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Retard de l’hivernage : Faut-il s’inquiéter ?

Alors que les pluies s’installent timidement, et ce presque partout au Mali, les paysans ne cachent pas leur préoccupation. Les pluies seront-elles suffisantes pour assurer une bonne récolte ?

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Lassina Berthé, cultive du coton, du maïs du mil et du sorgho, répartis sur une quarantaine d’hectares à Zérilani, commune de Kléla, dans la région de Sikasso. Il pleut depuis quelques jours mais l’inquiétude se ressent dans les propos du cultivateur. « En fait, il pleut très peu. Nous ici, dans la région de Sikasso, nous sommes habitués à avoir des pluies dès le début de mai. Cette année, nous sommes en juillet et la quantité d’eau qui tombe est loin de ce que nous voyons d’habitude ». Pour le prouver, il sort son cahier sur lequel il note ses relevés de pluies. « Les premières pluies sont tombées le 18 mai, soit avec deux semaines de retard pour notre zone. Elles n’ont pas dépassé les 10mm. Le 19 mai, 20mm et après, plus de pluies jusqu’au 11 juin où il n’est tombé que 11mm. Ce n’est que vers le 20 juin que les vraies pluies (plus de 20mm) ont démarré».

Hivernage tardif mais excédentaire

Cette situation de retard dans le début de l’hivernage « n’est pas une surprise », si l’on en croit le Directeur National de l’Agriculture, Moussa Camara. « La météo a signalé il y a deux ou trois mois, dans le cadre des prévisions saisonnières, que les pluies connaitraient cette année un léger retard dans leur installation, mais que l’hivernage serait ensuite excédentaire, à partir de la dernière décade de juin ». Les pluies des derniers jours semblent confirmer cette tendance, que les autorités espèrent voir s’accentuer et perdurer jusqu’en fin septembre-début octobre. Cet optimisme est celui que tentent de communiquer aux paysans les agents de vulgarisation sur le terrain. « Les agents de l’agriculture nous disent de garder espoir, que les pluies vont venir. Nous, nous sommes inquiets, et on nous dit que ce sont les effets des changements climatiques et que ça va aller », se lamente Lassina Berthé. Dans certaines zones de la région de Sikasso, les paysans n’ont même pas encore fini les cordages (mise en place avant les semis), et craignent donc pour la campagne, dont les objectifs nationaux sont de plus de huit millions de tonnes pour les céréales, et 650 000 pour le coton graine.

«Les changements climatiques sont bel et bien responsables de cette situation », nous explique Moussa Touré, prévisionniste à la Direction Nationale de la Météorologie (DNM). Selon lui, il faut comprendre que la prévision saisonnière est basée sur l’observation des anomalies de température au niveau des océans. Le lien entre un bassin dans l’Océan Atlantique et un autre dans l’Océan Pacifique avec le temps qu’il fait actuellement au Mali serait évident. « Nous avions prévu ce retard, mais il faut aussi dire que nos estimations des quantités de pluies sont plutôt positives. Nous auront un hivernage à tendance excédentaire » explique-t-il. Deux points mitigent cependant l’explication du scientifique. Il s’agit des conséquences de la mauvaise répartition des pluies que sont les poches sèches (des périodes longues de sécheresse entre deux pluies), et les inondations. A la Direction Nationale de l’Agriculture, on assure que ces aspects ont été pris en compte et qu’un système innovant permet de les corriger. «Nous avons un dispositif qui nous permet d’aider les paysans : c’est l’irrigation d’appoint. Il n’est plus question de perdre une récolte à cause d’un trou de sécheresse, nous allons aider les paysans à irriguer les céréales sèches que sont le maïs, le mil et le sorgho. Ceux que nous avons rencontrés sont ouverts à cela, ils seront dotés de moyens modernes comme les motopompes, les arrosoirs. Il y a aussi le système de pluies provoquées qui permet d’activer les nuages féconds, ainsi combler le déficit et les activités peuvent être lancées » explique M. Camara.

Un système bien rôdé

Si au niveau des autorités, on ne se montre pas inquiet, c’est qu’il existe depuis 1982 un dispositif qui permet de prendre en compte les prévisions météorologiques pour aider les agriculteurs à faire face efficacement aux différentes situations. Le prévisionniste Moussa Touré affirme ainsi que les prévisions sont mises à jour quasi quotidiennement et les informations qui en sont tirées permettent d’adapter les calendriers de cultures aux différents risques. Daouda Zan Diarra, chef du service agro-météorologique explique avoir « reçu les prévisions saisonnières depuis le mois de mai. Ces prévisions sont utilisées à plusieurs échelons, qui sont les services techniques du développement rural, les ONG, la société civile, etc. ». Le premier destinataire de ces informations est le Groupe de Travail Pluridisciplinaire d’Assistance Météorologique qui fait le suivi de l’évolution de la situation météorologique et hydrologique. Les informations destinées au GTPA sont assorties de conseils et d’avis à destination du monde rural. Par exemple, celui qui concerne la décade du 21 au 30 juin donne des conseils valables du 1er au 10 juillet et indique quelle spéculation peut être plantée dans quelle zone. Ces informations sont ensuite vulgarisées au niveau des services d’appui aux paysans qui les relaient afin que ces derniers reçoivent tous les dix jours une situation détaillée de la pluviométrie.

Ce dispositif permet aux paysans, qu’ils soient agriculteurs, éleveurs ou pêcheurs, de savoir quelles dispositions prendre, et le meilleur moment pour les différentes étapes de la culture. Ils ont été formés pour savoir utiliser les matériels de mesure et interpréter les données recueillies. A Zérilani, Lassina Berthé peut ainsi utiliser les informations recueillies grâce à son pluviomètre. « Je sais que je peux semer dès que les données que je note m’indiquent un cumul de 20mm de pluies tombées ». Mais une bonne récolte, c’est aussi de nombreux autres paramètres à prendre en compte. « Il est indispensable d’utiliser de bonnes techniques culturales. Il faut semer dès qu’il y a une pluie utile de 20mm, après avoir bien travaillé le sol afin qu’il garde l’humidité longtemps. Avec un apport correct en engrais, il n’y a pas de raison que le champ ne réussisse pas ». Les paysans ont accès aux informations météorologiques et ainsi ils savent choisir leurs semences, dont certaines sont à cycle court et peuvent donc arriver à maturation avant la fin de l’hivernage. Enfin, toujours grâce aux informations, les paysans savent s’il y a risque d’inondation ou pas. Ils savent donc choisir au mieux les sites pour leurs plantations, par exemple ils évitent les bas-fonds dans les zones où les excédents de pluies sont annoncés, comme cette année.

source : journaldumali

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