Le nombre de Maliens souffrant de la faim a presque triplé en un an, alerte une coalition de 22organisations humanitaires travaillant dans le pays. Il s’agit de Conseil Danois pour les Réfugiés (DRC), Action Contre la Faim (ACF), Conseil Norvégien pour les Réfugiés (NRC) Solidarités International, World Vision International (WVI), ACTED, Oxfam, DanChurch Aid, International Rescue Committee (IRC), Première Urgence Internationale(PUI), Médecins de Monde , Care International, Humanité & Inclusion, Plan International, Islamic Relief, Mercy Corps, Terre des hommes, Educo, We World, Welt Hunger Hilfe (WHH), Agronomes et Vétérinaires Sans Frontières (AVSF), Norwegian Church Aid (NCA). C’est dû, selon elles, au triple impact de l’insécurité croissante, des sécheresses et du Covid-19 qui ont plongé un nombre record de 1,2 million de personnes dans une crise alimentaire en 2021.
« La sécurité alimentaire est menacée sur de nombreux fronts au Mali. La situation continuera de s’aggraver pour des millions de personnes vulnérables si nous n’agissons pas maintenant, les projections indiquant une nouvelle augmentation de 58% du nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire l’année prochaine », a déclaré Adeline Benita, directrice du Groupe de travail humanitaire du Forum international des ONG au Mali (FONGIM).
Les niveaux de la faim sont les plus élevés enregistrés depuis le début de la crise au Mali en 2012. La sécheresse a durement touché le pays, entraînant la perte de plus de 225 000 hectares de champs et affectant plus de 3 millions de personnes principalement à Mopti, Ségou et Tombouctou, selon les 22 organisations.
Parallèlement, indiquent-elles, l’insécurité a contraint 400 000 personnes à fuir leur domicile. De nombreuses familles ont dû abandonner leurs champs et ont vu leur bétail voler. L’emprise croissante des acteurs armés sur la capacité des personnes à se déplacer librement et, dans certains cas, un véritable siège, a empêché les familles vulnérables d’accéder à l’aide, à leurs champs, aux zones de transhumance et aux marchés environnants. “Des hommes armés ont attaqué notre village et nous ont interdits de partir. Avec le temps, nous avons consommé toute la nourriture que nous avions économisée et nous avons été obligés de trouver une solution pour survivre“, a rapporté une mère d’un village assiégé de la région de Mopti. « Mes quatre enfants et moi avons dû nous échapper à travers la brousse pendant la nuit. Nous avons marché 20 kilomètres sans aucune nourriture ni eau », a-t-elle indiqué.
La combinaison de l’insécurité croissante, du changement climatique et de l’impact socio-économique du COVID-19 a fait augmenter le prix des denrées alimentaires comme le maïs et le riz dans certaines régions comme Gao, respectivement de 22% et 18% en 2021, mettant la nourriture hors de portée de nombreuses familles.
La crise alimentaire a été exacerbée par le faible engagement des États donateurs à répondre aux besoins alarmants. Les niveaux de financement humanitaire n’ont cessé de diminuer, passant de la moitié du financement requis pour les réponses de sécurité alimentaire en 2017, à seulement un quart en 2021.
Dix années de conflits ont de plus en plus affaibli les moyens de subsistance des populations dans un pays déjà fragile et gravement touché par le changement climatique. Il est donc crucial d’adapter nos réponses à une crise prolongée ou de risquer de voir une augmentation exponentielle de la faim au Mali dans les années à venir.
Selon les 22 organisations humanitaires, 1 244 906 personnes font face à une crise alimentaire et 3 585 989 personnes sont actuellement sous pression. Selon les chiffres du Cadre Harmonisé, 1 971 000 personnes seront confrontées à une crise alimentaire si rien n’est fait, et 4 533 157 personnes seront sous pression entre juin et août 2022. 767 773 enfants sont mal nourris, dont 197 691 souffrent de malnutrition aiguë sévère, selon le cluster Nutrition. La réponse de sécurité alimentaire de cette année n’a reçu que 25,4 % des fonds nécessaires pour répondre aux besoins les plus urgents (58,9/ 232,3 millions USD) ; la réponse humanitaire au Mali n’a reçu que 38,1% des fonds nécessaires pour l’année (214,8/ 562,3 millions USD).
Hadama B. Fofana
Source: Le Républicain