La dichotomie est saisissante, certes, pas réjouissante ! Les pouvoirs publics, notamment ceux en charge de la sécurité et de la défense, persistent et signent : l’armée malienne monte en puissance. Il en est de même pour l’insécurité, notamment, au centre du pays. C’est peut-être logique.
Les phénomènes d’insécurité sont en partie causés (ou expliqués de cette manière) par l’urbanisation des grandes agglomérations. Cette théorie ne saurait prospérer au centre du Mali qui est en proie à l’insécurité. En raison de la foison de groupes d’auto-défense et de l’incapacité de l’Etat à y faire régner l’ordre. Alors, au Mali, la montée en puissance de l’armée rime avec la montée en puissance de l’insécurité. Quand le contraire aurait été beaucoup plus logique.
À la cérémonie commémorative de la vingt-neuvième édition de la Journée de l’enfant africain, le président de la République, Ibrahim Boubacar Keita, a défendu la thèse de la montée en puissance de l’armée malienne. Quelques jours auparavant, à l’Assemblée nationale, le ministre de la Sécurité et de la Protection civile, le général Salif Traoré, défendait la même thèse. «Les forces armées et de sécurité sont en train de monter en puissance, mais sont surchargées», avait-il déclaré.
Même si, ajoutera-t-il, le Mali a des avions, ils sont pas en nombre insuffisant, ce qui oblige souvent l’armée malienne à solliciter le concours des Français pour l’évacuation des blessés par voie aérienne.
Dans les propos duministre de la Sécurité et de la Protection civile, comme dans ceux du président de la République, il y a comme une dichotomie. Oui, l’armée malienne monte en puissance, mais le volume de son travail s’est entre-temps décuplé, a semblé dire le ministre Salif Traoré.
Quand Ibrahim Boubacar Keita affirme que le gouvernement est à pied d’œuvre pour faire en sorte que «nous ayons une armée à hauteur de mission». Et souhaite que tous s’unissent, se mettent ensemble, à travailler pour le bonheur du Mali. Lorsqu’il ne promet pas de tout faire pour que le Mali avance et que l’avenir des enfants soit assuré.
Au fait, l’insécurité au centre semble avoir complètement désarmé les autorités maliennes. Lesquelles s’envasent dans l’émotion et en tirent prétexte pour adjurer l’union sacrée des Maliens. Plus exactement, pour condamner toute autre lecture de la situation au centre du pays.
Pour vous en convaincre, IBK déclare : «L’heure n’est pas à des postures. L’heure demeure de penser au Mali, à la survie du Mali, à l’existence du Mali. La seule tâche à laquelle nous devons nous atteler demeure aujourd’hui celle de la stabilisation du pays, celle de la lutte contre ceux-là qui sont contre nos valeurs. C’est une tâche d’urgence nationale absolue.Faire en sorte que le Mali puisse les bouter hors de ce territoire national, retrouver sa paix et sa stabilité.»
Mais, «pour la sécurité, pour la paix au Mali, reconnaît-il, il faut une armée qui sache se défendre». Il aurait dû dire : «pour la sécurité et la paix au Mali, il faut que l’armée malienne monte en puissance».
Sinon, on restera toujours dans cet état d’âme du président IBK : «devant ces cinq tombes, des fosses communes, je n’ai pu retenir mes larmes, et imaginer que 24 jeunes corps innocents gisaient là dans la terre malienne, du fait de la haine, de la barbarie, de la bêtise humaine».
Fanta Sakiliba
Nouvelle Libération