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Mali: Hale au pillage des richesses

Le 3ème papier de la série de Mondafrique sur le Mali signée Aida H. Diagne dénonce le pillage du pays, notamment sur le plan minier.

 serval barkhane soldat militaire francais armee nord tombouctou

A Kidal, c’est le black-out. Dans le nord du Mali, les richesses à exploiter ne sont pas passées inaperçues. Au prix de morts sans fin et d’une insécurité croissante, le pillage du pays s’organise plus ou moins discrètement et au détriment d’un développement sain.

A mesure que les partenaires économiques se multiplient, l’instabilité financière grandit. Pour trouver leurs motivations, il faut creuser sous le sable du désert…

Stratégies à court terme

Selon le mandat de la Minusma, « le Gouvernement a retenu l’élaboration et la mise en œuvre d’un Programme de Développement Accéléré des Régions du Nord » . Les principes en sont clairs: « Axe 1 : Retour de l’administration et de la sécurité et cohésion sociale, Axe 2 : Développement rural, sécurité alimentaire et environnement, Axe 3 : Relèvement économique, Axe 4 : Accès aux services sociaux de base, Axe 5 : Infrastructures de développement et mines ». Faisons confiance à nos partenaires pour que ce dernier axe avance beaucoup plus vite que les précédents. Notons néanmoins que pour une fois, le social arrive après l’économique. Dans la logique des choses, pour financer le social, il faut de l’argent, beaucoup d’argent. Si vous ne générez pas cet argent en créant de la richesse, deux solutions s’offrent à vous :

  • Soit vous vous passez de social. Je vous entends déjà vous écrier. Quoi ? Rater un mariage ou un enterrement où je ne pourrais pas exhiber mon dernier bazin à 150 000 Fcfa, cancaner à loisir et louper une journée de travail pour la troisième fois dans le mois, quand j’ai la chance d’en avoir un ? Refuser d’héberger le neveu arrivé du village qui passe son temps à prendre le thé et à refaire le Mali à la porte de la maison, devant un caniveau putride qui déborde de détritus qu’il ne lui viendrait même pas à l’idée de nettoyer ? Qui ? Moi nettoyer le caniveau ? Moi le fils de ? Mais oui, toi. Tu ne sais pas que tous les fils sont fils de quelqu’un ? Oui, mais moi, mon oncle est DAF au Ministère des Finances, ma cousine est douanière et mon cousin est policier à un bon carrefour. Je comprends, nourri, logé, argent de poché aux frais du citoyen, pourquoi irais-tu travailler ? Mais moi je veux bien travailler mais uniquement comme fonctionnaire. Je suis un jeune diplômé, Master en archéologie obtenu à l’université en 8 ans, s’il vous plaît ! Ah bon ? Cela explique sans doute le regard toujours braqué sur un passé mythifié.
  • Soit vous le subtiliser aux populations en détournant les fonds qui leur sont destinés ou en empochant les sommes revenant à l’Etat. Vous savez, les taxes et impôts qui normalement devraient financer écoles, hôpitaux, routes, armée, justice, police et même vos augmentations de salaires…

Bombes à retardement

La mandat de la Minusma est très explicite, quoique de façon disséminée, sur les potentielles richesses à exploiter dans le Nord. Le gouvernement commencera par « promouvoir, sur investissements privés, un nouveau projet de recherche et d’exploration pétrolière et minière sur toute l’étendue du territoire national ». « Dans un souci de diversification des ressources minérales, il s’agira également d’accompagner la réhabilitation, dans le cadre d’un Partenariat Public-Privé (PPP), de la société d’exploitation du phosphate à Bourem et du gisement de Manganèse à Tassiga (Cercle d’Ansongo) ». Gardons en mémoire qu’en 2014, une commission des lois du Sénat français a publié un rapport qui a qualifié les PPP de « bombes à retardement » en raison de leurs « effets néfastes notamment pour les générations futures ». En effet, en faisant ce transfert, l’Etat ou la collectivité se condamne à régler des années durant un loyer ou des frais à son partenaire marchand, selon des contrats aux clauses multiples et souvent peu à l’avantage des collectivités ou de l’Etat. En 2015 la Cour des Comptes a enfoncé le clou en précisant que les « communes et « petites » structures publiques qui ont recours à ces contrats sont souvent mal armées juridiquement pour évaluer les risques et les conséquences de la signature du partenariat. ». Vu le niveau de compétence de nos élus et leur engagement dans la défense des intérêts du pays, les avocats étrangers et les multinationales peuvent se frotter les mains : jackpot in Desertsand assuré! Eh fils de, toi aussi ! Pas le sang du désert, le sable du désert…

Ramasser les miettes

Les sénateurs français ont aussi pointé l’« effet d’éviction des petites et moyennes entreprises » dont la capacité d’investissement est limitée. Dans le meilleur des cas, elles sont reléguées à la « sous-traitance » du contrat de partenariat, sans bénéficier des mêmes garanties que dans le cas d’un marché public classique. ». Les sénateurs notent également que la plupart des contrats PPP vont aux grands groupes de BTP comme Bouygues, Eiffage ou Vinci. Retenez ces noms, ils ne tarderont pas à venir construire les fameuses infrastructures tandis que les communautés verront s’y engloutir impôts et aide supposée les tirer de la faim.

Et les entreprises maliennes compétentes se contenteront des miettes laissées par les entreprises françaises installées au Mali, diplomatie économique et retour sur investissement obligent.

Aida Diagne

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