La démission du Général Moussa Sinko Coulibaly des forces armées maliennes a produit une surprise quasi générale. Avant ses sorties dans les medias pour justifier son acte, les commentaires couraient dans tous les sens.
L’intéressé (Moussa Sinko Coulibaly) a décidé d’y couper court en expliquant qu’il comptait participer sous une autre forme à la construction de l’édifice national. Cette participation se fera désormais sur le terrain politique. Selon le Général Moussa Sinko Coulibaly, le Mali s’est retrouvé dans une situation préoccupante avec le Président Ibrahim Boubacar KEITA qu’il voue aux démons à chaque fois qu’il en a l’occasion.
Pour certains observateurs de la scène politique nationale, les raisons avancées par Moussa Sinko Coulibaly pour justifier son départ des forces de défense et son entrée dans la vie politique, peuvent difficilement convaincre pour quelques considérations ci-après.
Pour certains Moussa Sinko Coulibaly a tort de démissionner dans un contexte où son rôle dans la reconstruction du secteur de la défense et de la sécurité est plus que précieux. Ils vont plus loin en disant qu’un Général n’abandonne pas ses frères d’armes dans une situation comme celle qui caractérise le Mali actuel.
D’autres estiment que les arguments avancés par Moussa Sinko Coulibaly ne tiennent pas la route lorsqu’il affirme de tout mettre en œuvre pour faire partir le Président Ibrahim Boubacar KEITA et son équipe dont il juge le bilan catastrophique.
Ils ne comprennent pas la démarche politique de Moussa Sinko Coulibaly qui semble se raccourcir à la personne du Président IBK. A l’avis de ces observateurs, un engagement politique digne de ce nom, ne saurait se fonder de la sorte. Ils regrettent que Moussa Sinko n’aborde pas en profondeur les vrais maux du Mali à plus forte raison de proposer des alternatives. Il a jusqu’ici repris la même chanson : IBK n’est pas bon et il faut le remplacer.
C’est pourquoi, ils pensent que l’irruption de Moussa Sinko Coulibaly sur la scène politique nationale ne repose sur aucune vision de construction nationale si ce n’est simplement de faire partir IBK.
Au-delà de ces opinions, il y a lieu de reconnaître que le dossier du Général Amadou Aya Sanogo et compagnons n’est pas étranger dans l’engagement soudain en politique de Moussa Sinko Coulibaly. Il est connu de tous, les liens très proches entre les deux Généraux.
Après le coup d’Etat du 22 mars 2012, Moussa Sinko Coulibaly fut le chef de cabinet d’Amadou Aya Sanogo au nom duquel d’ailleurs, il a pris part à plusieurs pourparlers à l’époque en faveur d’une sortie de crise politique.
Au lendemain de l’arrivée du Président IBK au pouvoir, l’affaire dite des bérets rouges a fini par l’arrestation du Général Amadou Aya Sanogo et certains de ses proches collaborateurs présumés coupables ou complices dans l’assassinat d’un certain nombre de porteurs d’uniforme qui seraient parties prenantes dans le contrecoup d’Etat en 2012.
Depuis cette date, Amadou Aya Sanogo et d’autres personnages clés du putsch du 22 mars 2012 sont privés de libertés. Après une tentative de procès à Sikasso, certains détails techniques sont venus à le repousser. Encore aujourd’hui, ce ne fut pas fait. Malgré les efforts des avocats de la défense pour une libération provisoire de leurs clients, Sanogo et certains de ses compagnons continuent à croupir en prison.
Finalement, d’aucuns ont pensé que le dossier Sanogo et compagnons n’est plus effectivement contrôlé par la justice. « Le politique » se serait mêlé profondément. Ce qui justifierait toute la lenteur ou la lourdeur qui se constate dans le traitement de ce dossier, pensent plusieurs personnes acquises à la cause du Général Amadou Aya Sanogo.
Moussa Sinko Coulibaly qui fut l’un des rares proches de Sanogo à ne pas avoir d’implication établie jusqu’à preuve de contraire dans cette affaire dite des bérets rouges, se sentirait moins utile en étant dans les forces armées sur le dossier de ses « amis » qui serait entrain de prendre des allures désormais politiques.
Aussi, il y a lieu de rappeler que Sanogo et compagnons se sont régulièrement appropriés la victoire du Président Ibrahim Boubacar KEITA à l’issue de l’élection présidentielle de 2013 pour lui avoir apporté, selon eux, un soutien déterminant à cet effet. Plusieurs de leurs déclarations l’attestent.
L’on se rappelle en ce temps, Moussa Sinko Coulibaly qui était ministre en charge des élections avait même commenté les résultats en faveur du candidat Ibrahim Boubacar KEITA avant que la cour constitutionnelle ne se prononce sur les éventuels recours introduits auprès d’elle pour des cas d’irrégularités relevées lors des opérations électorales.
Ce commentaire du ministre Moussa Sinko Coulibaly est venu convaincre les plus sceptiques que la junte serait en faveur du candidat IBK.
La reconnaissance qui devait découler de ces actes de soutien posés par la junte n’aurait pas été exprimée à hauteur de souhait par le Président IBK. Au contraire, tout semble avoir été entrepris par le régime pour enfoncer Amadou Aya Sanogo et compagnons.
Donc, IBK mérite de devenir l’ennemi numéro 1 de la junte. Le terrain politique selon la démarche de Moussa Sinko Coulibaly serait très approprié pour régler les comptes. C’est pourquoi, point de surprise à voir Moussa Sinko Coulibaly exploiter tous les tendons d’Achille d’IBK et de son équipe pour tenter de faire comprendre au Peuple qu’il ne doit plus se tromper en choisissant de nouveau Ibrahim Boubacar KEITA au cas où il serait prétendant à un second mandat.
Nous comprenons ensemble que l’engagement politique de Moussa Sinko Coulibaly n’est pas assorti d’une véritable conviction prenant en compte les préoccupations collectives. Mais, il est fortement inspiré du dossier de ses « amis ». La libération de deux (Yamoussa Camara, Ibrahima Dahirou Dembélé) d’entre eux aura été perçue comme une stratégie du pouvoir pour casser l’élan politique de Moussa Sinko Coulibaly.
En tous les cas, le Mali se trouve aujourd’hui dans une situation qui nécessite d’aller au-delà des individualités pour rassembler et mobiliser tous les maliens autour des préoccupations qui leur sont communes.
Sibiry KONATE
Par Midi-Info