Nous vivons dans un pays où les logements sont généralement partagés par des familles pouvant compter plus d’une vingtaine de personnes. Les gens n’ont pas le même niveau de compréhension et de perception du risque. Ils vivent de manière « très sociale » et celui qui respecte ces mesures barrières se trouve souvent isolé.
« Seul Dieu peut sauver les familles nucléaires contre la maladie du coronavirus parce qu’elles sont incapables de respecter les mesures barrières », estiment beaucoup de maliens. Certains de nos interlocuteurs croient même que c’est un miracle que le pays soit autant épargné jusqu’à présent.
En effet, la Covid-19 est une maladie facilement transmissible et la manière dont nous vivons dans nos grandes familles au Mali, il serait difficile d’être épargné. Aujourd’hui, l’avancer de la Covid-19 est tel que, Mamadou Traoré, issu d’une grande famille à Lafiabougou, pense que c’est un miracle si sa famille est encore épargnée à ce niveau.
« A mon niveau je m’efforce toujours de rappeler ma femme et mes enfants sur le respect des mesures. Mais, quand tu vis dans une grande famille avec des personnes de niveau différent, de compréhension différente et de culture différente, ça ne servira à rien », déplore-t-il. Selon lui, le respect des mesures barrières dans les grandes familles relève aussi d’un miracle.
Selon Docteur Camara, il faudra convaincre davantage les populations car elles entendent des morts de Covid-19 et estiment n’avoir jamais vu de malade de Covid-19. « C’est ce que les gens disent dans les couloirs », dit-il. Il pense qu’il faut démontrer par la manière la plus simple que cette maladie existe effectivement et qu’elle tue.
Les gens ne font pas systématiquement confiance aux autorités sanitaires. Donc, il faudrait mieux impliquer population et prendre son avis pour riposter contre de telle situation. Il estime que l’accent doit être mis sur les masques, car la contagion par le nez est réelle ainsi que le levage permanent des mains. M. Diallo ajoute qu’il ne faut pas terroriser les populations. Pour lui, il faut éviter de semer la panique.
Pour le sociologue Moussa Doumbia, c’est la première fois à ces types des mesures barrières pour riposter contre une pandémie. Il rappelle que dans le cas de la méningite de 1968 où les établissements d’enseignement secondaire avaient été fermés, il n’y a pas eu l’emploi de mesures barrières. Seulement, rappelle-t-il, les visites étaient interdites aux malades pour éviter la contagion. M. Doumbia indique que dans les sociétés « très disciplinées » comme la Chine les mesures barrières peuvent marcher, contrairement aux pays comme la nôtre, y compris la France. Il souligne qu’à l’époque de la grippe espagnole il n’y a pas eu les mesures barrières. « La grippe espagnole est un peu voisine de la Covid-19 que d’autres appellent la grippe chinoise. Mais la contagion de la Covid est plus rapide et son taux de mortalité est beaucoup plus élevé que la grippe espagnole », dit-il.
Selon lui, le lavage des mains et le port du masque sont plus facile d’être adoptés que l’application de la distanciation. « Dans la société malienne où les gens vivent beaucoup plus en famille, le respect de la distanciation est très difficile. Nos autorités doivent trouver d’autres solutions en menant des réflexions », conclu M. Doumbia.
Ibrahima Ndiaye