C’est le jeudi 31 mai dernier que les députés de l’Assemblée Nationale se sont prononcés sur le projet de loi portant révision de la Constitution.
Après plusieurs heures de débats, le projet de loi qui était défendu par KassoumTapo, ministre des Droits de l’Homme et des Reformes de l’Etat, a été adopté par 111 voix pour, 35 contre O abstention.
A l’ouverture des travaux, le président de l’Assemblée Nationale IssakaSidibé a indiqué qu’à travers cette réforme constitutionnelle, il s’agit de raffermir la démocratie malienne et corriger certains disfonctionnements et lacunes dans la loi fondamentale.
« Aujourd’hui est un grand jour pour l’Assemblée Nationale parce que nous allons débattre d’un texte qui est éminemment important pour notre pays. Pour cela, je vous demande d’en débattre avec plus de sérieux et de respect », a-t-il dit à ses collègues députés.
Pour lui, le processus de révision constitutionnelle au Mali est à sa 3ème tentative après celle de 2000 et de 2011.
A en croire le président de l’Assemblée Nationale, toucher à l’acte fondamental de la République est une pratique qui fait couler beaucoup d’encre et de salive.
« Il est tout à fait normal de conformer la Constitution avec le développement et la situation actuelle du pays, surtout que celle de 1992 n’a pas manqué de montrer ses limites et a failli dans la résolution de la crise du Nord, la lutte contre la mauvaise gouvernance et la corruption. La révision pour ma part doit être faite pour corriger les anciennes erreurs mais dans notre cas, elle suscitera d’autres problèmes dans la prochaine décennie tout comme nous en rencontrons avec l’actuelle constitution », a-t-il souligné.
Le député Sékou Fantamady Traoré, Rapporteur de la Commission des Lois Constitutionnelles, de la Législation, de la Justice, des Droits de l’Homme et des Institutions de la République dira qu’après une large concertation dans le pays où plus 400 personnes ressources ont été écoutées, le projet de loi a été amendé avec 80 propositions. Selon lui, le Mali a un besoin d’une révision constitutionnelle mais cela doit s’opérer dans des conditions idoines.
« La constitution actuelle a montré ses limites à des points bien précis avec l’évolution et les besoins exprimés par les Institutions et le peuple malien. On peut en citer l’intérim de DioncoundaTraoréqui a dépassé les 40 jours prévus et d’autres manquements. L’accord de paix est un vecteur essentiel qui invite le gouvernement à présenter ce projet au Parlement pour une sortie de crise » a-t-il expliqué. Avant de poursuivre que le texte répond à l’aspiration du peuple malien.
A sa suite, le président de la Commission des Lois Constitutionnelles et de la Législation, l’honorable Zoumana N’TjiDoumbia a précisé qu’ils ont accompli tout ce qui leur avait été assigné comme missions. « Nous avons écouté une bonne partie de la population qui a éclairé notre lanterne », a-t-il souligné.
L’élu de Bougouni a rappelé que l’initiative vient du président de la République. Mais comme toute œuvre humaine dit-il, le document était à améliorer. D’où les travaux en commission depuis quelques mois. L’objectif étant d’avoir l’avis des personnes ressources et des citoyens lambda. Pour lui, la commission a écouté environ 400 personnesde Kayes à Taoudéni.
Pour l’honorable Mody N’Diaye, du groupe parlementaire VRD (opposition), dans ce projet de texte, beaucoup de choses restent floues. C’est pourquoi, l’opposition a formulé 43 amendements.
A en croire le député de l’opposition Mody N’diaye, le moment est mal choisi et le projet de révision a été un travail presque bâclé car le peuple ne se reconnait pas dedans.
« Un accord a été signé à Alger, aussi, une conférence dite d’entente nationale a été organisée. Et maintenant, il est question du texte fondamental du Mali. Je propose qu’on prenne le temps qu’il faudra pour ficeler un texte digne de ce nom qui n’offensera personne et où tous pourront s’y reconnaître », a-t-il proposé. Avant de poursuivre que « la constitution doit être une garantie pour le peuple contre les discriminations, la corruption, le clientélisme, la gabegie etc. Et lajustice doit être indépendante et non attribuée à des juristes politiques qui pour la plupart défendent la position du pouvoir même défaillant. Cette révision constitutionnelle est un acte qui se fait sur le dos de la population ».
Face aux multiples amendements proposés d’une part par la Commission Lois de l’Assemblée Nationale et par le président du groupe parlementaire de l’opposition, Me KassoumTapo, a rappelé aux députés que le processus n’est pas de chercher de confort, mais que c’est une exigence imposée par la situation actuelle du pays.
« Contrairement aux processus inachevés de 2000 et 2011 qui étaient des révisions de confort pour notre démocratie, la présente révision est devenue une exigence imposée par la situation politique du pays. C’est aussi une exigence de la communauté internationale dans le cadre de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation », a fait savoir le ministre KassoumTapo.
Selon Me Tapo, ce projet de révision de la constitution n’entraine pas un changement de République. Mais il renverse la hiérarchie des normes constitutionnelle en créant de nouvelles Institutions de la République, notamment la création du Sénat, la Cour des Comptes, etc. Le ministre a tenu à préciser que le texte de révision ne touche pas au mandat présidentiel. Mais, contrairement à la constitution en vigueur, en cas de vacance de poste, les fonctions de présidentde la République seront assurées par le président du Sénat au lieu du président de l’Assemblée Nationale.
Après plusieurs heures de débats houleux jusque très tard dans la nuit, les députés ont donné leur aval par 111voix pour, 35 contre et 0 abstention.
Souleymane BiramaMinta
Source: Tjikan