Le prix du sucre connaît une flambée spectaculaire dans les villes et villages du pays ces derniers temps. On ne sait pas encore jusqu’où cette nouvelle cherté ira, puisque le problème ne fait que commencer. Il s’agit d’une énorme surprise pour les consommateurs, mais surtout un désaveu pour le ministre du Commerce Moussa Alassane Diallo.
Ce dernier a commencé sa mission avec un discours patriotique aux opérateurs économiques auxquels il avait accordé des avantages pour ravitailler le marché en grande quantité. Pour ce faire, il avait tablé sur 100 000 tonnes de sucre.Connaissant le monde des affaires, malgré l’engagement affiché du ministre de commerce, les observateurs avertis n’ont pas caché leur pessimisme pour la réussite de cette opération. Aujourd’hui, la réalité crève les yeux. Sans surprise, le ministre qui tente de dénoncer des commerçants qui n’arrivent pas à mettre l’intérêt collectif au-dessus de l’intérêt personnel a lamentablement échoué. Tout le monde savait que le ministre du Commerce allait échouer dans sa tentative de résoudre la pénurie de sucre
en faisant recours aux opérateurs économiques. Cet échec vient d’être confirmé par Moussa Alassane Diallo lui-même, qui était face aux opérateurs économiques et importateurs du sucre la semaine dernière.
En effet, le ministre de l’Industrie et du Commerce, Moussa Alassane Diallo a exprimé lors de sa rencontre avec les opérateurs économiques, le mercredi 8 novembre, le mécontentement du gouvernement suite à l’incapacité des importateurs à approvisionner le marché en sucre.car, on se trouve aujourd’hui dans une situation déplorable comme si les efforts fournis n’avaient servi à rien.
Certains observateurs estiment que ce réveil brutal du ministre était bien prévisible. Nulle part au monde,
l’Etat ne laisse l’approvisionnement du pays aux mains des privés lorsque les intérêts nationaux sont menacés. On a vu les USA prendre en main l’approvisionnement des pharmacies américaines en lait pour bébé en 2022, pour éviter une situation de crise. Ce qui est demandé au ministre est de prendre des mesures urgentes pour commander au nom de l’Etat des millions de tonnes de sucre, en attendant que la production locale réponde à la demande de consommation nationale.
Dans cette tâche, Moussa Alassane Diallo doit très rapidement se tourner vers le renforcement des capacités de stockage des magasins de l’Office malien des produits alimentaires (OPAM).A défaut, il risque de laisser les consommateurs maliens entre les mains d’une poignée de personnes ne travaillant que pour remplir leur poche. Pour l’instant, Moussa Alassane se contente de dénoncer la rétention du sucre dans les magasins et dans les ports des pays voisins. Une politique qui a engendré une pénurie de sucre, une crise fabriquée par les commerçants pour entretenir l’inflation.
Le ministre du Commerce et de l’Industrie en colère s’est livré à une large explication des causes
du non approvisionnement du marché en sucre. A l’en croire, cette inflation du prix du sucre est due aux actions illégales entreprises par certains importateurs maliens qui se livrent sans gêne à la rétention du sucre dans les ports des pays voisins ou dans les magasins à l’intérieur du pays, rien que pour entretenir la crise dans les marchés.
Selon le ministre, sur les 100 000 tonnes prévues par le gouvernement malien en juillet 2023, les importateurs n’ont approvisionné le marché qu’avec seulement 40 000 tonnes. Ce qui l’amène à s’interroger si les opérateurs économiques maliens sont capables d’alimenter le marché en denrées de première nécessité.
Pour lui, les importateurs véreux ont fait sciemment en stockant des tonnes de sucre dans les ports des
pays voisins. D’autres ont préféré stocker le sucre importé dans les magasins à l’intérieur du pays pour
créer une inflation.
Il y a certains qui ont déclaré à la douane 10 000 tonnes de sucre, mais ont préféré livrer un camion de
45 tonnes. Au même moment, d’autres importateurs de sucre, au lieu de livrer le sucre importé aux commerçants détaillants, ont préféré le commercialiser aux unités industrielles à un prix non encadré, soutient le ministre Diallo.
Aujourd’hui, le ministre regrette le manque du respect des engagements tenus par les opérateurs économiques qui ont signé le cahier des charges en s’engageant d’importer le sucre pour approvisionner le marché. Sur les 58 signataires du cahier de charges, il y a seulement 28 signataires qui ont enlevé la licence d’importation et 15 opérateurs ont respecté leur engagement en approvisionnant le marché local en sucre, a-t-il indiqué.
Les commerçants ne respectent pas le prix fixé par le gouvernement pour vendre le sucre. Une enquête de la Direction générale du commerce et de la concurrence, révèle que sur les 3 800 contrôles menés par les agents, 789 procès -verbaux livrés ont décelé un non-respect du prix. Ces pratiques
sont contraires aux clauses inscrites dans le cahier de charges. Tout cela a poussé
le ministre de l’Industrie et du Commerce à dire que la pénurie de sucre est une « crise artificielle, fabriquée de toutes pièces » par les importateurs.
D’ailleurs, Moussa Alassane Diallo menace de citer les noms de ceux qui ne respectent pas le cahier de charges. Face à cet imbroglio l’État doit changer de politique en tournant le dos aux importateurs qu’il estime non sincères en dépit des exonérations et de la baisse des taxes que l’Etat a consenti pour faciliter un approvisionnement du marché de cette denrée de première nécessité. Le ministre
a promis que le gouvernement s’assumera, mais la meilleure manière est de prendre en main l’importation. Les commerçants détaillants pourraient s’approvisionner auprès de l’Etat qui a intérêt à mettre en place des magasins témoins. Les consommateurs compenseront les pertes de recettes douanières à travers la moralisation du prélèvement de la TVA.
En attendant, une nouvelle campagne d’approvisionnement du marché en sucre est ouverte. Le gouvernement est à la quête de 50 000 tonnes exonérées à 25 % pour pallier la pénurie de sucre d’ici le 31 décembre 2023. Faut-il le souligner, les autorités ont priorisé l’accès de ce nouveau marché aux 15 opérateurs économiques qui ont exécuté convenablement la campagne débutée en juillet 2023. « Tous ceux qui n’ont pas participé à la campagne de 100 000 tonnes seront exclus de la campagne de jumelage de N-Sukala et Sukala », a déclaré le ministre du Commerce. Pour cette campagne, le prix grossiste est à 30500 FCFA, 31000 FCFA le demi-grossiste pour les sacs de 50 kg. Le prix du kilogramme détaillé est fixé à 650 FCFA.
Oumar KONATE
La preuve