A première vue, l’on pourrait aussitôt penser que ces deux villages ( l’ancien et le nouveau)situés à 1 km seulement l’un de l’autre appartiennent au même ancêtre commun. Mais en réalité il n’en est rien. S’ils partagent le même espace géographique, ils n’ont rien de commun sur le plan des origines de fondation. Ce texte auquel nous vous invitons à lire est de l’éminent chercheur, Pr Moussa Djiré.Il est actuellement le Recteur de l’Université des Sciences Juridiques et Politiques de Bamako(USJPB)..
« Ici il n’est pas question de l’abrogation du veuvage en tant que pratique instituée par la tradition rendue obligatoire par la religion musulmane et la législation malienne, mais de celle d’un rituel animiste qui l’accompagnait, il y’a quelques années à Nienguen Koro.Il est de coutume que lorsqu’une femme perd son époux , elle observe une période de réclusion .A Nienguen Koro, la fin du veuvage était marquée par un rituel spécial pour le veuve qui venait de perdre son premier époux. Un groupe de vieilles femmes accompagnait l’intéressé en dehors du village pour la laver et la « purifier ».Ce jour-là, personne ne sortait car conformément à une croyance fortement ancrée, rencontrer la procession de purification, , c’était exposer son conjoint ou soi-même à une mort certaine.
Avec le temps, une grande partie de la population finit par être excédée par ce rituel séculaire et comme c’est toujours la façon en pareil cas, commença à « parler dans la gourde ».Mais il y’a de cela quelques années, une coïncidence malheureuse alimenta la hargne populaire contre « le veuvage » : le jour de la procession tomba sur la même date que celle des compositions de fin d’année de l’école de Nienguen Coura ou étudient les enfants du village. Les futurs lettrés sont conduits à l’école à l’aube. Mais, personne n’ayant pu leur apporter le déjeuner, ils restent toute la journée sans rien se mettre sous les dents : Tout le village est saisi d’une indignation honteuse et le lendemain, certains s’en ouvrent directement au chef de village qui convoque une réunion du vestibule.
Lors de la réunion, les anciens lui signifient de façon unanime qu’il est le seul et l’unique propriétaire de son village et qu’il a le plein droit d’interdire toute pratique qu’il juge contraire aux intérêts de la communauté. Ils se déclarent solidaires de toute décision qui sera prise à cette fin.Le lendemain, la responsable de l’association traditionnelle des femmes et son adjointe sont convoquées.les femmes n’ayant pas le droit de pénétrer à l’intérieur du Vestibule, elles se tiennent sur le seuil, alors que le chef de village les informe du motif de la convocation.
La décision de l’interdiction est rapportée non pas comme la sienne propre, mais comme émanant de tout le vestibule et de tout le village et les sanctions précisées : dorénavant, si à la suite de ce rituel quelqu’un mourrait dans ce village, tous les membres du groupe de femmes seront considérés comme bannis de la communauté, personne ne leur adressera la parole.les deux responsables des femmes ne peuvent que prendre que prendre acte de la décision qui sera par la suite portée à la connaissance de l’opinion par le chef de village(….)
B. CAMARA
Source : Le Phénix