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Mali: ce que pense Choguel Kokalla Maiga du déploiement de l’Armée dite reconstituée à Kidal

Ma réaction sur le déploiement de l’Armée dite reconstituée à Kidal ( qui a débuté ce jour 10 février 2020) :

1-Nous constatons que ce bataillon de l’Armée dite reconstituée a été composée conformément aux closes secrètes convenues entre IBK et les dirigeants des Mouvements séparatistes, le 20 juin 2015, afin que ces derniers acceptent de parapher l’Accord d’Alger ( APR ) préalablement signé à Bamako le 15 mai 2015 , et qu’ils avaient refusé catégoriquement de parapher ce jour .

Ces closes secrètes sont demeurées confidentielles pour le peuple malien ( et même pour les autres membres du gouvernement dont j’ai fait partie entre 2015 et 2016) pendant près de 5 ans. Elles n’ont été rendues publiques, officialisées et formalisées que pour être mises en œuvre et ce, à la faveur de la dernière session du CSA tenue le 19 janvier 2020.

2- Par ailleurs, il reste des questions de fond que le peuple malien tout entier est en droit de se poser et qui nécessitent des réponses claires et précises pour donner un minimum de crédibilité à ce qui ressemble plus à une opération politique de vassalisation prononcée de l’Etat malien, et qui dans les faits prépare ( dans quelques années ) la mise en place, méthodique et par étapes, des outils et instruments militaires, institutionnels et politiques pour rendre irréversible et inéluctable sa partition programmée. Ces questions sont les suivantes :

• Quelles leçons ont été tirées des intégrations massives, hasardeuses et sans discernement d’anciens rebelles dans les FAMa au cours des années 1990 et 2000, suivies quelques années plus tard de désertions massives au profit des ennemis du Mali ? C’est le lieu et le moment de rappeler qu’entre 1992 et 2011, les Gouvernements du Mali, au nom de la paix et de la Réconciliation, tout comme aujourd’hui, avaient naïvement intégré plus de 2500 anciens rebelles dans notre Armée qui comptait alors environs 7500 à 8000 hommes. Résultat ?

L’indiscipline et l’insubordination, les désertions et retour à répétition sans conséquence pour leurs auteurs, ont gangrené, déstructuré et démoraliser nos Forces de Défense et de Sécurité. Pire, à chaque fois que des groupuscules d’individus ont pris les armes contre l’Etat malien (en 2006, 2012 et 2014) plus des 80% des intégrés ont déserté pour rejoindre avec armes, bagages et secrets militaires, les ennemis du Mali. Ils se sont alors ralliés aux ennemis du Mali pour trahir et faire assassiner leurs compagnons d’armes d’hier des FAMa ; ce fut le cas à Kidal en 2006, à Aguelhok en 2012 et à Kidal en 2014.

Quelles dispositions ont été prises pour prévenir à jamais la répétition de telles situations dramatiques ? Quelles garanties ont été données dans ce sens par les dirigeants des Mouvements séparatistes ? Quelles garanties ont été données par l’ONU, mais aussi par les Gouvernements des États parrains du processus comme l’Algérie et la France, dont on sait très bien qu’ils n’auraient jamais accepté une telle situation dans leurs propres pays ? Je voudrais à ce stade remercier et féliciter singulièrement Gamou et Ould Meïdou et les hommes qui leurs sont restés fidèles, pour avoir respecté leur serment d’allégeance et de fidélité à leur pays, à leur patrie , le Mali.

• Le contingent de l’Armée dite reconstituée ne va-t-il pas être, comme par le passé, cantonné dans une clôture ou dans un camp à Kidal-ville, interdisant du coup aux soldats de faire des patrouilles militaires dans la ville de Kidal et ses alentours ? Et pourquoi pas des patrouilles de longue portée dans toute la Région dans le cadre de la lutte contre le terrorisme?

Si le contingent de l’Armée dite reconstituée doit être simplement cantonné dans la ville de Kidal, l’opération n’aura été qu’une action politique symbolique pour servir la communication et la propagande du Gouvernement et des Mouvements séparatistes, mais surtout pour donner au peuple malien l’illusion de l’exercice de l’autorité de l’Etat dans toutes les Régions et donc sur la totalité du territoire national, permettant ainsi de préparer les esprits à accepter voire imposer la RÉVISION CONSTITUTIONNELLE rejetée par les Maliens.

• Quelles garanties ou assurances ont été données aux éléments FAMa et de la Plateforme qu’en cas d’une nouvelle rébellion ou d’une détérioration imprévue de la situation, les éléments issus des Groupes séparatistes ne vont pas de nouveau, comme par le passé, se rallier ou faire appel à leurs alliés et amis des Mouvements terroristes, comme à Aguelhok en 2012 ou à Kidal en 2014 et 2019. Dans ces trois cas, les soldats restés fidèles à la République du Mali ( y compris nos frères arabes et touaregs auxquels je rend hommage) ont été sauvagement assassinés ( plus de 80 à Aguelhok en 2012, plus 150 à Kidal en 2014, plusieurs dans le courant de l’année 2019)

3- En attendant que les questions et préoccupations que je viens d’énumérer aient des réponses, en attendant la levée des différentes hypothèques sur la paix au Mali, les Maliens ont le droit voire le devoir patriotique de demeurer prudents, vigilants et circonspects. Évitons d’être gagnés par le syndrome de l’optimisme béat. Dans quelques mois voire quelques années nous pourrions donner une appréciation plus objective de la démarche actuelle des Autorités sur la mise en place de ce qui est appelé pompeusement et avec emphase « Nouvelle Armée Reconstituée ».

Bamako, le 11 février 2020

Choguel K. MAIGA, Président du MPR

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