Dans un communiqué publié le 7 septembre, le gouvernement du Mali fait état d’un bilan provisoire de « 49 civils tués, des blessés et des dégâts matériels sur le bateau ». Les blessé·es ont été admis·es à l’hôpital de Gao. D’après les informations recueillies par la FIDH, ce bilan pourrait évoluer car certaines familles sont toujours sans nouvelles de leurs proches. Un témoin indiquait notamment : « j’ai 6 membres de ma famille à bord de ce bateau, depuis l’attaque nous n’arrivons pas à les joindre, je suis inquiet, j’espère les retrouver… ».
« Ce bateau transporte des centaines de passager·es. Dès le premier tir de roquette, plusieurs passager·es paniqué·es, ne se sont pas posés de question, ils/elles se sont jeté·es dans l’eau alors que certain·es ne savaient même pas nager. C’est pourquoi le nombre de victimes communiqué officiellement est sous-estimé, le bilan peut être beaucoup plus lourd, mais on en saura plus dans les jours à venir… », déclarait à la FIDH un autre rescapé.
Dans la matinée du 8 septembre, le Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (JNIM) affilié à al-Qaïda aurait revendiqué l’attaque du bateau et celle contre le camp des forces armées maliennes (FAMa) de Bamba, dans la région de Gao, perpetrée le 7 septembre. D’après les informations communiquées par les autorités maliennes, 15 militaires maliens ont trouvé la mort dans cette deuxième attaque perpétrée le même jour. Ce même 8 septembre, le Procureur de la République du Pôle judiciaire spécialisé de lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée, a annoncé « l’ouverture d’une enquête sur ces faits criminels (…) en vue d’identifier, d’interpeller, de poursuivre et de traduire en justice les auteurs, coauteurs et complices de ces faits criminels. »
Les civil·es, premières victimes du conflit
« Les civil·es continuent à payer un lourd tribut dans ce conflit meurtrier. Nous martelons que la seule réponse militaire ne suffit pas. Une résolution véritable et durable du conflit requiert à la fois des réponses judiciaires concrètes et des politiques globales, » a declaré Me Drissa Traoré, Secrétaire-général de la FIDH. « Nous saluons l’ouverture d’une enquête par les autorités judiciaires maliennes et appelons à ce qu’elle soit diligente. Pour mettre un terme au cycle de la violence et de l’impunité, il est impératif que les enquêtes ouvertes sur des cas de violations graves des droits humains soient menées à leur terme. »
Ces violations graves sont perpétrées tandis que la MINUSMA (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali) se retire du pays. La FIDH exprime sa vive préoccupation : les attaques se multiplient alors que l’Accord pour la Paix et la Réconciliation issu du processus d’Alger est dans une impasse. Parallèlement à la rétrocession des camps de la MINUSMA à l’armée malienne, et notamment celui de Ber, dans la région de Tombouctou, le 13 août dernier, plusieurs affrontements ont eu lieu entre des groupes armés/terroristes et l’armée malienne. Le 8 septembre, une attaque kamikaze revendiquée par le JNIM a visé le camp des FAMa de Gao. La tension est également à son comble le nord-est du Mali. Un avion de l’armée de l’air malienne a été abattu par la CMA (ex-rebelles touaregs de la coordination de l’Azawad).
La situation humanitaire des populations civiles continue elle aussi de se détériorer. La ville de Tombouctou connaît des difficultés d’approvisionnement en carburant, en produits de première nécessité en raison du blocus imposé à la ville par des groupes armés djihadistes.
« Les besoins et la sécurité des populations civiles doivent être au cœur des stratégies nationales autant qu’internationales. Les autorités maliennes en ont la première responsabilité. Elles doivent redoubler d’efforts pour protéger concrètement les droits humains et la lutte contre l’impunité, » a déclaré Mabassa Fall, Représentant de la FIDH auprès de l’Union africaine. « Dans le contexte actuel, particulièrement tendu la communauté internationale, les partenaires internationaux du Mali et les autorités maliennes doivent convenir a minima d’un mécanisme de suivi de la situation des droits humains, de la protection des populations civiles et du recensement des dommages causés aux civil·es. »
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