Au Maroc, à l’occasion du 22ème anniversaire de son accession au trône, Mohammed VI a prononcé ce samedi 31 juillet, un discours à la Nation. Une intervention qui n’est pas passée inaperçue car le roi a déploré les tensions entre son pays et l’Algérie. « Vous n’aurez jamais à craindre de la malveillance de la part du Maroc », a-t-il lancé à l’adresse de son voisin avant d’appeler à rouvrir les frontières avec l’Algérie.
C’est une déclaration pour le moins inattendue du souverain marocain, alors que les relations entre les deux pays s’étaient encore dégradées, ces derniers temps. Ce sameid, Mohammed VI a joué l’apaisement, déplorant les tensions avec l’Algérie : « la sécurité et la stabilité de l’Algérie, et la quiétude de son peuple sont organiquement liées à la sécurité et à la stabilité du Maroc », a-t-il lancé lors de son adresse à la Nation. Le roi du Maroc a invité le président algérien Abdelmadjid Tebboune « à faire prévaloir la sagesse » et à « œuvrer à l’unisson au développement des rapports » entre les deux pays.
Mohammed VI a réitéré son appel à la réouverture des frontières avec son voisin – des frontières fermées depuis l’été 1994 – et ce, à l’initiative de l’Algérie.
Cette déclaration intervient dans un contexte agité entre les deux pays. Si Rabat et Alger se heurtent, depuis des décennies, sur la question du Sahara Occidental, la tension était montée d’un cran, ces derniers jours, après des propos de l’ambassadeur marocain à l’ONU. Ce dernier avait dit, mi-juillet, soutenir l’autodétermination du peuple kabyle en Algérie, une provocation insupportable aux yeux d’Alger qui a rappelé son ambassadeur au Maroc pour consultations.
Dissocier la question du Sahara de la question des frontières
« Le Maroc est très demandeur pour la réouverture des frontières. C’est même un discours très récurrent et très ancien chez Mohammed VI. Mais au fond, le Maroc souhaite dissocier la question du Sahara de la question des frontières. L’Algérie explique justement d’un côté qu’elle ne peut pas rouvrir ses frontières avec un pays puisqu’elle a un contentieux territorial, et le Maroc veut dissocier les deux. Donc, contentieux et bagarre sur le Sahara du point de vue du Maroc, bras ouverts comme c’est le cas, cette fois-ci, dès qu’il s’agit de l’Algérie, du peuple algérien en particulier, pour passer par-dessus la tête des dirigeants et de l’armée », analyse l’historien Pierre Vermeren qui enseigne le Maghreb contemporain à l’université Paris Panthéon-Sorbonne.
« Je n’y vois pas là une contradiction. J’y vois là, au contraire, la perpétuation d’une sorte de duel, de dualité qui s’explique finalement pour des raisons politiques là aussi, puisque le roi du Maroc, en tant que commandeur des croyants se doit aussi, politiquement et religieusement, d’être dans une bienveillance vis-à-vis des autres peuples. Il y a la mystique des peuples frères au Maghreb. Là, elle est une nouvelle fois réactivée », conclut le chercheur.
RFI