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Mali : que veut l’Algérie?

Les retrouvailles entre l’Algérie et le Mali, proclamées bruyamment de part et d’autre ces derniers jours, après bien des frictions, ne dessinent-elles pas un changement de cap dans l’approche algérienne par rapport à la rébellion dans la partie Nord du Mali?

Il faut se rappeler le saccage de l’ambassade d’Algérie à Bamako le 13 mars 2018, par des manifestants maliens venus protester contre leurs conditions de traitements et d’expulsions par les autorités algériennes. Le Mali et l’Algérie ont frôlé la crise diplomatique lorsque des rumeurs de rappel de l’ambassadeur et du consul maliens en Algérie avaient circulé. Un démenti formel a suivi et des images de fraternité chaleureuse ont été diffusées sur les medias maliens.

Le 14 février 2018, un raid de la force Barkhane a permis de tuer ou de capturer plus d’une vingtaine de « terroristes » dont des chefs d’Ansar Dine ainsi que d’Al Mourabitoun. Parmi les morts, Malick Ag Wanasnat, bras droit d’Iyad Ag Ghali. Une partie de l’opération s’est déroulée à moins d’un kilomètre de la frontière algérienne.

La veille de l’opération, mardi 13 février, le général de corps d’Armée, Ahmed Gaid Salah, vice-ministre de la Défense et chef d’état-major de l’Armée algérienne, a reçu l’Amiral Bernard Rogel, chef d’état-major particulier du président français Emmanuel Macron. Ce dernier aurait été dépêché par la France pour venir informer l’Algérie de l’imminence de l’opération. Tout semble indiquer qu’une telle opération n’aurait pas été possible sans le feu vert algérien.

Par ailleurs, depuis quelque temps, on assiste à des patrouilles militaires renforcées du côté algérien. Des jihadistes et des trafiquants se seraient rendus. Des caches d’armes et de munitions ont été trouvées. Les opérations militaires algériennes ont permis de mieux verrouiller la frontière. Et les effets se font sentir jusqu’à Kidal où se sont raréfiées les denrées de première nécessité. Les trafics en tous genres semblent avoir été fortement ralentis. D’où les appels pressants des rebelles du CMA-MLNA au premier ministre malien pour leur venir en aide.

Mais à quoi est dû ce changement d’attitude de l’Algérie? Quel serait le sens du réchauffement actuel des relations ente le Mali et l’Algérie? Serait-elle en train de lâcher ses protégés de Kidal? Serait-elle excédée par les relations de plus en plus marquées entre le MLNA et le Maroc? Aurait-elle cédé aux pressions américaines et françaises? A-t-elle sa propre stratégie? Que veut-elle?

Il est vrai que depuis un certain temps, le MLNA semble courtiser le Maroc et inviter Rabat à jouer un rôle dans la crise du Nord Mali. Dans cette région, nombreux sont aussi les éléments armés du Front Polisario. Ce sont eux qui ont, semble-t-il, fait pencher la balance des rapports de force en faveur des rebelles lors de l’offensive de l’armée malienne à Kidal en mai 2014.

Cette forte présence du Polisario en territoire malien se fait certainement avec la bénédiction algérienne. Quels seraient ses desseins cachés? Maintenir une emprise sur territoire riche en ressources minérales? Contrôler les routes des trafics divers dans la zone? Faire pression sur AQMI, la CMA et le MLNA en cas de besoin? Se rendre incontournable dans tout règlement de la crise malienne? Exercer une pression sur la diplomatie malienne au détriment du Maroc? Constituer une puissante force de réserve en cas d’hostilité déclenchée par le Maroc? Garder une forte marge de négociation avec les puissances occidentales en train de s’installer au Sahel?

De nombreuses questions se posent à propos de la stratégie algérienne. Que veut l’Algérie?

Il faut aussi tenir compte des luttes de clan au sein du pouvoir dans le contexte de la succession du président algérien, plus à même d’exercer la plénitude de ses fonctions. Les nombreux changements intervenus sur le plan politique et au niveau du commandement militaire, les restructurations intervenues au niveau des services de renseignement, attestent de l’intensité des batailles feutrées au cœur du pouvoir. Quel en sera le vainqueur? L’avenir nous le dira.

L’Algérie finira-t-elle par lâcher ses protégés dans le conflit du nord Mali? Des signes avant-coureurs le laissent penser.

Le sort d’Iyad Ag Ghali semble déjà scellé. Il est désormais un condamné en sursis. Jusqu’à quand? Il sait trop de choses et est devenu un témoin gênant aussi bien pour l’Algérie que pour les forces françaises et occidentales lancées à ses trousses.

Quant à la CMA et au MLNA, leur utilité est devenue marginale. Le GATIA et le MSA font montre de plus d’efficacité sur le terrain. Les signes de complicité entre les jihadistes et le MLNA sont de plus en plus évidents, même aux yeux de leur parrain occidentaux. La rébellion a été surtout le cheval de Troie de la France et des USA pour s’installer dans cette zone qu’ils convoitaient depuis fort longtemps. Le MLNA et la CMA finiront par comprendre, le jour où ils les mettront au pas, une fois leurs objectifs atteints. Cela ne saurait plus tarder.

Quant à l’Algérie, ne risque-t-elle pas d’être leur prochaine cible? Elle le sait et s’y prépare certainement!

MondAfrique

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