Le Mali, en application des engagements internationaux auxquels, il a souscrits, a pris un certain nombre de mesures législatives et institutionnelles parmi lesquelles la loi n°01-078/AN-RM du 18 juillet 2001 portant sur le contrôle des drogues et des précurseurs, modifiée par l’Ordonnance n°2013-012/P.RM du 02 Septembre 2013 qui créé l’Office Central des Stupéfiants (OCS). Pour en savoir davantage sur ce service essentiel du Ministère de la Sécurité et de la Protection Civile, nous sommes allés à la rencontre de son Directeur, le Colonel-major Fousseyni KEITA, gendarme de son état qui, nous présente dans cet entretien l’OCS en général et ses missions, défis et perspectives en particulier.
Suivons !
Le Reporter: Colonel-major Fousseyni KEITA, pouvez-vous nous présenter de façon succincte l’Office Central des Stupéfiants ?
Oui, l’Office Central d Stupéfiants, est un Service Central du Ministère de la Sécurité et de la Protection Civile, composé d’agents de tous les services impliqués dans la lutte contre le trafic illicite de drogues (la Police, la Gendarmerie, la Douane, la Justice, la Santé ou tout autre service d’apport nécessaire).
Il est investi de missions de police judiciaire en matière de lutte contre le trafic illicite de drogues. A ce titre, il est chargé de mettre en œuvre l’ensemble des mesures de prévention, de contrôle et de répression envisagées au plan national, sous régional, régional et international pour une lutte efficace et coordonnée contre le trafic illicite des stupéfiants.
Il est aussi chargé d’assurer la coordination opérationnelle des actions de toutes les structures nationales impliquées dans la lutte contre le trafic de drogues.
L’Office Central des Stupéfiants est composé d’une Direction basée à Bamako et une antenne dans chaque capitale régionale du pays. Toutes ces antennes sont opérationnelles, excepté les régions nouvellement crées et celles de Kidal, Ménaka et Taoudéni, dont les chefs sont nommés, mais en subsistance ici à Bamako.
Dans le District de Bamako, il dispose de trois antennes, dont une sur la rive droite, une autre sur la rive gauche et une troisième à l’aéroport international président Modibo KEITA Sénou abritant la Cellule Aéroportuaire Anti-Trafic/Antenne de l’Office Central des Stupéfiants (CAAT/A.OCS).
Ces structures déconcentrées de l’OCS sont chargées :
- d’opérer sur toute l’étendue de la région où elles sont établies, aux différents points potentiels de passage des stupéfiants, notamment les aéroports, les postes frontières, les gares et les ports fluviaux en vue d’interpeler des suspects de trafic illicite des stupéfiants ;
- de contrôler et rechercher les passagers suspects et leurs bagages en provenance ou à destination des pays-cibles des trafiquants de stupéfiants au niveau des aéroports, dans les gares, dans les terminaux à conteneurs et les ports fluviaux ;
- de procéder à des contrôles sur toutes les plateformes aéroportuaires, tant en ce qui concerne les personnes que les bagages, les frets, les aéronefs (parking, aviation générale) et les courriers postaux en transit, à l’arrivée ou au départ des aéroports.
Le Reporter: Cette année, vous avez célébré le 26 juin, Journée internationale contre l’abus et le trafic illicite des stupéfiants, l’édition 2022 à Sikasso, qu’avez-vous fait pour la circonstance ?
Effectivement, le Mali, à l’instar des autres pays de la Communauté internationale, célèbre le 26 juin, Journée Internationale de lutte contre l’abus et le trafic des drogues. Cette commémoration fait suite à la résolution n°42/112 de l’Assemblée Générale de l’Organisation des Nations Unies adoptée en 1987, exprimant sa détermination à sensibiliser les populations partout dans le monde sur les dangers liés à l’abus et au trafic illicite des drogues à travers des campagnes de sensibilisation. Cette année, nous avons décidé de célébrer la Journée à Sikasso autour du thème : « La préservation de la santé de nos populations déjà affectées par la double crise sanitaire liée à la COVID 19 et sécuritaire liée au terrorisme, est un devoir citoyen ».
Au programme, deux activités majeures étaient prévues avec une vaste campagne d’information et de sensibilisation du public sur les méfaits de l’abus des drogues :
- Une séance d’incinération des drogues saisies par l’antenne OCS de Sikasso ;
- Un match de basketball de sensibilisation ;
Le Reporter: Alors, Colonel-major KEITA, quel est le bilan de l’OCS ces deux dernières années en termes de saisie de drogues ?
En termes de bilan, nous avons procédé à la saisie de plus de Cannabis : 32 Tonnes, 452 kg ; Haschich : 8 Tonnes, 19kg ; Cocaïne : 38,82kg ; Crack : 138,75g ; Off : 234g ; Kusch : 201,10kg ; Psychotropes : 361.161 comprimés ; Produits pharmaceutiques contrefaits : 19 Tonnes, 940 kg.
Le Reporter: Est-ce peut-on avoir une idée sur les nationalités des personnes arrêtées et déférées devant les tribunaux ?
Oui, nous avions mis à la disposition de la justice : 258 maliens, 02 franco-maliens, 05 guinéens, 07 burkinabés, 17 nigérians et 01 ivoirien.
Le Reporter: Quels sont les défis et perspectives de l’OCS pour l’heure?
Les défis de la lutte contre les stupéfiants au Mali sont nombreux, on peut citer entre autres :
- L’insuffisance de coordination des acteurs intervenants (Police, Gendarmerie, Douane, Eaux et Forêts, Laboratoire National de la Santé (LNS), Direction de la Pharmacie et du Médicament (DPM), Centre Psychiatrique du Point G. etc…) ;
- La faiblesse des moyens techniques (moyens de détection, moyens d’interception d’appels, moyens de surveillance, base de données…) ;
- L’insuffisance dans la prise en charge des usagers de drogues (manque de centre de prise en charge des usagers de drogues) ;
Compte tenu de la situation sécuritaire dominée par une menace narcoterroriste que connait notre pays, la mise en œuvre de certaines actions s’avère nécessaire afin de consolider les acquis et relever le défi. A cet effet, l’OCS ambitionne de prendre certaines mesures à court et moyen terme pour répondre à cet impératif.
- A court terme:
A court terme, l’OCS souhaite renforcer ses effectifs afin de résorber progressivement le déficit de personnel. Renforcer la coordination de la lutte au niveau national à travers la mise en place d’un cadre de concertation permanente entre les différents acteurs (Police, Gendarmerie, Douanes, Eaux et Forêts, services pénitentiaires, ONG…
- A moyen terme:
Le renforcement de la coopération sous régionale en vue d’un partage d’informations et d’expérience pour mieux faire face aux missions assignées. L’OCS projette, en outre, de mettre en place une base de données sécurisée pour permettre la centralisation des informations et des renseignements pouvant faciliter la répression des infractions liées aux stupéfiants. L’utilisation de la plateforme de partage d’informations du SIPAO (Système d’information policière de l’Afrique de l’Ouest) et d’autres plateformes d’échange d’information comme le SPIDER.
L’OCS projette l’installation d’un système d’interception téléphonique légale prévue par l’article 120 de la loi n°01-078 du 18 juillet 2001, modifiée, portant sur le contrôle des drogues et des précurseurs.
Aujourd’hui la téléphonie mobile et d’autres technologies de l’information sont fréquemment utilisées par les bandes organisées. L’établissement des preuves électroniques du trafic de drogues par les services d’enquête du Mali demeure un défi important. Ce système permettra d’exploiter les communications ayant un lien avec le trafic de drogues en vue de démanteler les réseaux des narcotrafiquants.
Le Reporter: Cela étant, nous estimons que vous avez un certain nombre de stratégies de sensibilisation de la population sur les méfaits de la consommation des stupéfiants
C’est vrai, l’OCS souhaite aussi l’opérationnalisation rapide de la MILD (Mission Interministérielle de Lutte Contre la Drogue) pour achever les travaux de validation du document de stratégie nationale de lutte contre la drogue, dont le draft a été élaboré depuis 2013.
Enfin, le renforcement des actions de prévention contre l’abus et le trafic illicite de drogues avec l’implication des organisations de la société civile et des départements ministériels concernés à travers l’enseignement d’une leçon modèle sur les méfaits de la consommation de drogues dans les écoles.
Avec l’appui des partenaires techniques et financiers, l’OCS organise des séances de sensibilisation périodiques à l’endroit des publics cibles et/ou vulnérables.
Propos recueillis par : Ousmane DIAKITE
Source: Le Reporter