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Probable libération de Soumaïla Cissé : Un coup de maître pour les autorités de la transition malienne

Il n’y a pas que dans le domaine de l’économie et des affaires  que le Be to Be, cette forme de négociation qui concerne un nombre d’acteurs plus restreint, fonctionne à merveille. Ainsi en est-il dans d’autres domaines.

Et il en va jusque dans la lutte contre le terrorisme. Même si dans le cas d’espèce, on ne sait pas si les deux parties ont vraiment gagné. Un peu à la surprise générale, les nouvelles autorités maliennes ont procédé, le dimanche 4 octobre dernier, à la libération d’une centaine de terroristes et de présumés terroristes dont certains seraient des têtes de proue d’attaques terroristes dans la sous-région. Il ressort de cette libération qu’une bonne partie de ces terroristes,  élargis pendant le week-end,  ont été convoyés pour les uns à Tessalit aux confins de la frontière algérienne, pour les autres, au centre du Mali d’où ils ont disparu dans la nature à bord de véhicules qui les attendaient.

 Un trophée de choix pour les militaires maliens

Selon ceux qui sont dans le secret des dieux, cette initiative entrerait dans le cadre de négociations avec des groupes terroristes, en vue d’obtenir la libération du chef de file de l’opposition malienne, Soumaïla Cissé, enlevé le 25 mars 2020 alors qu’il se rendait dans son fief électoral de Niafounké, dans la région de Tombouctou, au Nord du Mali. Ou d’obtenir celle de l’humanitaire française, Sophie Pétrona, dont le rapt remonte en décembre 2016. 

Si jusqu’à hier en début de soirée, l’information n’était pas encore confirmée, tout semble indiquer que les affreux devraient servir de monnaie d’échange pour la libération de Sophie Pétronin, Française enlevée en décembre 2016 dans le septentrion malien, et du ci-devant chef de file de l’opposition malienne, Soumaïla  Cissé, disparu des radars en mars 2020 alors qu’il battait campagne pour les législatives. Est-ce lui qui va profiter de la libération de Pétronin ou plutôt le contraire ? Est-ce peut-être le prochain président du Mali qui est ainsi tiré des griffes de la multinationale du terrorisme ? Attendons de voir. Quoi qu’il en soit, on peut imaginer aisément la joie qui peut être celle de leurs proches  et de tous leurs compatriotes, maliens comme français. Dame Pétronin était la « dernière des Mohicans » puisqu’elle est la seule Française toujours entre les mains des djihadistes dans le monde. Autant dire un trophée de choix pour les militaires maliens qui ont renversé Ibrahim Boubacar Kéita  le 18 août 2020 et qui tentent tant bien que mal de mettre en route une transition devant mener au retour à une vie constitutionnelle normale et dont le gouvernement très attendu est d’ailleurs tombé ce lundi en fin d’après-midi.

Soumi et « maman Sophie » valent 100 djihadistes !

Les enfants de Gao vont-ils retrouver celle qu’ils appellent affectueusement « maman Sophie » ? Il faut l’espérer. En tout cas, ce serait un ouf de soulagement pour les habitants de Gao qui ont beaucoup d’estime pour cette humanitaire, grâce à ses œuvres sociales, de la voir recouvrer la liberté après près de quatre ans de dures épreuves. Ce serait également un motif de consolation pour de nombreux Maliens, notamment les militants de l’Union pour la république et la démocratie (URD), de voir leur président libéré des griffes de ses ravisseurs. On est d’autant plus fondé à le penser que la libération du principal opposant au régime d’alors d’IBK, figurait parmi les nombreuses revendications du mouvement du 5 Juin. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’une éventuelle libération de l’un ou de l’autre ou des deux otages dans un contexte où le Mali est en train d’écrire une nouvelle page de son histoire,  serait et c’est peu de le dire, un grand coup pour les autorités de la Transition. Elles auraient alors réussi là où le président déchu, Ibrahim Boubacar Kéita, aura échoué. Il est vrai que deux otages contre une centaine de prisonniers et surtout pas n’importe lesquels, mais des hommes aux mains tachées de sang, peut s’apparenter à un mauvais deal. 

En réalité, on aurait tort de penser que les putschistes maliens, 45 jours seulement après leur arrivée au pouvoir, sont venus avec une baguette magique dans la mesure où sous IBK, des tractations étaient en cours pour obtenir notamment la libération du premier de ses opposants. Et c’est sans doute les résultats de ces délicates opérations qu’on ne chante pas sur tous les toits qui ont permis d’obtenir les résultats qu’on sait. Le colonel Assimi Goita et ses frères d’armes auraient d’ailleurs tort de trop pavoiser, car ils seraient sortis davantage auréolés si ces libérations  étaient intervenues après des opérations militaires, au lieu de simplement récolter les fruits des chassés-croisés qu’ils n’ont pas vraiment entrepris.

De nombreuses questions demeurent d’ailleurs sans réponse, notamment sur le rôle joué par la France dans cette affaire. Difficile en tout cas d’imaginer qu’un tel dénouement puisse se faire sans l’implication active de Paris qui est, avec la force Barkhane, en première ligne dans la lutte contre les djihadistes au Mali et dans toute la bande sahélo-saharienne.

L’on ne peut, du reste, s’empêcher de se demander si en libérant ces nombreux terroristes, l’on ne contribue pas, d’une manière ou d’une autre, à  renforcer les organisations terroristes et criminelles et à les encourager à opérer de nouveaux rapts.

Les échanges de prisonniers sont une pratique aussi vieille que le monde

Cela dit, même si les trocs de ce genre sont monnaie courante à travers le monde, on est toujours partagé dessus. Car pour un terroriste libéré, c’est toute la machine de guerre qu’on contribue à alimenter. Parmi les dizaines d’élargis, se trouvent d’ailleurs de vilains criminels en série responsables de nombreuses attaques dans la sous-région. Et ils ne vont pas devenir subitement des enfants de chœur. Bien au contraire, ils seraient célébrés comme des héros par leurs compères, et qui sait si, pendant leur détention, ils n’ont pas pu avoir certains renseignements susceptibles d’être utilisés dans certaines de leurs opérations. Il n’est donc pas sûr que ce soit une bonne affaire pour le Mali et l’ensemble du Sahélistan.

Mais que faire quand on n’a aucune possibilité de libérer des otages sans courir le risque de les faire trucider? Cela dit, si c’est le prix à payer pour obtenir la libération de ces otages, l’on ne  peut que souffrir qu’il en soit ainsi. Ce d’autant que d’autres, à l’image de nos confères Claude Verlon et Ghislaine Dupont, dont l’assassinat reste toujours enveloppé d’un voile opaque, n’ont pas eu cette chance. La vie est sacrée. C’est dire si l’on ne doit pas lésiner sur les moyens pour la préserver. Au delà de ces considérations, il  est bon de rappeler que les échanges de prisonniers sont une pratique aussi vieille que le monde. C’est pourquoi, il est difficile pour les États d’avoir une politique rigide et constante dans la gestion de libération d’otages. Même le pays de l’Oncle Sam qui avait une position tranchée, celle de ne jamais négocier avec des terroristes, a fini par changer son fusil d’épaule en échangeant des soldats contre des prisonniers terroristes.

Jean Pierre James 

Source: Nouveau Réveil

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