

Est-ce que vous pensez que vous faites les frais de votre rapprochement avec la Russie ?

Il y a pire que cela. J’ai utilisé à l’ONU une phrase qui a fait mal : j’ai dit qu’on nous a “abandonnés en plein vol”. Qu’est-ce que cette phrase signifie ? Dans le Sahel, il y a deux grands groupes terroristes : le JNIM et l’EIGS. Le territoire de prédilection du JNIM est le Mali. L’EIGS évolue plutôt dans la zone des trois frontières. Alors qu’un accord de défense lie le Mali à la France, le président français décide un beau jour, parce que le Mali a fait des nominations qui ne lui plaisent pas, d’arrêter les opérations militaires sans aviser le partenaire malien. A quoi sert l’accord alors ? Nous avons compris le message. Mais quand vous abandonnez les emprises territoriales qui vous confiées, pouvez-vous empêcher les Maliens de chercher d’autres partenaires ? Non ! Non ! Nous cherchons les moyens pour défendre notre peuple, nous voulons garder notre autonomie de décision. Le terrorisme diplomatique, médiatique et psychologique exercé contre nous ne nous fera pas bouger d’un iota. Nous sommes dans des relations de coopération avec l’État russe, comme avec d’autres États. Le plus insolite, c’est que lorsque les rumeurs sur cette histoire de Wagner ont commencé, la CEDEAO a tenu un sommet pour prendre des décisions sur la base de ces rumeurs véhiculées par la presse d’un autre pays ! Qu’est-ce que cela lui coûtait de téléphoner au Président de la Transition du Mali ou d’envoyer des émissaires pour en savoir davantage ? En fait, ses décisions entraient dans une stratégie de diabolisation du gouvernement de Transition du Mali. La guerre psychologique et l’intimidation ne peuvent pas nous perturber. Je remercie de façon particulière la Russie et la Chine, deux amis qui ont toujours été aux côtés du Mali depuis le lendemain de son indépendance. Tous les moyens que l’État malien a obtenus au moment de l’indépendance pour assurer sa souveraineté, son indépendance économique, militaire, diplomatique, il les avait acquis, entre autres, dans le cadre de la coopération chinoise et russe.

Comment appréciez-vous les résultats des Assises nationales de la Refondation ?

Une partie de la classe politique était opposée à ces assises qu’elle a qualifiées d’assises de Choguel, d’assises de la division. Ces assises sont en réalité parties des revendications du peuple portées par le M5-RFP depuis juin 2020. En moins de trente ans, le Mali a connu quatre coups d’Etat, sans compter les tentatives qui n’ont pas abouti. Des réformes ont été reportées d’année en année. Depuis le début de la crise, il a été décidé qu’il fallait des réformes politiques et institutionnelles. Il fallait, à cette fin, aller vers tous les Maliens. C’est ainsi que les assises ont été inscrites dans l’agenda du gouvernement de Transition. Ces assises furent historiques et essentielles pour la reconstruction de notre pays, la refondation de l’Etat, le redressement de la nation malienne. À la différence des autres rencontres, elles ont rassemblé tous les Maliens, même dans les lieux où sévit le terrorisme. L’autre caractéristique des assises, c’est que nous nous sommes engagés à en rendre exécutoires les résolutions. Le chef de l’Etat va mettre en place un Comité de suivi afin que les résolutions des assises deviennent la balise à partir de laquelle le gouvernement de Transition travaillera et nous espérons que les futurs gouvernements suivront la même ligne, parce que tous les problèmes de la nation ont été diagnostiqués par les assises, qui ont proposé aussi solutions concrètes.

Et la part du gouvernement de transition dans tout cela ?

Pour nous, il y a cinq revendications du peuple à régler : la restauration de la sécurité, la lutte contre la corruption et l’impunité, l’organisation d’élections transparentes, la réalisation de réformes politiques et institutionnelles et la mise en œuvre intelligente de l’Accord pour la paix et la réconciliation, de manière à exclure toute possibilité de partition du Mali à moyen ou long terme. Le délai de Transition que nous avons demandé à la Cédéao est nécessaire pour implémenter les réformes voulues par le peuple. Elle pouvait nous envoyer des experts pour en discuter, mais elle a préféré organiser un sommet pour assommer, humilier le peuple malien, donner une leçon à tous ceux qui voudraient contester une certaine norme, punir les dirigeants maliens !

À quoi ressemblera le Comité de suivi des résultats des assises et pour quoi faire exactement ?

Je ne voudrais pas anticiper sur cette question qui relève du président de la Transition.

Pour rapprocher le Mali et la CEDEAO, l’Algérie offre sa médiation: y êtes-vous ouvert ?

La CEDEAO nous aurait dit elle-même qu’elle envoyait des émissaires, nous n’aurions jamais fermé nos portes. D’ailleurs, quand notre première délégation est partie, le 30 décembre, à Accra, ce n’était pas pour négocier, c’était, par respect pour les chefs d’Etat, pour remettre le chronogramme qu’ils avaient demandé. Certains chefs d’Etat ont été bienveillants et ont écouté notre délégation, cherchant à nous comprendre. D’autres ont estimé que le délai de cinq ans évoqués était excessif et nous ont demandé de proposer autre chose. Il y en a aussi qui nous ont conseillé de faire tout pour éviter un bras de fer. Quand la délégation est revenue d’Accra, le Président de la Transition a réuni à nouveau son staff pour faire de nouvelles propositions. Ce que nous attendions, c’était qu’on nous envoie des émissaires pour en parler. Mais même si nous avions parlé de six mois de délai, la Cédéao nous aurait dit de tenir les élections le 27 février 2022, car un autre agenda était tracé déjà.

Que dire de ce front à l’interne qui dit que le 27 février, c’est la fin de la Transition ?

Lorsque l’ancien pouvoir tirait sur la population, faisant plusieurs morts les 10, 11 et 12 juillet 2020,  des acteurs politiques ont annoncé qu’ils allaient marcher le 27 du même mois pour soutenir ce pouvoir. Ce sont les mêmes personnes qui protestent aujourd’hui : on les attend donc le 27 février et on verra bien. Mais le président de la Transition a lancé un message patriotique, demandant à tous les Maliens l’union sacrée. Cette Transition n’a pas le même sens pour tout le monde. Il y en a qui pensent qu’elle consiste simplement à ce que certains hommes se retrouvent et se partagent le pouvoir. Ce n’est pas là notre vision. Je demande à mes frères qui sont dans la contestation politique de répondre à l’appel du président de la Transition. Notre armée est en train de recruter, de se former, de se réorganiser, de faire la guerre. Il faut qu’on lui donne les moyens de libérer notre pays. Pour cela, elle a besoin du soutien de tous les Maliens. Aujourd’hui, dans toutes les régions du Mali, il y a des opérations militaires. Le président travaille à équiper l’armée pour qu’elle restaure la dignité et l’honneur de notre peuple. Maintenant, le rôle des politiques, c’est de se donner la main pour l’accompagner.

Quelques mots aux Maliens qui ont peur de la situation qui prévaut aujourd’hui ?

Les Maliens doivent avoir confiance en l’avenir et en eux-mêmes. Toutes les grandes nations ont vécu des périodes de leur histoire où elles sont tombées, où elles ont été humiliées. Ce que nous voulons, c’est de soigner ce Mali qui est tombé, qui est humilié, afin qu’il se remette debout, qu’il marche et, enfin, qu’il coure dans le peloton de tête des Nations. Je voudrais lancer un appel à l’ensemble des forces politiques et sociales du Mali : donnons-nous la main pour sauver notre pays, pour aider notre armée ! Avec la CEDEAO, ce qui s’est passé n’est qu’une brouille entre frères. La CEDEAO ne peut pas laisser tomber le Mali. Enfin, je voudrais dire très clairement à notre partenaire français que nous ne sommes pas contre la France. En 1893, la première compagnie militaire française qui a quitté Mopti pour aller coloniser le nord était dirigée par un militaire du nom de Boiteux. 120 ans après, en 2013, c’est un autre Français nommé Boiteux qui est venu donner sa vie pour libérer le Mali. Quand François Hollande est venu au Mali, il a déclaré que ce fut le plus beau jour de sa vie politique. Ce jour-là, les Maliens ont tourné la page de tous les contentieux qu’il y avait entre eux et la France, parce que Hollande a rappelé que les Maliens s’étaient sacrifiés pour la France et que les Français étaient venus payer une dette. Nous ne sommes pas un peuple d’ingrats; les Français qui sont morts chez nous, nous n’allons jamais les oublier, pas plus que les Africains (ces Sénégalais, ces Togolais, ces Guinéens, ces Ivoiriens, ces Burkinabé, ces Nigériens) qui sont morts, de même que ces militaires qui ne viennent même pas du continent africain. Notre peuple ne peut pas les oublier. Ce que nous demandons simplement, c’est qu’on nous respecte, qu’on ne porte pas atteinte à notre dignité, qu’on ne nous insulte pas, qu’on ne nous empêche pas d’assumer la souveraineté de notre Etat. En France, en dehors de la communauté algérienne, celle du Mali est la plus importante. Le poids de cette communauté dans notre économie est plus important que celle de l’aide publique française. Ces Maliens vivent en France, ils y sont logés, ils y travaillent, ils y ont leurs familles. Croyez-vous qu’un gouvernement malien responsable va se mettre contre ce pays ? Il faut seulement que les dirigeants français se disent que les époques ont changé, que les interlocuteurs à la tête du Mali ont changé, que le Mali n’est pas comme certains pays. Il ne faut pas qu’ils se trompent d’époque, d’interlocuteurs et de pays. Pour le reste, la France et le Mali ce sont de vieux amis : il peut y avoir des scènes de ménage, mais pas de divorce. Que les Maliens aient confiance en eux-mêmes ! La principale force d’un pays, c’est de croire en son génie et en sa capacité de s’assumer. Toute l’Afrique nous regarde, ne décevons pas le Mali et l’Afrique !

Interview réalisée par l’ORTM

Source : LE PAYS

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