Pascal Baba Couloubaly, ancien ministre de la Culture, s’est battu pour la promotion des valeurs de notre terroir. La refondation est l’occasion de poursuivre son combat.
Les trois principes de la refondation – respect de la souveraineté du Mali, libre choix des partenaires stratégiques du Mali, défense des intérêts du Mali dans la prise de décision – ont contribué au succès de la reconquête du septentrion malien. Un autre bastion non des moindres, très vital pour notre épanouissement identitaire, celui de la culture, a besoin lui aussi d’être reprise en main, notamment par la promotion de l’industrie culturelle.
Est légendaire la pugnacité de Pascal Baba Couloubaly, ancien ministre de la Culture, à promouvoir les valeurs de notre terroir. Le bamanan fier de ses origines, s’est battu sans relâche, pour la revalorisation des patronymes du terroir. Il n’a jamais accepté Coulibaly comme son nom de famille, mais Couloubaly. On est tenté de lui donner raison quand on sait que le diminutif ‘’Coulou’’ a un sens. A ses yeux, les ‘’Coulibaly’’ ont semble-t-il un ancêtre commun. Il répétait à l’envie, que son nom de famille se prononce et s’écrit Couloubaly. Caprice d’un contestataire désireux de se mettre en valeur en se singularisant ou reflexe identitaire, de celui qui savait qui il était vraiment ?
Il reste évident que l’anthropologue et non moins ancien ministre de la Culture, était aux premiers rangs des Africains qui ne pouvaient pas s’égarer.
La réalité est que plein de noms de famille, de nos villes et villages ont été transcrits de façon erronée, pendant l’ère coloniale, soit par ignorance, soit par mépris, ou pour des raisons qui convenaient à nos anciens maîtres ! Parallèlement, les noms de famille Koné, Traoré, Doumbia, Bagayoko, tels quels n’échappent pas à la règle. Leur forme authentique devrait être Kônè, Tarawélé, Doumbouya, Bagayôkô.
L’erreur est humaine, mais c’est y persister qui est diabolique, dit-on.
Plus de soixante ans d’indépendance formelle, nous continuons de fermer les yeux sur ces inepties. Comment comprendre qu’aujourd’hui encore, on transcrive officiellement un mot avec sa prononciation erronée et que dans le langage courant, il soit articulé autrement ? A preuve, notre capitale s’appelle Bamakô. C’est -à-dire dos du caïman ou rivière des caïmans, selon certaines versions. Or sur les documents, c’est plutôt Bamako qui apparaît. Cela est valable pour Mopti, la cinquième capitale régionale. Pour ses ressortissants c’est plutôt Moti (regroupement en peuhl). Idem pour certains villages riverains de la RN7 : Sôlô au lieu de Solo, Marakô au lieu de Marako ; Sèkèssôna au lieu de Suèguèssona ; Kangaba et Kolokani constituent aussi d’autres exemples. Camp de Kaaba est devenu Kangaba ; Kôlôn ka gni s’est transformé en Kolokani.
La même absurdité est manifeste dans le programme scolaire d’histoire au primaire, l’une des disciplines enseignées à l’école. Son enseignement permet d’apprendre aux élèves de mieux connaître le passé et d’avoir un repère. Mais encore faudrait-il, que cela se fasse dans les règles de l’art. En classe de 6è année, la leçon intitulée ‘’L’Empire du Ghana : des origines à l’apogée’’ contient une ineptie. En effet, à cause de sa fabuleuse richesse, dont l’or constituait le socle, on avait affecté à l’Empereur d’alors un surnom élogieux qui, traduit, signifie ‘’le roi de l’Empire de l’or’’ en langue soninké. L’orthographe de ce surnom est Kagué-Maghan Cissé. Et c’est ce qui est correct.
Combat pour un renouveau culturel
Mais par déformation lexicale des administrateurs français de la colonisation, ce surnom a été transcrit ‘’Kaya -Maghan’’.
Celui-ci résonne en bamanankan, comme un mot ordurier. C’est pourquoi, quand un instituteur aborde la leçon d’histoire ayant trait audit Empereur, les élèves ne peuvent s’empêcher de pouffer de rire, en pensant au sens que cela donne en bamanankan.
Aussi les historiens et les socio-anthropologues qui semblent être en première ligne de combat, pour un renouveau culturel peuvent-ils nous apporter leur lumière sur la question. Ce ne sont pas les promoteurs de l’écriture ‘’Nko’’ qui nous diront le contraire.
A présent que plusieurs actes ont été posés par les autorités actuelles, pour faire de la refondation une réalité tangible, on devrait mettre le turbo sur le plan culturel.
Mohamed Koné
Le Challenger