Moins de quatre mois après l’annonce, par le Président français, de la fin de l’opération « Barkhane », assortie d’une diminution de moitié du nombre de soldats déployés dans le Sahel d’ici à 2023, les autorités maliennes ont trouvé une alternative. C’est du moins ce qu’a tenté d’expliquer le Premier ministre, lors d’une rencontre avec des associations de la société civile malienne. Mais Choguel Maïga n’a que partiellement levé les équivoques pour n’avoir pas confirmé l’information de l’agence Reuters selon laquelle «un contrat serait sur le point d’être signé entre la milice proche de Vladimir Poutine et la junte malienne pour le déploiement de plusieurs centaines de personnels russes (…) et dont le coût financier devrait coûter « 6 milliards de francs CFA par mois et un possible accès à trois gisements miniers. »
Devant ses hôtes, le PM s’est juste contenté de répondre aux interrogations de l’opinion par la question suivante : «si, de la même façon que certains partenaires ont décidé de quitter certaines localités, ils décident de partir demain, qu’est-ce qu’on fait ?». Le lien est apparemment ainsi fait entre le cas Afghan et la décision de l’hexagone au Mali. Et selon lui, le Mali doit préparer un plan pour échapper au pire. Et le chef du gouvernement, sans se prononcer sur la société militaire privée russe Wagner, d’ajouter : «Il y a des zones abandonnées qu’il faut occuper aujourd’hui. On ne peut pas les laisser vides. (…) On ne peut pas nous interdire d’acheter du matériel à un pays avec lequel on a un accord parce qu’un autre ne veut pas. On ne peut pas nous empêcher d’envoyer des gens être formés dans un pays donné parce qu’un autre pays ne veut pas. On est obligé de nous interroger : ne faut-il pas avoir de plan B ?». Et comme pour motiver le bien-fondé de cette décision, le PM a ainsi résumé le bilan négatif de l’action des forces internationales au Mali, avec la France à leur tête : « Le terrorisme s’est étendu, l’autorité et la souveraineté de l’État ne sont pas restaurées partout».
Néanmoins, la France durcit le ton par des menaces et intimidations, en dépit des clarifications du porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, qui a rassuré de l’absence de forces armées russes au Mali et de toute négociation officielle entre les deux pays. Pas suffisant, aux yeux de Paris qui, pour manifester son refus de cohabiter avec des mercenaires, a menacé de se retirer du Mali. C’est ce que le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, a expliqué devant la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale de France, le 14 septembre, en mentionnant que la société Wagner s’était illustrée en Syrie et en Centrafrique par des exactions, des prédations, des violations incompatibles avec une présence française. «Je le dis pour qu’on m’entende. (…) : une intervention d’un groupe de ce type serait incompatible avec l’action des partenaires sahéliens et internationaux du Mali », a-t-il prévenu.
Et comme la France, l’Union européenne, qui dispose de plus de 1 200 soldats et policiers au Mali, menace également d’apporter à la décision malienne la riposte proportionnée : un retrait pur et simple de ses troupes.
Les mises en garde de la CMA et la CEDEAO…
Juste après la réaction française sur la question, la CEDEAO et la CMA ont à leur tour successivement mis en garde les autorités maliennes contre toute démarche dans ce sens.
Réunie en session extraordinaire, le 16 septembre 2021 à Accra, la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a fermement dénoncé la volonté des autorités de la transition d’engager des compagnies de sécurité privées au Mali. En cause, elle s’est dit très préoccupée par les conséquences certaines sur la détérioration de la situation sécuritaire au Mali et dans l’ensemble de la région.
Quant à la Coordination des Mouvements de l’Azawad, dans une déclaration signée par son porte-parole Mohamed Elmaouloud Ramdane, en date du 16 septembre 2021, elle s’est opposée à tout usage des milices, quels que soient la nature et le motif qui les sous-tendent et tient l’Etat malien pour responsable des éventuelles conséquences.
Amidou Keita
Source : Le Témoin