Il s’agit, certes, d’un fait divers, mais pas banal au regard de la qualité des protagonistes et de l’attitude des intervenants.

Après la sulfureuse affaire du député BOURAMA Traoré et du Juge de Ouélessebougou, M. Amadou Bocar Touré, voilà qu’un autre député vient de faire parler de lui. Il s’est   livré en spectacle en plein cœur de Bamako, au niveau du Grand Hôtel. Il s’agit de l’Honorable Ibrahim Ahmadou Dicko député élu à Gao. Il était  accompagné de deux loubards et de son chauffeur lesquels ont tenté de kidnapper deux jeunes dont l’un serait très proche de lui. Mais ceux-ci ont donné l’alerte en criant de toutes leurs forces. Les policiers de la CCR (Compagnie de la Circulation routière) sur place ont intervenu mais sans succès. Il a fallu la réaction des passants pour décourager les kidnappeurs. Et n’eut-été la promptitude et le savoir faire des éléments du Commissariat du 1er arrondissement venus  en renfort,  le député et ses complices allaient certainement laisser leurs  peaux  sur les lieux.

Que s’est-il passé ?

Vendredi 12 Juin 2015  aux environs de 17h, deux véhicules en course-poursuite se dirigent vers le Grand Hôtel. A bord du 4X4 en chasse, se trouve l’Honorable Ibrahim Ahmadou Dicko. Il poursuivait  son cousin S.D. Tous venaient de quitter le Camp I de la Gendarmerie où le Député avait  porté plainte contre S.D au regard de ses indiscrétions tendancieuses et de nature à faire voler son foyer en éclat. En clair, aux dires de l’Honorable, le cousin a dénoncé à Madame, un de ses péchés mignons et l’a incitée à divorcer.

Interrogé par la gendarmerie, SD  nia  les faits qui lui sont reprochés et l’enquêteur demanda la présence de l’épouse laquelle refusa de se présenter. C’est ainsi que la gendarmerie demanda à l’Honorable Dicko  et son cousin d’aller  laver  le linge sale en famille. Les enquêteurs autorisèrent donc l’accusé à partir.

Fou de rage, l’Honorable Dicko menaça de l’abattre s’il mettait pied dans son véhicule. Le jeune homme appela donc un autre cousin pour venir le chercher avec son véhicule. Mais l’Honorable n’avait dit son dernier mot.

Après être sorti du camp de Gendarmerie, il fit appel à deux loubards et prit soin de  garer son véhicule au coin de la rue et attendit. Quand sortit cet autre cousin en compagnie de S.D, commença la chasse à l’homme.

C’est au niveau  du Rond-Point du Grand hôtel qu’ils rattrapèrent les fuyards. Les deux loubards, à l’aide de coups poings dissuasifs, les obligèrent à descendre du véhicule et à embarquer dans celui du Député. Ce sont leurs cris qui alertèrent les policiers de la CCR postés non loin de là. Mais ceux-ci ne purent rien.

Et les passants qui s’étaient agglutinés là commencèrent à s’agiter. Ils décidèrent ainsi de venir au secours des deux malheureux en s’en prenant tout d’abord au commanditaire de l’opération, à savoir, l’Honorable Dicko.

Le lynchage en règle aurait certainement été consommé n’eut été l’intervention énergique des éléments du Commissaire Principal Abdoulaye Coulibaly en charge du 1er Arrondissement. Ceux-ci parvinrent à extirper le député des mains de  la foule en colère avant de s’occuper des deux loubards également en mauvaise posture. La foule était vraiment décidée à en découdre avec l’Honorable et ses deux loubards. Certains avaient d’ores et déjà récupéré la clef du véhicule afin d’éviter qu’ils ne s’échappent éventuellement. Il vaut mieux, dit-on à Bamako, être renversé par un camion sans frein que par un «Jaama frein tan» (une foule sans frein). Frustrée de n’avoir pu en finir avec notre bon Honorable, la foule scanda ceci : « Député malfrat, vulgaire ! Laissez-nous le brûler vif».

Le parlementaire et ses complices furent conduits au commissariat du 1er Arrondissement avant d’être placés en garde-à-vue.  Et c’est la même foule qui poussa le véhicule 4X4 jusque dans la cour du commissariat du 1er arrondissement où un  dispositif était sur place  pour éviter un autre dérapage. Les victimes, elles, ont porté plainte pour tentative d’enlèvement  et  violences. à cela, il faudra ajouter  le trouble à l’ordre publique.

L’Assemblée Nationale à la rescousse

Quelques heures plus tard et suite à des tractations de part et d’autres et grâce à l’implication des autres camarades députés de l’Hémicycle, l’Honorable Dicko aurait été libéré à charge de se présenter en cas de besoin. Mais si lui a bénéficié d’un traitement préférentiel, les trois autres (les 2 loubards et le chauffeur) eux, broient toujours le noir. Ils seront présentés au juge dans les tous prochains jours.

A suivre ….

Toumani Coulibaly

Les leçons du jour

Cet incident survenait seulement quelques heures après la Déclaration de Politique Générale (DPG) du premier Ministre à l’Assemblée Nationale ; DPG au cours de laquelle, les parlementaires n’ont pas manqué de s’en prendre aux éléments des forces de l’ordre, ceux de la police en l’occurrence.  Mais voilà qu’aujourd’hui, un des leurs vient d’être sauvé par ces mêmes éléments décriés. Moralité : toute chose à son revers. Si, d’une manière des policiers se comportent mal, tous ne sont pas pareils. Ceux-là qui ont sorti le député des griffes de ses bourreaux méritent un encouragement. Les médiocres doivent être sanctionnés. Mais l’on constate, très généralement, le contraire au sein de cette police.

S’agissant des Gendarmes qui, certainement par mégarde et négligence, ont minimisé l’affaire et laissé partir les deux protagonistes (l’Honorable Dicko et son cousin S.D), ils se devaient de calmer les esprits des deux personnes en conflit, ce, d’autant que l’une d’entre elles, fusse-t-elle député, à professé des menaces de morts.

Quant aux députés indélicats en général, ils ne doivent et ne peuvent d’ailleurs, se prévaloir de leur immunité parlementaire pour faire la loi. Qu’ils se contentent de la voter.

Source: La Sentinelle