16 mai 1977-16 mai 2023 ! Cela fait 46 ans que le président Modibo Kéita (né le 4 juin 1915 à Bamako) a été arraché à l’affection de la nation alors qu’il était en détention au Camp des commandos parachutistes de Djicoroni Para à Bamako. Et hasard du destin, pour sauver la République, le Mali est aujourd’hui en quête des mêmes principes (résilience, souveraineté, justice…) qu’il avait patiemment et progressivement réussi à imposer au jeune Mali indépendant.
Faire preuve de patience, d’esprit de sacrifice, donc de résilience (le mot n’était pas encore en vogue à l’époque) pour asseoir la souveraineté récemment acquise ! Telle était la ligne directrice de la vision politique du regretté président Modibo Kéita à l’accession du Mali à l’indépendance le22 septembre 1960. Et cela lui réussissait bien jusqu’à ce que des ennemis extérieurs parviennent à nouer des alliances à l’interne pour saborder les initiatives libératrices lancées dans tous les secteurs.
Celles-ci, jusqu’au coup d’État du 19 novembre 1968, avaient commencé à porter leurs fruits. Mais il fallait au peuple tenir bon et consentir encore des années de sacrifice pour récolter les fruits de la résilience. Aujourd’hui, le Mali se retrouve face au même défi, 46 ans après la mort du président Modibo Kéita. Encourager le peuple à la résilience est crucial pour conquérir et asseoir notre souveraineté. Modibo Kéita était un vrai visionnaire combattu pour avoir mis son pays sur la voie de l’émancipation politique, économique et socioculturelle.
Modibo Kéita, à son arrestation le 19 novembre 1968, avait lancé un appel à la jeunesse malienne, déclarant qu’aucune goutte de sang malien ne devait être versée pour qu’il reste au pouvoir. Il a souligné que le Mali n’appartient ni à lui ni à ceux qui ont fait le coup d’État, mais aux jeunes. Il les a exhortés à prendre le flambeau et à veiller à ce que le pays soit façonné par leurs actions.
En tant que vrai leader, Modibo Kéita s’est toujours préoccupé du Mali, de son avenir et de ses intérêts, sans nourrir le peuple d’illusions. Face aux difficultés actuelles du pays, les inquiétudes du père de l’indépendance se sont avérées fondées.
Après le coup d’État de 1968, le pays a dévié de la voie tracée vers son émergence. Malgré les risques d’échec, cette voie promettait un avenir meilleur pour le peuple. Contrairement à certains politiciens qui prétendent détenir des solutions magiques une fois au pouvoir, Modibo Kéita n’a jamais trompé les Maliens en leur faisant croire que l’affermissement de notre souveraineté serait facile. Il a insisté sur la nécessité de compter sur eux-mêmes et d’être prêts à consentir les sacrifices nécessaires pour vaincre le colonialisme et le néocolonialisme naissant.
Modibo Kéita a également souligné l’importance de la confiance en soi et des valeurs du peuple malien. Il a critiqué les dirigeants africains qui se complaisent dans la vie facile tandis que le peuple souffre. Il a encouragé la construction de l’unité industrielle et a mis en garde contre la dépendance financière envers d’autres pays.
Le coup d’État de 1968 a entraîné les problèmes redoutés par Modibo Kéita, tels que la corruption, l’injustice et la mainmise d’une élite politique et économique sur le pays. De 1960 à 1968, le Mali était gouverné avec une vision claire d’émancipation totale du joug colonial et du néocolonialisme.
Depuis le 18 août 2020, de jeunes leaders militaires animés par la volonté de reconquérir la souveraineté du Mali ont émergé. Le peuple est appelé à faire preuve d’une résilience sans faille. Le changement est en cours, mais il se fait dans la souffrance, et il ne faut pas sous-estimer les défis à venir.
Nous devons tirer les leçons du passé et ne pas nous laisser distraire par des politiciens dont les ambitions personnelles limitent leur vision de l’émergence du Mali. Il est temps de prouver notre résolution et de ne pas nous avouer vaincus jusqu’à ce que le vrai changement souffle sur notre pays.
Ce qui suppose aussi que nous ayons maintenant la lucidité de ne plus nous laisser distraire par des politiciens dont la vision de notre émergence ne dépasse pas le seuil de leur ambition personnelle !
Moussa Bolly
Source: Journal le Matin