La cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires de l´Assemblée générale des Nations Unies vient d’adopter le budget annuel (du 1er juillet 2016 au 30 juin 2017) des 15 opérations de maintien de la paix (OMP) pour un montant de 7,87 milliards de dollars, tout en dotant ainsi les Nations unies des moyens à la hauteur des objectifs ambitieux qui sont les siens.
La Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) hérite, pour sa part, d’un budget de 976 millions de dollars, soit environ 494, 860 milliards FCFA.
Ce budget global, en diminution de 5 % par rapport à l´exercice précédent, reflète, selon l’organisme onusien, l´évolution des mandats des opérations de maintien de la paix (OMP) et permet à l´organisation de poursuivre sa transformation vers un maintien de la paix à la fois plus moderne et plus efficace.
Pour la période allant du 1er juillet 2016 au 30 juin 2017, l´investissement en faveur de la paix et de la sécurité permettra, rassure-t-on du côté de New York, le déploiement de nouvelles technologies sur le terrain (drones, moyens de projection) et ainsi d´adapter les OMP aux enjeux du 21e siècle.
L´Assemblée générale s´est également prononcée sur une série de mesures visant à améliorer l´efficacité du maintien de la paix. Notamment, les 193 États membres de l´ONU ont convenu de réaffirmer la politique de tolérance zéro vis-à-vis des abus sexuels et de donner au Secrétariat général de l´ONU les outils nécessaires pour lutter contre ces abus.
La France est le 5e contributeur au budget des opérations de maintien de la paix. Avec près de 900 casques bleus déployés dans le monde, elle est la deuxième pourvoyeuse de troupes parmi les membres permanents du conseil de sécurité. Par ailleurs, plusieurs milliers de soldats français sont déployés à titre national et apportent un appui quotidien aux opérations de maintien de la paix.
Les OMP aujourd’hui : 16 opérations, près de 100 000 personnels en uniforme, 7,85 milliards de dollars, des mandats complexes.
Développement des OMP sur le plan quantitatif
Le Département des opérations de maintien de la paix (DOMP) et le Département d’appui aux missions (DAM) soutiennent 16 opérations de maintien de la paix et une mission politique spéciale (Afghanistan). Il existe également 12 autres missions politiques et de consolidation de la paix gérées par le département des Affaires politiques, dont fait partie la mission déployée en Irak. Le DAM a été créé en 2007 (par une résolution de l’Assemblée générale 61/279) à la suite de la proposition du Secrétaire général de restructurer le DOMP et d’établir un département distinct pour renforcer la capacité de l’organisation à assurer le soutien logistique pour un nombre croissant d’opérations de maintien de la paix.
S’agissant des effectifs des opérations, alors que les Casques bleus étaient 12 000 en 1996, et 20 000 en 2000, ils sont au nombre de 125 000 aujourd’hui : au 30 juin 2015, plus de 104 668 personnes en uniforme et plus de 17 092 civils étaient déployés.
Les plus importantes missions sont la MONUSCO (République démocratique du Congo) avec environ 19 784 personnels en uniforme, la MINUAD (mission hybride Nations unies — Union africaine au Darfour) avec plus de 17 754, la FINUL (Liban) avec environ 10 410, l’ONUCI (Côte d’Ivoire) avec près de 6 913, la MINUSTAH (Haïti) avec environ 4 577, la MINUL (Liberia) avec 5 934, la MINUSS (Soudan du Sud) avec 12 523, la MINUSMA (Mali) avec 12.000 personnes et la MINUSCA (République Centrafricaine) avec 9 285.
Au 30 septembre 2015, 122 États membres contribuaient aux effectifs des OMP. 15 États fournissent chacun plus de 2 000 hommes. Parmi eux, le sous-continent indien, qui fournit plus de 30 000 Casques bleus, soit le tiers du total, constitue de loin le premier contributeur de troupes. Le Bangladesh, le Pakistan, l’Inde et l’Éthiopie sont les quatre premiers contributeurs. Au 30 septembre 2015, la France se plaçait au 30e rang des pays contributeurs de contingents (deuxième contributeur européen et deuxième contributeur parmi les membres permanents du Conseil de sécurité derrière la Chine) avec un total de 912 hommes déployés dans huit missions (essentiellement au Liban, FINUL). Six Etats francophones, la France, le Sénégal, le Maroc, le Burkina Faso, le Niger et le Bénin figurent parmi les grands contributeurs.
Sur le plan qualitatif
Parallèlement à ce développement quantitatif, on constate une complexité et une diversité croissantes des missions. La fin de la guerre froide a accéléré un changement considérable dans les opérations de maintien de la paix des Nations unies. Le Conseil de sécurité a mis en place des missions de maintien de la paix plus importantes et plus complexes, souvent en vue de faciliter la mise en œuvre d’accords de paix globaux entre des protagonistes intra-étatiques.
La plupart de ces missions sont multidimensionnelles, à l’image de la Minusma, englobant la construction d’un Etat de droit, la protection des droits de l’Homme, le soutien au processus politique, l’assistance économique et humanitaire, les processus de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR), la réforme des secteurs de la sécurité (RSS). Les missions dépassent donc bien souvent le strict cadre sécuritaire du maintien de la paix, et s’avancent sur le terrain de la consolidation de la paix, ce qui nécessite une synergie entre les deux processus. Les missions doivent également souvent s’articuler avec des organisations régionales intervenant avec l’ONU (c’est le cas de la plus grosse d’entre elles, la mission hybride Nations unies – Union africaine au Darfour).
Cette double évolution a de lourdes implications financières, le budget total de l’ensemble des OMP passant de 840 millions de dollars pour l’année budgétaire 1998-1999 (1er juillet au 30 juin) à 7,2 millions de dollars pour l’année budgétaire 2008-2009 ; 7,8 millions pour 2009-2010 ; 7,83 millions pour 2010-2011 ; 7,93 millions pour 2011-2012, 7,30 millions pour 2012-2013 ; 7,85 millions pour 2013-2014 et 8,25 millions de dollars pour 2015-2016.
Les conséquences financières
Cette année, trois missions ont été dotées d’un budget de plus d’un milliard de dollars pour la période allant du 1er juillet 2016 au 30 juin 2017 : la Mission en République démocratique du Congo (MONUSCO) avec 1,3 milliard de dollars, la Mission au Soudan du Sud avec presque 1,2 milliard et l’Opération au Darfour (MINUAD) avec 1,1 milliard.
Quant à la Mission au Mali (MINUSMA), elle hérite d’un budget de 976 millions de dollars, soit environ 494, 860 milliards FCFA. Ces quatre missions représentent à elles seules près de 60 % des 7,86 milliards de dollars.
L’adoption de ce budget intervient à un moment où les Nations Unies s’apprêtent à renouveler les mandats de la Minusma, dont presque tout le monde est unanime sur le fait que ce mandat n’est pas adapté au contexte actuel. Certains souhaitant de légers changements au sein de la Mission tandis que d’autres pensent qu’il faudrait la renforcer avec plus de ressources humaines, d’équipements et de prérogatives. C’est dans ce sens justement que le Premier ministre Modibo KEITA se trouve à New York pour prendre part aux débats de l’Assemblée générale des Nations Unies.
Aussi, intervient-il après le nouveau rapport du secrétaire général des Nations unies qui vient d’être déposé sur la table du Conseil de sécurité. Dans son document, le patron de l’ONU ne se contente pas de proposer des ajustements du mandat de la mission onusienne en termes de capacités opérationnelles, il a formulé surtout des recommandations sur la nécessité de revoir la configuration et de repenser le déploiement des effectifs des personnels militaires et civils.
Sur la base d’une évaluation des menaces existantes, des tâches prescrites et des ressources disponibles, Ban Ki-Moon propose de transférer à la Minusma la force d’intervention rapide composée de 650 éléments, qui est actuellement déployée dans l’Opération des Nations unies en Côte d’Ivoire (Onuci), après son retrait en mars 2017. Cette force sera appuyée par une unité d’aviation de 85 agents.
Estimant que les effectifs actuels ne sont pas suffisants pour faire face à la situation sur le terrain, le secrétaire général de l’ONU demande le déploiement de quelque 2000 militaires supplémentaires.
Revoir la configuration
Ce qui élèverait le total des effectifs militaires autorisés à 13.289 personnes. À ce sujet, des observateurs estiment que le problème réside plus dans le mandat que dans l’effectif. « Du moment où les Casques bleus ne traquent pas l’ennemi, ils sont vulnérables », déclare-t-on dans ces milieux.
Ban Ki-Moon recommande aussi le déploiement d’une force spéciale de 150 personnes à Tombouctou pour la collecte de renseignements et étendre le champ des opérations de la Minusma. Il est prévu aussi une compagnie d’élimination d’engins explosifs de 140 personnes toujours dans la Cité mystérieuse pour renforcer la capacité de protection. Et une compagnie de renseignement et de surveillance de 115 personnes sera positionnée à Kidal.
Le rapport suggère aussi le déploiement de 135 personnes pour renforcer les secteurs et le commandement de la Force ainsi que les unités existantes de renseignement, de surveillance et de reconnaissance. Il préconise également 200 hommes pour renforcer le bataillon de combat pour la protection des convois et 20 officiers d’état-major dans un nouveau poste de commandement à Mopti aux fins de mobilité tactique et d’intervention d’urgence, y compris l’évacuation.
Afin d’améliorer la capacité de renseignement de la mission, tout le personnel militaire et les unités engagées dans la gestion du renseignement et de l’information seront renforcés et simplifiés en une structure placée directement sous l’autorité du commandant de la Force.
Les améliorations
Les améliorations touchent également la police dont l’effectif est jugé insuffisant pour mettre pleinement en œuvre le mandat. C’est pourquoi le patron de l’ONU demande un accroissement des effectifs de la force de police pour les porter à 1.920 personnes. Le rapport recommande de déployer une unité de polices constituée à Ménaka et une autre à Mopti. Et la 3e unité sera positionnée à Bamako pour servir de réserve de déploiement rapide dans les régions, tout en étant également disponible pour des patrouilles conjointes avec la police nationale dans la capitale, à la demande des autorités maliennes.
Le secrétaire général estime que la Mission a également besoin d’améliorer sa capacité de mener des évacuations médicales d’urgence de jour comme de nuit. Ce qui nécessite deux hélicoptères spécialisés supplémentaires avec une capacité de vision nocturne ; des équipes médicales d’urgence aéroportées à Mopti et à Tessalit ; et quatre équipes médicales à Aguelhok, Douentza et Léré.
Ces recommandations devaient, en principe, être examinées, hier jeudi 16 juin 2016, par le Conseil de sécurité lors de sa réunion prévue sur le mandat de la Minusma. Le Conseil de sécurité se prononcera dans une résolution qui devrait être adoptée le 29 juin prochain, soit un jour avant l’expiration du mandat actuel de la Mission.
Par Mohamed D. DIAWARA
Source: info-matin