Absence de perspectives pour les paysans d’amorcer la campagne hivernale, occupation des zones entières par des groupes armés, recrudescence des violences…Six (6) mois après d’intenses opérations militaires, au centre, l’heure n’est toujours pas à l’accalmie.
Les premières pluies commencent à tomber à travers le pays, annonçant le début de l’hivernage. En cette période d’incertitudes eten ce début de la campagne agricole,les populations des régions de Ségou, de Mopti, de Bandiagara, de Douentza, n’ont pas la paix intérieureface aux actes récurrents des groupes armés tendant à porter un coup dur à leurs activités agricoles.
En effet, les opérations militaires des forces armées maliennes, enclenchées avec l’acquisition des équipements modernes, aériens et terrestres, en décembre 2021, se poursuivent. Même si la situation n’a pas beaucoup évolué dans plusieurs villages.
Dans la région de Douentza, des villages frontaliers avec le Burkina Faso restent dans les mêmes conditions d’insécurité il y a 4 ans. Le village de Mondoro, chef-lieu de commune érigé en cercle, est sous embargo des groupes armés depuis 2019. A cette date, les villageois ne sont pas parvenus à cultiver les 2% de leur espace cultivable. Les champs sont minés d’engins explosifs improvisés, dit-on. La famine s’est installée avec ses corollaires de victimes.
Globalement, les actes des groupes armés ont beaucoup impacté les activités agricoles pendant la saison écoulée. La preuve, le petit mil est en disparition à Bamako. Le sac de 50 kg est vendu à 22.500 FCFA, présentement, à certains endroits.Plus cher que le riz.Face à cette situation misérable que vit le peuple, accepter de soumettre le délai de la transition au marchandage ou contribuer à isoler le pays et ne rien faire, c’est ignorer la souffrance des populations ?
Pire, des pratiques pour entraver la saison agricole semblent reprises. A Djenné, des centaines des chevaux ont été abattus, la semaine dernière, par des groupes armés non identifiés. Ce sont des dromadaires qui sont volés à Mondoro et environnant. Sans oublier que ces chevaux et ces dromadaires servent aux villageois des moyens d’agriculture et de transport. Les vols des troupeaux signalés ici et là sont importants dans les régions de Douentza et de Bandiagara. L’objectif d’appauvrir les populations locales est bien réel.
Ne faut-il pas revoir l’option militaire engagée par le pouvoir pour venir à bout du phénomène djihadiste qui gangrène notre pays ? Quid des mécanismes locaux de règlement de nos conflits ? Les questions sont posées.
Pour des observateurs avertis, la prétendue montée en puissance des FAMA par des opérations militaires menées au centre du pays, tambour battant,n’ont permis de libérer définitivement aucun village. Si le PM ChoguelMaiga s’est réjoui, lors d’une rencontre, en disant que toutes les bases des terroristes ont été détruites, force est de constater que la situation est loin d’être apaisée.
Le rapport trimestriel sur les tendances des violations et atteintes aux droits de l’homme, couvrant la période du 1er janvier au 31 mars 2022, de la MINUSMA est alarmant.« La MINUSMA a recensé 812 cas de violations et atteintes aux droits de l’homme et au droit international humanitaire. Ces données documentées représentent une augmentation de 151% comparativement au trimestre précédent. Le nombre de personnes tuées a connu une hausse exponentielle de près de 324% », précise ledit rapport.
Le 1er juin, des présumés djihadistes ont pris le contrôle de la route nationale entre Douentza et Gossi, interdisant les cars de transport de continuer. Plusieurs compagnies en partance pour Gao ont dû retourner sur Douentza.
Des sources locales ont rapporté que plusieurs cars étaient stationnés tout au long de la route nationale N°16 dans la ville de Douentza avec des passagers à bord.
Par ailleurs, il faut lutter contre les groupes armés en renforçant les capacités opérationnelles des FAMa.Certes. Mais cela ne demeure pas la seule option possible pour parvenir à la paix entre des populations qui vivaient jadis en harmonie. Autant il faut investir dans l’achat d’équipements militaires, autant il le faut dans la construction de la paix. Ne dit-on pas que la paix a un prix ?
Ousmane Morba
Source: L’Observatoire