Dans le système malien, le ministre de l’économie et des finances est techniquement lui le chef du gouvernement, car ayant la gestion de l’argent du pays, c’est lui qui décide les priorités à financer et imprime le rythme du gouvernement.
Quand Boubou Cissé arrive au ministère des finances en 2016, il trouvait dans les caisses du ministère 155 milliards, « au lieu de reconstituer, il a tout vidé », confiait ainsi à Nord sud journal un ancien haut responsable du ministère de l’économie et des finances. Depuis le nom de Boubou Cissé est cité régulièrement dans des affaires de corruption, des marchés surfacturés ou ne respectant pas les procédures normales. Le Mali est-il devenu une société privée dirigée par Boubou Cissé ? Boubou Cissé sert le Mali ou sa poche ? Dans cet article, nous vous proposons un panorama inédit qui brosse quelques « des grandes affaires » de corruption où le nom de l’actuel premier ministre malien, Boubou Cissé est cité.
- Des camions qui coûtent autour de 60 millions facturés à 188 millions à l’État
Cette semaine, un nouveau document de passation d’un marché revêtu du sceau de « secret en matière de défense » a fait fuite sur les réseaux sociaux au Mali. Il s’agit d’un marché de neuf milliards FCFA TTC, attribué à la société Commerce international pour le Mali (CIM), pour la livraison de camion de Transport de troupe. Marché N¨004 MDAC/DFM 2018, passé de gré à gré en violation de toute les procédures de marché public. Contact par Nord Sud Journal, une source au ministère de la défense confirme l’authenticité du document. Selon un spécialiste de ce genre de marché, « le coût réel des camions tourne autour de 60 millions des francs CFA ». Cependant, en étudiant ce contrat, on se rend compte que le coût par camion est facturé à 188 millions des francs CFA à l’État malien. Silence au ministère des finances ! Le prix a donc triplé.
- La Plateforme de logistique de Nionsombougou bradée pour Dubai Ports World (DP World)
En 2018, l’Etat malien signe un contrat de concession de la plate-forme logistique de Nionsombougou de 1000 hectares pour Dubai Ports World (DP World), le troisième exploitant portuaire mondial. DP World, Situé le long de la route principale reliant la capitale malienne à Dakar au Sénégal, et proche de la ligne ferroviaire reliant les deux villes, la plateforme logistique de Nionsombougou aura une capacité annuelle de 4 millions de tonnes de marchandises, a indiqué DP World dans un communiqué. Cependant si la société qui est entrée en possession de la plateforme de Nionsombougou est une grosse société, les procédures d’acquisition posent problème et d’interrogation sur la bonne foi de la partie malienne. D’abord, le ministre des finances, Boubou Cissé n’a introduit les documents au conseil des ministres pour aprobation qu’après signature de contrat, pire encore, selon les termes du contrat, l’État malien n’aura qu’une redevance dérisoire de 5% du chiffre d’affaire et oblige l’État un important volume de trafic sur cette plate-forme logistique. Incroyable ! A qui profite le crime ?
- L’État « achète » six parcelles de terrain à plus 6 milliards au député Hadi Niangadou
Il y a quelques années, le député Hadi Niangadou achetait six parcelles de terrain à Gouana, dans le cercle de Kati. Suite à une occupation des parcelles de terrain par des populations, l’État demande à Hadi Niangadou de laisser ces parcelles aux populations en échange d’un endommagement. Suite à une surévaluation des terrains par le député, aucun gouvernement n’a accepté n’a accepté son offre depuis 14 ans. L’ancien premier ministre Abdoulye Idrissa Maiga a catégoriquement refusé de payer cette somme astronomique pour des terrains qui auraient coûté 12 millions à Hadi Niangadou au moment de l’Achat. En août 2019, le premier ministre et ministre des finances, Boubou Cissé accepte de payer plus de six milliards deux cents millions au députés Niangadou malgré les réticences de son ministre de Budget, Mme Aoua Sylla qui a émis des réserves. Y t-il eu un deal pour payer une somme aussi considérable pour des parcelles qui auraient coûté 12 millions des Francs CFA il y a quelques années ?
- Un blindé « en carton » évalué en moyen à un milliards des FCFA ?
Au mois de décembre 2019, Boubou Cissé a conduit à Abu Dhabi, aux Émirats arabe uni une délégation malienne composée du ministre de la sécurité intérieur, Salif Traoré, du directeur général du Budget, Sidiki Traoré, du Directeur général adjoint de la direction de marché public, Soibou Mariko et de l’ambassadeur du Mali aux Émirats Arabes unis, Boukary Sidibé, alias Kolon. Objectif : mobiliser une première tranche du crédit octroyé à l’État malien depuis juin 2019 par les Emirats Arabes unis en appui budgétaire de 250 millions de dollars , soit 150 milliards des Francs CFA. Il s’agit bien d’un crédit remboursable et non un don comme comme annoncé au tout début. Le Mali a sollicité les EAU pour le décaissement d’une partie de cet crédit au fin d’acquérir cent (100) véhicules blindés. Le 11 décembre 2019, Boubou Cissé rencontrait Mohamed Al Suwaidi, le directeur du fond d’Abu Dhabi, puis le 12 décembre 2019, il rencontre le vice ministre de la défense Emirati, Matar Salem Al Daheri et Cheikh Saif Zayed Al Nahyan, vice-premier ministre et ministre de l’intérieur Emirati pour leur demander le décaissement d’une première tranche du crédit octroyé par l’Emirat au Mali pour acheter « des blindés pour équiper deux régiments d’infanterie des Fama ». Mais à quel prix ? La presse malienne parle d’un montant total de 100 milliards des Francs CFA, soit un milliard des Francs CFA par Blindé. Si l’on se réfère des sites spécialisés du domaine militaire comme www.opex360.com, le prix d’un blindé de même type que ceux dont Boubou Cissé était au cœur de la commande, 458 millions des Francs CFA l’unité. De ce fait, le prix de cent sera donc 45 milliards 8 cents millions francs CFA. Où est donc passé la différence de plus de 50 milliards des francs CFA ?
Pire encore, quelques mois plutard, le fournisseur livre plusieurs blindés qui ne répondaient pas aux normes. Le général malien Drabo, responsable des matériels militaires avait officiellement dénoncé cette livraison. La presse malienne et l’Imam Mahmoud Dicko avaient même qualifié ces blindés de « blindés en carton ». Scandale ! Surtout que ce marché de 100 milliards des francs CFA était passé de gré à gré en violation des textes maliens. Mais nous ne sommes pas au bout de nos surprises. « Il y a deux semaines, le trésor malien a payé 40 milliards des francs CFA, de reliquat de contrat alors même qu’il n’a pas été executé à 100% », nous confie une source au trésor malien. Alors que sur le terrain et après des attaques terroristes contre ces engins, il commence à avoir des sérieux doute sur l’efficacité même de ces engins. Il faut rappeler que sur le terrain, les mouvements rebelles et djihadistes préfèrent toujours utilisés des pick up 4X4 beaucoup plus légers et rapides.
En faisant des investigations sur la société qui a bénéficié de ce marche, on decouvre d’autres surprise. En effet, STREIT Group est cité dans beaucoup de scandale de fourniture d’équipements militaires par des experts de l’ONU depuis 2016. Ils lui reprochent d’avoir violé l’embargo interdisant la vente d’armes à la Libye. Elle a aussi vendu des véhicules militaires au Soudan, rapportait le quotidien The Globe and Mail, alors que des sanctions adoptées par Ottawa empêchent tout « Canadien », même « à l’extérieur du Canada » de conclure de telles transactions.
- 2.3 milliards donnés de gré à gré à Sinsy Coulibaly
Décidément, la passation de gré à gré est devenu le jeu favori de Boubou Cissé et pour quelle cause ? Le chef du patronat malien, Mamadou Sinsy Coulibaly est marié à Madina Tall, une cousine du premier ministre Boubou Cissé. Il lui avait octroyé un marché de gré à gré de 2.3 milliards des Francs CFA pour impression des bulletins de vote lors des élections législatives 2020. Chose étonnante encore, le contrat n’a été validé en conseil des ministres qu’après signature du contrat alors que le gouvernement qui connaissait les dates des élections avaient tout le temps pour passer ce marché en respectant toutes les procédures d’appels d’offres. Mais visiblement, Boubou Cissé n’a rien à gagner dans le respect des procédures.
- Concession de l’aéroport de Bamako ou le parfum du gré à gré pour EGIS
Le 15 mai dernier, le premier ministre Boubou Cissé avait convié des responsables maliens à l’ouverture des offres financières des soumissionnaires dans le cadre de la mise en concession de l’aéroport international Président Modibo Keita. A l’ouverture des plis, un seul offre, celui de la société française EGIS, associé à son frère Baba Cissé, qui n’est autre que le DG de la SGI-Mali et Mamadou Synsi Coulibaly, président du CNPM, époux de Madina Tall, la cousine de Boubou Cissé. Cette procédure est toujours en cours.
NORDSUD JOURNAL