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Mali : 5,2 millions de personnes en besoin urgent d’assistance

Selon le bulletin humanitaire de juillet à août du bureau de coordination des affaires humanitaires (OCHA) publié il y a quelques semaines, le nombre de personnes ayant besoin d’assistance humanitaire au Mali en 2018 est passé de 4,1 millions en janvier à 5,2 millions à la suite de la révision du Plan de Réponse Humanitaire (PRH) en juillet dernier. Ce qui fait une augmentation de 900.000 personnes. Cette hausse serait liée à la crise pastorale et aux conflits inter-communautaires.

En effet, cette situation concerne les personnes en insécurité alimentaire et nutritionnelle, les affectées des inondations et les déplacées internes. Selon les informations recueillies dans le bulletin, les partenaires humanitaires, en appui aux efforts du gouvernement malien ont ciblé 2,9 millions de personnes vulnérables à travers le pays, soit 1,3 millions de plus qu’au début de l’année. Une augmentation qui se justifie par la hausse du nombre de personnes vulnérables et l’urgence des interventions dans les secteurs de la sécurité alimentaire, de la nutrition, de la protection ainsi que des abris et biens non alimentaires. Pour assister 2,9 millions de personnes en 2018, ils estiment à environ 330 millions de dollar de fonds nécessaire. Pour mobiliser des ressources conséquentes et faire face aux besoins urgents et croissants, le budget a été revu à la hausse avec une augmentation de 67 millions de dollars comparativement à la requête lancée au début de l’année. Au 31 août, le budget révisé du PRH pour le Mali était financé à 32% selon les données recueillies par le système de suivi financier d’OCHA (FTS). Le déficit de financement actuel s’élève à 223 millions de dollars.

L’insécurité alimentaire et nutritionnelle, un défi à relever

D’après les informations fournies par le bulletin, cette année, la population en insécurité alimentaire et les enfants touchés par la malnutrition aiguë sévère ont atteint un niveau jamais égalé au cours des quatre dernières années. Le PRH révisé a estimé à 4,6 millions le nombre de personnes en insécurité alimentaire dont 1,6 million en besoin d’une assistance d’urgence et à 274.000, les enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère. Durant la période de soudure de juin à septembre, les humanitaires, en appui aux actions du gouvernement, ont ciblé un million de personnes dans le cadre de l’assistance alimentaire et plus de 266.000 ménages dans les secteurs de l’agriculture, du maraîchage et de l’élevage. Au 30 juin, les acteurs humanitaires avaient assisté plus de 520.000 personnes en vivres et plus de 116.000 ménages en moyens de subsistance, selon le cluster sécurité alimentaire. Au 30 août, plus de 73.000 enfants souffrant de la malnutrition aiguë sévère et 65.000 malnutris aigus modérés avaient été pris en charge. Pendant cette période de soudure agricole où il y aurait augmentation de la vulnérabilité nutritionnelle, les membres du cluster nutrition ont profité de la fenêtre d’opportunités offerte par les campagnes de la Chimioprophylaxie2 contre le paludisme saisonnier (CPS) chez les enfants de moins de 5 ans pour en même temps, réaliser le dépistage nutritionnel systématique afin de contenir le maximum de cas de malnutrition pour leur prise en charge thérapeutique. Ce traitement visait à prévenir le paludisme. Cependant, les taux de malnutrition aiguë sévère, forme la plus grave, sont très élevés au nord et au centre dont 3,1 à Gao, 2,8% à Taoudéni, 2,3% à Ségou et 2,1% à Ménaka selon OMS.

L’insécurité alimentaire, une situation préoccupante dans la région de Mopti

Selon le bulletin, les résultats des enquêtes vocales et par messages menées auprès de 5878 ménages en juillet 2018 confirment la détérioration de la situation de la sécurité alimentaire courante par rapport à la même période en 2017. Selon cette étude, le nombre de ménages avec une consommation alimentaire pauvre ou limitée est supérieur à 30% par rapport à l’échelle nationale. Mopti, l’une des régions les plus affectées par les conflits inter-communautaires et l’insécurité, est la plus touchée avec près de la moitié (45,9%) des ménages ne disposant pas d’une consommation alimentaire suffisante.

Le cas de la commune de Mondoro

Selon le bulletin, l’insécurité a causé une situation d’urgence nutritionnelle dans la commune de Mondoro, dans le cercle de Douentza, dans la région de Mopti. A la suite de l’alerte donnée sur l’apparition d’une maladie non identifiée, une mission d’évaluation médicale conduite par les autorités sanitaires avec l’appui des partenaires humanitaires a été déployée le 5 août à Mondoro, une commune qui compte quatre(4) centres de santé communautaires situés dans les villages de Mondoro, Niangassadiou, Douna et Tiguila. À l’exception de Mondoro, tous ces centres sont dépourvus de personnel qualifié à cause de l’insécurité. L’accès des acteurs humanitaires à ces zones par voie terrestre est limité par l’insécurité et le risque que posent les engins explosifs improvisés. Ainsi, les populations des villages de Niangassadiou, Douna et Tiguila, presque coupées du reste du pays depuis sept(7) mois, ont un accès limité aux soins de santé, aux moyens de subsistance et aux marchés pour s’approvisionner en nourriture avec pour conséquences immédiates, une situation de vulnérabilité alimentaire et nutritionnelle critique.

De mars à août, les services sanitaires ont dénombré 224 malades dont 35 décès sur une population totale de 24.205 habitants répartis entre trois (3) aires de santé. Dans le village de Douna, sur 13.111 habitants, 161 cas de maladie ont été enregistrés dont 20 décès, à Niagassadiou sur 11.094, 20 cas de maladie recensés, il y’a eu 6 décès et à Tiguila, sur 9539 personnes, 43 cas de maladie ont été détectés avec 9 décès. Les constats faits par les équipes médicales, au 5 août, ont orienté vers l’hypothèse d’une malnutrition avec des risques de complications dues à une possible carence en vitamine B1 et C affectant toutes les franges de la population. A cette date, 66 patients étaient pris en charge au centre de santé de Mondoro.

Plus de 137.000 personnes touchées par les inondations

D’après le bulletin, plus de 137.000 personnes sont affectées par les inondations. Une situation causée par les pluies et la montée des eaux des fleuves, en juillet et en août, dans toutes les régions. Au 17 septembre, elles avaient affecté plus de 137.000 et causé 13 pertes en vies humaines selon les données recueillies par la Direction Générale de la Protection Civile (DGPC). Les prévisions hydrologiques et météorologiques sont toujours en faveur d’une pluviométrie normale à excédentaire avec une crue croissante des fleuves Niger et Sénégal de deux centimètres en moyenne par jour. Cette situation mérite une attention particulière dans la mesure où le nombre de personnes affectées a atteint le niveau le plus élevé au cours des six dernières années.

Il ressort du bulletin que la population à risque d’inondation dans le pays est estimée à plus de 183.000 personnes. Les inondations ont partiellement ou totalement détruit environ 6 350 maisons et 92 points d’eau. Par ailleurs, elles ont emporté environ 2 680 têtes de bétail. Les régions de Tombouctou, Ségou, Koulikoro et Gao ainsi que le District de Bamako, enregistrent environ 82% des personnes affectées par les inondations dans le pays. La Direction Nationale de l’Hydraulique avait annoncé le 9 septembre, le dépassement du seuil d’alerte du niveau du fleuve à Bamako. Des inondations sont à craindre tout le long du fleuve Niger jusqu’à Gao en passant par Koulikoro, Ségou, Mopti et Tombouctou.

La plupart des personnes relocalisées à cause des inondations ou des risques d’inondations sont dans des écoles, ce qui risque de poser un problème d’accès aux classes à la rentrée scolaire déjà effectuée  il y a 4 jours. Les autorités maliennes en collaboration avec les partenaires humanitaires, organisent des évaluations multisectorielles dans les différents sites et le long du fleuve au niveau de Bamako pour mieux cerner l’ampleur des besoins humanitaires.

Le nombre de personnes déplacées internes a doublé depuis janvier

Il est annoncé dans le bulletin que le nombre de personnes déplacées internes a presque doublé en huit mois, passant de 38.100 en décembre 2017 à 75.350 en août 2018 selon le rapport de la Commission Mouvement de Populations (CMP) du 9 août. Cette forte augmentation est essentiellement due aux conflits inter-communautaires, à l’insécurité et aux affrontements ou la perspective d’un éventuel affrontement entre groupes armés. Les régions de Ménaka, Mopti et Tombouctou sont celles qui totalisent le plus grand nombre de nouvelles personnes déplacées. Au total, plus de 37.000 déplacées ont été enregistrées entre janvier et juillet dernier dans ces localités. Dans la région de Mopti, le nombre de déplacées a été multiplié par six tandis qu’à Tombouctou, il a triplé.

Selon le rapport de la CMP, des mouvements de personnes déplacées installées dans les régions du Sud vers les régions du Nord sont observés. De nombreux déplacés effectuent des mouvements pendulaires, c’est-à-dire des allers retours entre les lieux de déplacements et les localités d’origine. La majorité de ces personnes sont vulnérables, car ayant perdu ou bradé tous leurs biens au moment de leur déplacements. Les communautés hôtes qui les accueillent aussi partagent avec elles leurs ressources, souvent très limitées.  Toute chose qui accentue leur vulnérabilité.

A noter que le mécanisme de réponse rapide du Mali a un besoin urgent de fonds additionnels. Mis en place en 2016 par les acteurs humanitaires, il contribue à l’amélioration des conditions de vie des personnes rendues vulnérables par les conflits ou la survenue d’une catastrophe naturelle. Ce mécanisme est un outil qui permet de gérer une crise humanitaire de l’alerte à la fourniture de l’assistance d’urgence. Depuis sa création, le mécanisme a apporté des assistances dans les régions de Koulikoro, Ségou, Mopti, Gao, Tombouctou, Ménaka et Kidal.

Moussa Sékou Diaby

Tjikan

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