Tout sur cette histoire qui étonne plus d’uns.
C’est ce 27 juin en principe que l’épouse du chef de l’Etat devait répondre à la convocation qui lui avait été notifiée. La femme du chef de l’Etat congolais, Antoinette Sassou-Nguesso, a été convoquée, par le cabinet d’avocats White and Case, agissant suite à une décision de justice américaine.Présente aux Etats-Unis au mois de mai dernier où elle prenait part à une session d’ONU Sida, l’épouse du président Sassou s’était vu notifier une convocation par un collège d’avocats agissant pour le compte de l’homme d’affaires anglo-libanais Mohsen Hojeij. L’épouse du président congolais a finalement préféré ignorer la convocation des avocats américains, dans cette affaire qui dure depuis près de 30 ans. C’est la première fois que l’épouse du président congolais est citée directement dans ce dossier. Antoinette Sassou-Nguesso n’est pas mise en cause par la justice américaine, mais convoquée par les avocats de l’entreprise Commisimpex. Cette société, appartenant à un homme d’affaires anglo-libanais, s’est installée au Congo en 1980. Elle a rapidement obtenu plusieurs chantiers publics, mais assure que l’Etat congolais n’a réglé quasiment aucune facture.
Des tribunaux en France et aux Etats-Unis ont depuis exigé le remboursement de cette dette, mais il n’y a pas eu de suite. Les avocats américains de l’entreprise Commisimpex essaient alors de retrouver eux-mêmes des avoirs ou des biens appartenant au Congo pour les faire saisir par la justice. Informations bancaires
La réponse à cette absence a été signifiée aux médias par le conseil de l’Etat congolais, qui fait prévaloir l’immunité diplomatique de madame Sassou. Voici l’origine de cette affaire qui remonte aux années 1980. Mohsen Hojeij était propriétaire d’une importante société privée dénommée Commisimpex, qui fut à l’époque parmi les grosses boîtes de BTP au Congo. Hojeij, président de la communauté libanaise au Congo, connaît bien le chef de l’Etat congolais Sassou Nguesso. Cette proximité lui fait remporter d’importants marchés publics. Problème : à la fin des travaux, Brazzaville ne lui verse qu’une petite partie de l’argent sur les travaux exécutés selon ses arguments.
Une bataille judiciaire commence dès lors pour récupérer la créance, menée sur plusieurs fronts : Royaume-Uni, Belgique, Suède, Etats-Unis et France. A deux reprises (en 2000 et 2003), la justice donne raison à l’homme d’affaires anglo-libanais. Mais Brazzaville refuse toujours de payer la dette et tente, en 2012, de la faire annuler en déclarant la société Commisimpex en faillite.
Une dette d’un milliard d’euros
Les tribunaux américains et français rejettent cette liquidation, mais sachant qu’il a peu de chances de récupérer son argent au Congo, le patron de Commisimpex tente par tous les moyens de faire saisir les biens de l’Etat congolais à l’étranger. En 2015, l’équivalent de six millions d’euros ont pu être glanés à Paris sur des comptes bancaires appartenant aux autorités congolaises.
Mais aux yeux de l’équipe d’avocats de l’homme d’affaires, ce n’est pas assez. Ils promettent de poursuivre leur traque jusqu’au bout. D’autant qu’au fil des ans, la créance n’a cessé d’augmenter : passant de 100 millions d’euros en 1990 à un milliard aujourd’hui, soit près de 20 % du budget de l’Etat congolais l’an passé.
Convocation de Madame Sassou
Lundi 27 juin, la femme du chef de l’Etat est convoquée par le cabinet d’avocats White and Case. Objectif de cette assignation : pousser Antoinette Sassou-Nguesso à coopérer en fournissant au cabinet d’avocats américain toute information en sa possession sur les sources de revenus de sa famille, l’emplacement de ses biens, ainsi que ceux de l’Etat congolais. Des biens qui, selon les avocats de l’homme d’affaires, sont « connus pour faire l’objet de pratiques et de transferts frauduleux ».
Le document d’assignation révèle la liste des personnes auxquelles l’entourage de l’homme d’affaires s’intéresse pour récupérer ses créances. Au total, ce sont 63 personnes parmi lesquelles des enfants de la famille présidentielle, le chef des services de renseignement congolais, Jean Dominique Okemba, neveux du président Sassou Edgard Nguésso, le directeur du Domaine présidentiel, ou encore le trader pétrolier de Sassou, Lucien Ebata. « Des personnalités, explique-t-on dans l’entourage de Mohsen Hojeij, susceptibles de détenir des informations importantes ou d’avoir servi de possible prête-nom », dont certaines ont été citées par le passé dans des affaires de détournement de fonds.
Du côté de Brazzaville, c’est l’indignation totale pour les proches du président Sassou : « Cette assignation est contraire aux règles de la diplomatie et de la courtoisie internationale. On n’assigne pas une première Dame ». L’avocate du Congo Simone Bernard Dupré se dit choquée. Pour cette dernière qui s’est exprimée dans plusieurs médias, Madame Sassou n’a rien à voir avec ce problème étatique, les personnes physiques elles-mêmes ne sont pas concernées ».