La violence et l’insécurité croissantes menacent la prise en charge et la protection d’environ 2,3 millions d’enfants en besoin d’assistance en 2020 dans la région du Sahel central (Burkina Faso, Mali et Niger), contre environ 1,2 million d’enfants en 2019, a annoncé un communiqué publié le 26 mai 2020 par le bureau de l’UNICEF au Mali.
Une situation aggravée par le fait que le Burkina Faso, le Mali et le Niger sont parmi «les pays les plus touchés par la COVID-19 en Afrique». Ainsi, a déploré l’UNICEF, «alors que la pandémie se propage dans toute la région, la violence contre les enfants continue d’augmenter». Au Mali, a indique l’organisation onusienne, plus d’un million d’enfants seront confrontés à des problèmes de protection cette année, soit deux fois plus que l’année dernière.
«La pandémie de la COVID-19 amplifie les risques en termes de droits et de sécurité pour des millions d’enfants déjà pris au piège d’une ou de plusieurs crises humanitaires dans la région du Sahel central», a déclaré Marie-Pierre Poirier, Directrice régionale de l’UNICEF pour l’Afrique de l’ouest et du centre, citée dans le communiqué. «Dans un contexte de forte insécurité, les enfants ont été victimes d’abus et de violence, d’exploitation sexuelle ou économique, de trafics… et beaucoup ont été séparés de force de leurs familles ou recrutés dans des groupes armés», a-t-elle dénoncé.
La COVID-19 aggrave encore «la situation déjà critique» des enfants du Sahel central, particulièrement des filles, des enfants déplacés et de ceux qui vivent dans la rue. Les écoles ont été fermées dans les trois pays pour limiter la propagation du coronavirus. Une décision politique qui a rendu difficile l’accès à l’Education pour environ 12 millions d’enfants temporairement non scolarisés. Avant la COVID-19, a souligné l’UNICEF, plus de 8 millions d’enfants de 6 à 14 ans n’étaient déjà pas scolarisés dans la région. «Lorsque les enfants ne sont pas scolarisés, ils sont plus exposés au recrutement par des groupes armés, à la violence sexuelle et sexiste, au travail des enfants et à d’autres formes d’exploitation et d’abus», a alerté le communiqué.
La situation humanitaire au Mali reste extrêmement fragile et complexe. En 2019, 745 violations graves contre des enfants (y compris le recrutement par des groupes armés, le meurtre, la mutilation, le viol et autres violences sexuelles, les attaques contre des écoles et les hôpitaux, les enlèvements et les accès refusés aux services humanitaires) ont été enregistrées dans le cadre des premières investigations par les Nations unies. Ce qui, selon l’UNICEF, représente le nombre le plus élevé enregistré depuis 2017.
En mars dernier, au Mali, 228 incidents de violations graves contre des enfants ont été provisoirement signalés pour 2020. Une forte augmentation des déplacements forcés a également été enregistrée avec plus de 137 000 enfants actuellement déplacés dans ce pays.
«Les mesures prises pour contenir la propagation du coronavirus ont ralenti la fourniture de l’aide humanitaire et des services sociaux pour les soins et la protection des enfants dans le Sahel central. Pendant ce temps, l’insécurité n’a pas cessé et les enfants continuent à payer un lourd tribut», a déploré Mme Poirier.
Pour elle, «l’heure est plus que jamais à la solidarité mondiale. Alors que les gouvernements et les partenaires humanitaires travaillent ensemble pour protéger les enfants de l’impact sanitaire de la COVID-19, nous devons également continuer à protéger les enfants les plus vulnérables contre la violence, l’exploitation et des abus, en rendant nos programmes à l’épreuve de la COVID-19».
L’UNICEF a appelé les gouvernements à investir dans les services de protection de l’enfance et pour le personnel de l’aide sociale qui sont des piliers essentiels de la réponse contre la COVID-19 ; et à renforcer les systèmes de protection nationaux, les mécanismes d’orientation pour la violence sexiste et la provision d’un soutien psychosocial, en particulier pour les enfants dans les contextes de conflit.
Au Mali, l’UNICEF s’est associée à des organisations de la société civile pour fournir des services de protection de l’enfance, notamment un soutien psychosocial et des soins alternatifs aux enfants touchés par la COVID-19 ou exposés à un risque élevé de contamination.
L’UNICEF a également revu à la hausse son appel en faveur des enfants de la région du Sahel central à 268 millions de dollars US pour apporter une aide aux populations touchées et à risque de la COVID-19… Mais, en avril 2020, les plans d’intervention restaient sous-financés à 76 % au Burkina Faso, 76 % au Mali et 71 % au Niger.
Moussa Bolly
LE MATIN