Peu importe la force étrangère qui interviendra au Mali, ce sera toujours un échec aussi longtemps que les Maliens ne travailleront pas à construire une armée forte et une démocratie nouvelle où la justice et la bonne gouvernance, l’intégrité sont des réalités.
C’était il y a environ huit ans, et beaucoup d’enfants nés à cette époque ont porté le nom ou le surnom « François », en hommage à l’ancien président français, François Hollande. Une belle manière pour les Maliens de montrer leur reconnaissance à l’État français qui les sauvait de la haine dévastatrice des groupes qualifiés de « terroristes ».
Dans son livre Les leçons du pouvoir, publié en 2018, François Hollande dira que « le plus beau jour de sa vie politique » est la chaleur de l’accueil qu’il a reçu quand il visitait Tombouctou, au Mali, après l’intervention de son armée pour libérer Kona.
Autrefois perçue comme paternaliste, accusée d’ingérence, les Maliens, depuis la colonisation, ont toujours eu une relation mitigée envers la France. Ce pays qui les a colonisés et a continué à dicter la musique sur laquelle danser des années après l’indépendance. C’était une occasion pour améliorer, assainir et rendre transparentes les relations entre les deux pays. Mais l’histoire fut aussi rapide et éphémère qu’un coup de foudre.
Colère et incompréhension
Après l’intervention successive de Serval et Barkhane, avec des résultats discutables, l’insécurité ne fait que progresser au même rythme que grandissent le désamour et la méfiance envers l’intervention armée française. Et les récentes mobilisations au Burkina contre les forces françaises témoignent de l’incompréhension et de la colère vis-à-vis de son mécanisme d’intervention dans le Sahel.
Nombreux sont ceux qui ne comprennent pas comment une armée si puissante, comme la France, est incapable de neutraliser rapidement quelques groupes armés. Les théories complotistes prolifèrent et s’enracinent dans l’inconscient collectif. Elles décrivent la France comme le pays qui soutient et fiancent les groupes qualifiés de djihadistes. Elle profitrait du désordre pour piller les supposées ressources minières dans le Sahel, surtout dans le Nord du Mali.
Aujourd’hui, les Maliens, ou une majorité d’entre eux, surtout au sein du gouvernement de la transition, le colonel Assimi Goïta en tête, voient en la Russie la puissance libératrice qui viendra sauver le Mali de la crise sécuritaire. Selon les chiffres du Mali-Mètre de mars 2021, 45,6% des Maliens ne sont pas satisfaits de Barkhane au Mali.
Toujours un échec
Même si un seul pays ne peut venir à bout du terrorisme qui touche tout le Sahel, c’est curieux de voir un pays, qui a à sa tête un militaire, ne pas compter sur sa propre armée. Nous sommes sortis discuter avec les Maliens dans les rues, les marchés et les universités. Toutes les voix sont unanimes : seule la Russie peut mettre fin à notre crise sécuritaire.
Comme l’estime Assanatou Traoré, qui tient une boutique de produits cosmétiques au grand marché de Bamako, « la France joue double jeu au Mali et fait semblant d’être avec notre armée. La crise sécuritaire prendre fin le jour où l’armée russe foulera notre sol ».
Russie ou la France, j’ai juste envie de dire que personne ne viendra laver notre linge sale à notre place. Je suis dépité de voir que même les intellectuels et les non scolarisés voient des forces étrangères comme solution à nos problèmes. Sans se dire que, nous-mêmes, nous pouvons apporter des réponses aux défis qui nous concernent.
Nous devons nous aider nous-mêmes pour construire ce pays. Et cela passe par une remise en cause de soi, une analyse franche et sincère et une responsabilisation de tout un chacun.
Nous ne pouvons pas éternellement tendre la main. Nous sommes à un tournant où les crises nous offrent l’occasion de nous responsabiliser et d’assumer notre destin qui est de faire de ce pays le plus grand et le plus beau du monde.
Peu importe la force étrangère qui interviendra au Mali, ce sera toujours un échec aussi longtemps que les Maliens ne travailleront pas à construire une armée forte et une démocratie nouvelle où la justice et la bonne gouvernance, l’intégrité sont des réalités.
Source : Benbere