Dane était un jeune latéral gauche très technique. Audacieux, ses chevauchées sur le couloir étaient conclues par des centres au cordeau ou des passes en retrait fatales pour le camp adverse. Toujours propre, il arbore une coiffure qui en dit long sur son côté gentleman. En 2001, à Koulikoro lors de la finale de Coupe du Mali entre le Stade malien de Bamako et le Mamahira de Kati, Dane a fait parler son talent. Sur une transversale de Boubacar Guèye, il amortit le ballon, enchaîne un jonglage et stagne le cuir entre le dos et la nuque pour enfin effectuer un centre. Pendant que le Stade Diarrah H de Koulikoro est en ébullition, l’attaquant Mamadou Kanté jaillit et met le ballon au-dessus de la barre transversale. A la fin de la rencontre, le président Alpha Oumar Konaré le prend dans ses mains et lui souffle des mots à l’oreille.
Sur cela Dane a berné tout le monde, en affirmant qu’il demandait le numéro du chef de l’Etat. Cela n’était pas vrai. Nous sommes revenus sur ce souvenir. Aujourd’hui il avoue : “Sincèrement le président de la république a été séduit par ma technique. Il m’a dit que je jouerais la Can-2002”.
Ce qui est sûr, la sélection de Dane pour ladite Can est surtout liée à son statut de latéral gauche de métier. A l’époque ce type de joueur manquait non seulement parmi les professionnels, mais aussi sur le plan national. A propos de cette compétition historique, à quel moment il a senti que sa participation était inéluctable ?
Dane répond : “Dès le jour où la Caf a désigné le Mali, pour organiser la Can, j’ai mûri l’ambition d’être au rendez-vous. Du coup, je me suis inscrit au dojo du Camp-Para pour renforcer ma musculature. Tous les matins à l’aube, je courrais dans l’ACI-2000. Déjà j’étais en équipe nationale. Comment y demeurer était la problématique. Donc ma sélection n’était pas un fait du hasard, mais la suite logique de l’objectif que je me suis fixé”. A l’accession du CSK en première division, Dane s’impose comme l’une des vedettes de l’équipe. Ce qui lui a valu une sélection en équipe nationale et un tournoi Amilcar Cabral à Praia en 2000. Certes les Centristes n’ont pas remporté de titres sur le plan national, mais ils ont rehaussé leur niveau par la pratique d’un beau football digne de leur rang.
Presque tous les grands clubs ont payé cash la qualité de ce football séduisant. A un moment donné, le CSK a senti le départ de certains joueurs pour d’autres cieux. Adama Diakité dit Dane rejoint le Stade malien de Bamako au début de la saison 1999-2000. La concurrence à l’époque était très rude, avec comme entraîneur le Ghanéen Abdul Razak.
Le technicien n’était pas complaisant dans son encadrement. Donc la titularisation de Dane au poste de latéral gauche reposait sur sa forme constante, soutenue par une technique qu’il a améliorée au CSK. Son passage dans la famille blanche est marqué par un titre de champion (2000) et une Coupe du Mali (2001).
Alors survint la Can-2002 dont la liste finale a fait l’objet de beaucoup d’étapes liées à l’effectif et l’enjeu que suscitait la compétition. Comme évoqué plus haut Dane était le seul latéral gauche de métier sur le marché.
Il en profite pour jouer en tant que titulaire tous les matches jusqu’au quart de finale. Contre le Cameroun pour des raisons de blessure, il échappe aux coups de Marc Vivian Foé, de Samuel Olembé et surtout le déstabilisateur de la défense malienne, Pius N’Djéfi. Après la Can, Dane a le choix entre Nancy et Anderlecht. Il réussit le test en Belgique, mais la signature du contrat est entravée par une mauvaise nouvelle. La visite médicale diagnostique une déchirure musculaire. Selon lui, les dirigeants du club belge appellent le président du Stade malien de Bamako, Mahamadou Samaké dit Sam, pour des dispositions à prendre afin que le joueur retourne après guérison.
Le médecin conseille à Dane un repos total, au minimum ne pas conduire même une voiture automatique. Ces conseils de repos créent un divorce entre le joueur et le Stade malien. Comment ? Dane donne sa version des faits : “Mon retour à Bamako tombe sur le match Stade-Jeanne d’Arc de Dakar. L’encadrement technique me demande de rejoindre l’internat. Compte tenu de ce qui m’a été conseillé en Belgique, je n’ai pas répondu à l’appel de l’entraîneur. Dans l’interprétation de la lourde défaite du Stade (1-3), des supporters m’ont persécuté, au point que j’ai éteint mon téléphone. Après le match, j’ai repris les entraînements, tout en insistant auprès de Sam afin qu’il rappelle les Belges. En vain !!! Parce que les contacts se sont rompus. Je n’ai pas apprécié cette gestion de ma situation par les dirigeants du Stade. Il fallait réagir”.
Dane opte pour une position radicale, en transférant au Djoliba avec la ferme conviction de décrocher un contrat professionnel. Parce qu’il en avait assez de la monotonie du football malien. Au lendemain d’une Can bien réussie, la suite logique réside dans un contrat professionnel. Dane soutient avoir signifié son ambition à Karounga Kéita dit Kéké au moment de transférer au Djoliba. Celui-ci lui promit trois mois pour négocier un contrat.
Dommage ! Cette promesse dans le temps ne sera pas honorée. Dane manifeste sa désapprobation et abandonne le terrain. Kéké entreprend les négociations avec les parents du joueur. Les violons ne se sont pas raccordées . Une fois de plus Adama Diakité fait parler son cœur. Il file à l’AS Réal de Bamako contre une moto, une somme d’argent et un salaire mensuel pour trois saisons (2004-2007).
Désemparé par l’échec de contrat professionnel, Dane prend sa retraite au Réal. Du coup, il rejoint l’encadrement technique des juniors réalistes, avant de débarquer à Ségou pour entraîner le FC Falémé. Ce fût le début d’une série de formations d’entraîneur, qui le conduiront au FC Fofana de Lafiabougou.
Dane retient comme bons souvenirs la Can-2002, les différents voyages avec l’équipe nationale et le Stade malien de Bamako. L’échec de son contrat en Belgique a dépassé chez lui le niveau de mauvais souvenir. C’est plutôt une psychose qui taraude à présent ses esprits.
Adama Diakité dit Dane est marié et père de cinq enfants, dont une fille qui est d’ailleurs l´aînée. C’est elle qui, malgré son jeune âge, nous a reçus avec tous les honneurs.
Cependant un enfant de Dane, Idrissa Diakité dit Idi a attiré notre attention. Il nous séduit par son savoir-faire sur le ballon. C’est un bambin de onze ans qui fait deux cent coups de jonglage du pied gauche, sans frémir. Il fallait alors retourner sur nos pas pour demander à son père comment il peut laisser un génie prometteur à la merci de la rue ? Dane très ému par notre admiration dit ceci : “Le Français Jean-Marc Guillou a fait la remarque. Il a promis de nous le prendre à 12 ans. Les pourparlers sont finis. Nous verrons le moment venu comment les formaliser”. Bonne chance au petit !!!
O. Roger (00223 63 88 24 23)
Source: Aujourd’hui-Mali