Les marchés du ministère de la Défense et des Anciens Combattants (Mdac), connus sous le nom d’équipements militaires, connaissent un rebondissement avec l’interpellation de plusieurs opérateurs économiques, personnalités civiles et militaires. Samedi dernier, trois fournisseurs en lien avec cette affaire ont été placés sous mandat de dépôt.
« Le temps de la justice n’est pas celui des hommes ». Cet adage bien usité dans le milieu judiciaire qui signifie que la justice prend tout son temps pour enquêter dans un dossier donné, a eu tout son sens le samedi 11 septembre 2021, par le placement sous mandat de dépôt de Moussa Amadou Aly Niangado, Moussa Fané et Abdramane Kéita. Les trois commerçants sont inculpés d’« atteinte aux biens publics », « faux et usage de faux » dans des marchés de livraison de moyens roulants à l’armée. Les enquêtes les concernant ont pris 72 heures puisqu’ils étaient gardés à la brigade de recherche du Pôle économique, située à l’ACI-2000 pour des besoins d’enquêtes, avant d’être envoyés en prison le samedi dernier par le juge d’instruction du Pôle économique et financier de Bamako.
Le dossier des équipements militaires où l’on parle de 1200 milliards de F CFA pompés dans la Loi de Programmation militaire (Lopmi), ressemble à une véritable caserne d’Aly Baba.
Le Procureur en charge du Pôle économique et financier de Bamako avait ouvert les enquêtes depuis plusieurs mois. Le mois de mai dernier, le porte-parole du Président de la Transition, le Colonel Assimi Goïta avait cité parmi les causes du putsch contre Bah Ndaou, la lenteur observée par le gouvernement de Moctar Ouane dans l’ouverture des enquêtes contre des ex-dignitaires trempés dans des affaires de corruption, notamment ceux qui sont soupçonnés de détournement des derniers publics en rapport avec la Lopmi.
Traque en cours contre les suspects
L’inculpation de ces trois opérateurs économiques qui ne sont pas reconnus comme de gros clients du ministère de la Défense et des Anciens combattants est un signe avant-coureur de la traque en cours contre les suspects de marchés douteux des équipements militaires à des degrés différents. Les regards sont tournés vers de gros opérateurs économiques qui ont bénéficié des dizaines de milliards de F CFA au Mdac, sous le couvert de la Lopmi. Ces présumés délinquants financiers ne seront pas les seuls à répondre de leurs actes. Leurs complices civils ou militaires sont aussi fichés.
Jusque-là, un seul opérateur économique avait été inquiété par la justice. En mai 2020, le PDG de Motors Leader Africa (GMLA Africa), Cheickné Sylla dit « Colonel », l’un des fournisseurs du Mdac, avait été écroué sur plainte de son client (Madac) pour « escroquerie », « faux et usage de faux » dans une affaire de livraison de 300 véhicules aux FAMa. Sur ce fait, il a été accusé d’imitation de signature du ministre de la Défense et du DFM pour établir de faux contrats de fourniture de véhicules, d’une valeur de 795 290 000 F CFA, avec la complicité d’un cadre de la BCS. « Colonel » a recouvré la liberté conditionnelle après quelques mois en détention.
Abdrahamane Dicko