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Préalables au dialogue de Iyad et Kouffa: il y a-t-il une alternative au départ de Barkhane ?

Dimanche, le groupe djihadiste auquel appartiennent nos deux compatriotes, appelé « Jama’a Nusrat ul-Islam wa al-Muslimin » (JNIM) ou  Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GISM), à savoir  le leader historique de Ansar Eddine, Iyad Ag Ghaly, et celui de la Katiba Macina, Amadou Diallo alias Amadou Kouffa, a donné sa réponse à l’offre de dialogue annoncée par le Président IBK, le 10 février dernier. Si le groupe black-listé terroriste par les Etats-Unis et les Nations-unies, se dit disposé au dialogue, il y met une condition explicite : le départ des forces internationales, précisément la Force française Barkhane. Si le groupe djihadiste, rompu à la communication de charme, n’exprime pas clairement son exigence fondamentale d’application de la Charia, celle-ci devrait suivre en toute logique le départ de Barkhane demeurant le seul obstacle devant les djihadistes.

 

Le Mali du Président IBK peut-il accéder à la requête de Iyad Ag Ghaly et de Amadou Kouffa ? L’offre initiale de négociation inclut-elle l’application de la Charia comme le suggère le Pr Ali Nouhoun DIALLO dans une récente tribune ? Serions-nous les seuls au Sahel à demander le départ de la France, parce que Iyad et Kouffa l’ont demandé ?

Si la Conférence d’entente nationale tenue du 27 mars au 2 avril 2017 et le Dialogue national inclusif tenu du 14 au 22 décembre 2019 ont recommandé fortement l’ouverture du dialogue (négociation) avec notamment les chefs djihadistes maliens, Iyad Ag Ghaly et Amadou Kouffa, en aucun moment le peuple du Mali réuni dans ces fora n’a donné son accord pour l’application de la Charia ni suggéré le départ des forces internationales engagées aux côtés des FAMa dans leur lutte contre le terrorisme. « Rien à n’exclure » lâché par le Président était relative à inclure Abou Walid El SARAOUI dans ces négociations, mais nullement pour mettre la Charia et le départ des forces internationales à l’ordre du jour du dialogue recommandé par le DNI.

En dépit de l’incompréhension des partenaires et de leurs opinions suite à l’annonce de voie exploratoire dans laquelle le Mali s’est engagé souverainement pour parvenir à l’apaisement, le Président IBK et la République du Mali n’ont pas bougé quant aux lignes rouges : l’unité nationale, l’intégrité du territoire et la forme laïque et républicaine de l’État. Il est donc raisonnable de penser que, dans le contexte de dégradation de la situation sécuritaire où le Mali a plus que jamais besoin de ses alliés Barkhane, Minusma, G5 et Alliance Sahel, que le gouvernement ne puisse donner suite à cette exigence constante des djihadistes : le départ des forces internationales.

En position extrêmement difficile au plan sécuritaire certes, mais le Mali a été, est et veut rester une Nation d’honneur et de dignité qui respecte ses engagements. Venant de donner sa parole à Pau voilà deux mois au maintien de Barkhane, on voit bien mal la République souveraine du Mali, sur insistance de Iyad et de Kouffa, revenir sur celle-ci et demander le départ des troupes françaises. Ce serait un impair diplomatique qui pourrait isoler et encercler notre pays dans le cadre sahélien où le combat contre le terrorisme se mène à travers le G5 Sahel appuyé par Barkhane.

L’INTERVENTION FRANÇAISE

A l’appel de plusieurs partis d’opposition, des manifestants sont sortis, le vendredi 15 novembre 2019, avant eux d’autres Maliens, pour exprimer leur ras-le-bol, leur inquiétude face à l’insécurité grandissante et pour réaffirmer leurs positions. Ils demandent le départ des forces françaises et des forces internationales. Raisons ?

La France doit partir parce qu’elle est intervenue pour ses propres intérêts.  En voilà une lapalissade qui rattrape aujourd’hui ceux qui l’ont prôné ! Beaucoup.

Mais quand est-ce que nous, Maliens, allons formater notre logiciel et y intégrer que les nations n’ont pas d’amis, mais seulement des intérêts ? Aussi, il nous faudra bien convenir que l’intervention française de 2013, à travers Serval puis Barkhane, n’était pas qu’une opération purement humanitaire !

L’image des Mirages français qui fendent le ciel pour venir arracher et sauver le peuple charmant du joug obscurantiste de méchants djihadistes, comme sait bien le décrire le Président IBK, procède beaucoup du conte de fées !

Oui, la France est intervenue à la demande des autorités maliennes pour stopper la progression des djihadistes, mais elle est aussi intervenue dans le cadre de ses intérêts bien compris.

L’intervention dans un pays qui n’a jamais accepté depuis le 20 janvier 1960 de présence militaire française sur son sol était pour Paris une aubaine. Seule puissance libératrice, adulée par à travers Serval, la France s’assurait à travers les accords du 7 et 8 mars et le Traité du 16 juillet, le monopole de l’infinie gratitude du peuple malien. Toutes choses qui assuraient, dans la durée, des débouchés aux entreprises françaises dans les domaines de l’armement et de l’équipement des forces de sécurité, première industrie de France.   

Si le Traité est une opportunité pour les forces armées maliennes d’acquérir des méthodes de travail et d’équipement favorables, il inscrit dans la durée l’influence militaire française dans notre pays.

Toutefois, sans aucune concession à l’hystérie anti-française, notons aussi que les effets du Traité auraient pu être également positifs sur l’économie malienne : si… nous, nous n’avions pas été naïfs et nuls. En effet, des forces mieux formées auraient pu contribuer à une meilleure sécurisation des échanges économiques et donc à une croissance économique durable dans le pays. Sauf que les obligations du Traité ne pèsent pas que sur la France en matière de formation. La France fournit des formateurs, à nous de lui proposer des candidats capables d’être formés… Interrogeons à cet égard les conditions de recrutement au sein de notre armée… Mais aussi notre attentisme servile !

Pour le Malien lambda, dès que la France est venue, ‘’game is over’’ : Anw ka bara bana ! Puisqu’elle est là, c’est désormais à elle de faire tout le travail, de faire notre guerre à notre place, de mourir pour nous en combattant les djihadistes… Nous, nous n’avons qu’à dormir !

Tous ceux qui ne prêchent pas dans cette chapelle de fainéantise grotesque, en chantant le refrain actuellement à mode (la France dégage) sont-ils des hypocrites et des traîtres, comme le laissent entendre les présidents IBK et Issouffi ?

Non, la fierté et la dignité de la grande nation malienne n’est ni dans l’exclusive ni dans le déni. Nous avons été meurtris quand notre pays a failli tomber sans l’intervention de la France, nous nous sommes sentis humiliés lorsque ce confrère un peu satirique sur les bords avait laissé entendre que nous n’avions pas les moyens de notre orgueil et de notre fierté. Les avons-nous toujours ?

AUCUN PLAN B : LA FIN DES CHIMÈRES

A défaut, avons-nous un plan B ?

Que ferons-nous demain si la France et la MINUSMA pliaient bagage ? Notre armée, en reconstruction est-elle à mesure de faire face aux légions djihadistes ?

C’est pourquoi, nous pensons que défendre le maintien de la France et de la MINUSMA, dans le contexte du Mali de novembre 2019, c’est soutenir les FAMa, c’est défendre la Patrie.

Ceux qui prônent le contraire soit se trompent de bonne foi ou soit ont été sciemment induit en erreur soit ont d’autres agendas. Et le plus clair : faire partir le Président IBK, même au prix de la dislocation du pays. Commettrons-nous deux fois la même erreur ? Prendrons-nous deux fois le même risque ?

Depuis 2010, le Président ATT n’avait de cesse de crier sur tous les toits : il faut mutualiser les forces, le Mali seul ne peut pas. Comme toute réponse, on l’a traité de tous les noms et raillé partout que son pays est le ventre mou de la lutte contre le terrorisme et que c’est lui-même le problème…

Pour le renverser, on a laissé pourrir la situation, les mêmes conspirèrent à travers soutiens de façade à l’armée, marches contre la révision constitutionnelle, contre l’occupation des villes qui tombaient les unes après les autres… Où en sommes-nous dix ans après ? A regretter le général ATT que Info-Matin lui-même avait maladroitement traité de « général fuyard » !

Que partent les Français et la MINUSMA, basta ! Mais après…

La nature a horreur du vide ! Tant que notre armée nationale ne sera pas en capacité de sécuriser et de garantir l’ensemble du territoire national, c’est le boulevard pour les hordes terroristes, les moudjahidines de JNIM et EIGS de l’État islamique.

Tant que nous serons incapables de nous défendre par nous-mêmes, sans l’aide et le soutien d’autres nations, c’est comme si on envoyait à JNIM et l’EIGS par FeeEx (Courrier rapide) notre reddition, notre soumission et notre accord à être désormais régis par leur Charia, non celle d’Allah. Conséquence : ils auront la permission légitime de parachever l’occupation de notre territoire, pour y ériger des Katibas, y proclamer partout la Charia et peut-être établir sa capitale à Tombouctou ou à Nioro du sahel.

LE PIÈGE DES DJIHADISTES

La propagande djihadiste est rodée. Celle de dimanche qui encense les « anti-français » et les élève au rang de héros au même titre que les moudjahidines donne cependant raison aux présidents IBK et Mahamadou Issouffi, qui ont condamné leurs manifestants et essayé de leur expliquer qu’ils jouent le jeu des djihadistes. Maladroitement, peut-être sans le savoir, ils ont en effet donné un argument, faute de légitimer leur revendication, aux jihadistes. En tout cas, c’est sur leurs agitations (marches et débordements) que le groupe djihadiste se cabre désormais pour demander le départ des forces françaises et internationales.

Beaucoup, à l’époque, sont peut-être tombés dans le piège de la manipulation en cédant aux sons de sirène des cellules dormantes des jihadistes. Aujourd’hui, ils ne doivent pas en être très fiers.

En effet, demander le départ des forces étrangères sans être sûr d’avoir une armée prête à prendre le relais, ce n’était pas défendre le Mali et son unité, mais contribuer au plan de sa dislocation, son éclatement en plusieurs petites Katibas. Et c’était en réalité cela, comme nous l’avions écrit dans ces mêmes colonnes, en novembre et décembre dernier, le complot contre le Mali et sa souveraineté, le complot djihadiste qui éclate au grand jour avec ce communiqué.

QUE FAIRE ?

Notre pays, comme ceux du Sahel, est à la croisée des chemins.

Nous sommes d’égal amour et d’égale passion patriotique pour ce pays. Divisés sur nos choix, nos ambitions (avouables ou inavouables), et nos priorités, nous nous retrouvons aujourd’hui dans l’impasse quant à ces négociations qu’il faut désormais conjuguer au passé.

A Info-Matin, comme l’avait plaidé en décembre dernier son fondateur sur sa page Facebook, nous restons convaincus avec tous les Maliens que ce n’est pas dans nos divergences puériles et dans nos accusations mutuelles surtout pas notre fuite en avant à travers la recherche effrénée et constante de bouc émissaire que nous trouverons la solution à notre problème.

Il faut l’acter, sans aucune désobligeance, mais au contraire avec beaucoup d’égard et de reconnaissance : pour notre situation actuelle, « la France, c’est le mal nécessaire ». En effet, nous avons encore besoin de Barkhane, de la France. Parce que comme l’a posté El Hadj Sambi TOURE sur son Mur le 15 novembre 2019 « si la France se retire tout s’écroulera … Sans la présence des forces internationales, notamment françaises, le Mali ne tiendra pas, le Sahel s’effondrera définitivement ».

Hier comme aujourd’hui, nous pensons que ceux qui espèrent tirer les marrons du feu suite à l’effondrement consécutif au retrait des forces internationales notamment de Barkhane (« si la France s’en va, IBK va tomber nous prendrons sa place ») se gourent et se mettent le doigt dans l’œil.

Parce que dans leur aveuglement, beaucoup de nos compatriotes « anti-français », peuvent n’être, sans le savoir, que les pions qui jouentle jeu des djihadistes. Ils ont privilégié et défendu, peut-être sans le savoir, les postions de Amadou Kouffa et Iyad Ag Ghaly. Positions clairement rendues publiques par leur avocat attitré (Me BARRY) qui a dit suite à son interpellation que les djihadistes ne demandent que deux choses : départ des forces internationales et l’application de la charia.

Si dans la pire des hypothèses, le Mali acceptait l’application de la Charia, croient-ils que ce sont eux qui seront aux commandes à la place des Mollahs, des Cheickhs, des Émirs et des moudjahidines ?

Il est temps d’ouvrir les yeux !

C’est pour toutes ces raisons que nous pensons qu’il n’y pas d’alternative au maintien de Barkhane. Elle doit rester. Parce que nous ne sommes pas prêts en termes de moyens humains et opérationnels. Notre armée est toujours en phase de montée en puissance. Depuis 2012.. ; et d’avis d’experts, il lui faut 5 à 10 ans, d’autres même fixent l’échéance à 20 ans, pour disposer d’une réelle capacité opérationnelle.

Tenir compte de ses limites n’est pas une faiblesse, mais une force. Comme l’a rappelé IBK, il y a aucune honte de recevoir quand on a déjà suffisamment donné.

Qu’on n’arrête de se berner !

On ne peut et ne doit pas penser que l’engagement de la France à nos côtés signifie : nous on palabre à Bamako, on blablate sur les réseaux sociaux, les soldats français combattent pour nous les djihadistes ! Non, n’deme n’Ka wara faga, a Koun bi i bolo de !

Ils sont là et seront là pour nous aider. Mais notre honneur sera de nous préparer et de gagner la guerre par nous-mêmes, avec ou sans leur aide. Aujourd’hui leur aide nous est indispensable pour gagner.

Quid des négociations avec Iyad et Kouffa sur la base de leurs préalables ? Au peuple souverain de donner mandat à la République d’appliquer la Charia. Sinon, à la phase actuelle des choses, ni le Président IBK ni son gouvernement n’ont mandat à engager des négociations sur les bases avancées par Iyad Ag Ghaly et Amadou Kouffa pour transformer la République en Katiba, la démocratie en Charia.

PAR BERTIN DAKOUO

INFO-MATIN

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