Celui qui n’avait aucune chance devant lui de rester à Koulouba, y séjourne désormais pour cinq bonnes nouvelles années. Et pourtant il n’y a pas eu miracle pour la réélection d’IBK, seulement cette coalition en face de lui et qui avait fait au peuple la promesse de le faire partir, n’était diantre qu’une coquille vide composée en partie d’amateurs et d’hommes politiques à la fois fragiles et sans conviction aucune. Le résumé d’un passage folklorique de la démocratie malienne.
Au premier rang de ce groupement anti-IBK, l’activiste Mohamed Youssouf Bathily dit Ras Bath. Au départ vu comme héraut des causes nobles, le jeune homme, au fil du temps, réussira à séduire un grand nombre de Maliens voyant en lui une lueur pour les faire sortir de la mauvaise gouvernance.
Ras Bath tape sur tout et sur rien et le peuple au jour le jour se complait dans sa misère. Au finish, Ras Bath se radicalise et invente le concept « Boua ba bla » ou « le Vieux va abdiquer ». Cette expression très péjorative est adressée à Ibrahim Boubacar Kéita, lui indiquant que son âge avancé ne lui permettait plus d’être président du Mali et qu’il devait céder.
Justement, c’est parce qu’ils étaient convaincus du succès du concept « Boua ba bla » que beaucoup d’hommes politiques à leur tour tenteront de séduire le jeune activiste Ras Bath qui, au jour le jour, montait les enchères au tour de son « produit ». Finalement, c’est l’opposition républicaine qui parvint à conquérir l’activiste Ras Bath. Mais, dit-on, l’opposition avait réussi à rassembler autour d’elle un ensemble d’hommes politiques tous aussi convaincus du concept « Boua ba bla ». Et, ces messieurs avaient toutes les chances devant eux pour réussir si, seulement si, tout se passait comme prévu.
… Et Dieu envoya Soumeylou
L’une des grandes erreurs des messieurs de l’opposition, avancent des analystes, c’est d’avoir continué à croire que les Maliens étaient déjà dans l’après-IBK. Ce, même après la nomination de Soumeylou Boubèye Maïga comme Premier ministre, ce grand spécialiste des coups bas, un illusionniste de talent, le décrivent d’autres. Il lui a fallu un jeu à trois parties pour faire changer la donne.
Primo, il fallait d’abord dézinguer le concept « Boua ba bla ». Une véritable plaisanterie qui a été combattue à travers la comédie. Et en intervalle de quelques semaines des humoristes (aussi les plus médiocres du pays) et soutenus par des partisans du pouvoir, parviendront à faire de « Boua ba bla » une autre machine pour redorer l’image du président IBK à travers l’expression antonyme « Boua ta bla ». Et ça, ça a été une réussite.
Secundo, il fallait aussi soigner l’image d’IBK à l’international. Dieu merci, les cabinets de lobbyings ont fait du bon boulot, des chefs d’Etat de la sous-région aussi. IBK sera félicité avant l’annonce officielle de la Cour constitutionnelle.
Tertio, il fallait surtout affaiblir la coalition pour l’alternance devant laquelle IBK n’avait aucune chance. D’une vingtaine à huit candidats, un après un, ils se retireront. Des politiciens fragiles, ironise-t-on, qui n’ont pas pu résister à la moindre pression. Laquelle ? Allez savoir !
Du moins s’il y a un fait pour lequel, le seul sans doute, les Maliens opposés à la gouvernance d’IBK remercieront Soumeylou Boubèye Maïga, c’est d’avoir réussi à faire la lumière sur la vraie face de ces candidats de l’opposition dont certains, une fois élu président de la République, commencerait d’abord à satisfaire leurs créanciers à la douleur du Trésor public. (Aliou Boubacar Diallo de l’ADP/Maliba, c’est comment, est-ce que les Sud-Africains sont rentrés ?)
En somme, et il faut le reconnaître, Soumeylou Boubèye Maïga, avec l’organisation des élections, a réussi là où beaucoup d’observateurs, aux plans national et international, doutaient… de la même manière qu’il faut aussi douter si réellement l’homme au départ était venu pour l’organisation de ce scrutin à la date exacte du 29 juillet.
Quand on faisait semblant d’aller à des élections
Si l’on en parle moins dans les coulisses, les murs des salons diplomatiques ont parlé. Ce n’est qu’en fin juin que la machine électorale a réellement démarré au Mali. Tout le reste, semble-t-il, était folklore. Et l’on se demande encore ce qui était l’objectif secret du Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga.
Le 28 juin dernier, le Premier ministre Soumeylou Boubèye Maiga écourtait une visite sur le sol français. Pour motif de son retour prématuré au pays, il évoque la grève des administrateurs civils à laquelle il avait volonté de trouver une solution. Une hypothèse qui n’a pas convaincu étant donné que la même grève était en cours quand le Premier ministre s’envolait pour la terre gauloise. Alors que s’est-il réellement passé ?
En réponse, et selon des indiscrétions, celui qui avait promis devant Dieu et les hommes la tenue de la présidentielle dans le délai constitutionnel était parti pour négocier une transition en France. Niet de l’Elysée. Il fallait aller à ces élections à tout prix. Dans les coulisses de l’Elysée fait pression et s’exprime publiquement par la voix d’un député proche du pouvoir français : « J’ai l’impression qu’il n’y a pas une véritable volonté de tenir ces élections présidentielles… », déclarait sur les ondes de RFI Jean-Jacques Bridey, président de la commission de défense nationale à l’Assemblée nationale de France. Il parlait de la situation au Mali et c’était le 2 juillet, soit quatre jours seulement après que le Premier ministre eut écoute sa visite. Ceci n’est pas qu’une simple coïncidence, trouvez l’erreur.
Djibi Samaké
La Sirène du 28 septembre 2018