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Mahmoud Dicko : « Je n’ai jamais douté de la capacité d’IBK de sortir le Mali de la crise »

Président de la plus grande organisation confessionnelle du Mali, le Haut Conseil Islamique, Mahmoud Dicko, pense que malgré des débuts « laborieux », le Président Ibrahim Boubacar Kéita a suffisamment de « talents, de ressources et de méthode » pour sortir le Mali de la crise multidimensionnelle qu’il connaît depuis 2012. Interview !

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L’Enquêteur : Quel bilan faites-vous des « un an » du président Ibrahim Boubacar Kéita ?

Mahmoud Dicko : Je remercie Allah-Le-Tout-Puissant de nous avoir accordé la vie jusqu’à ce jour. Je crois qu’IBK a un mandat de cinq ans. Un an, c’est peut-être trop tôt pour faire une évaluation. Je ne suis d’ailleurs pas un cabinet pour évaluer les actions du gouvernement. Je ne peux parler qu’en tant que citoyen de ce pays. Il faut reconnaître que même si le début à été laborieux, aujourd’hui, l’espoir est permis.

Es-ce à dire que le Haut Conseil Islamique, la communauté musulmane du Mali ne regrette pas son choix porté sur le candidat Ibrahim Boubacar Kéita à la présidentielle de juillet-août 2013 ?

Non ! Ce n’est pas le Haut Conseil Islamique en tant que tel qui a choisi le Président IBK. C’est d’abord tout le peuple malien ! Ce sont quand même près de 80% des électeurs maliens qui ont porté leur choix sur le candidat IBK ! Cela signifie que le Mali est un pays laïc, majoritairement peuplé de musulmans…La communauté musulmane a forcément contribué à cette élection. Le Haut conseil n’a pas fait un choix…pour dire de soutenir tel ou tel candidat. Ca n’a jamais été fait dans ce sens. Par ailleurs, la communauté musulmane dans sa majorité a soutenu le candidat IBK. Cela est indéniable. Et c’est vrai.

Quid des motifs de satisfactions après ces « un an » ?

D’abord, il est difficile qu’un homme fasse l’unanimité. Ensuite, personne, à travers l’histoire n’a jamais fait l’unanimité tout au long de son parcours. Il y en a forcément certains qui parleront bien de vous, d’autres parleront mal de vous. C’est comme cela, la vie. On n’y peut rien. Mais ce qu’il faut retenir, c’est que majoritairement, la communauté musulmane du Mali a porté son choix sur le candidat qui lui semblait répondre à ses aspirations. Elle a choisi l’homme qui, selon elle, devrait présider aux destinées de ce pays, conduire le bateau Mali à bon port.

Mais comme je l’ai dit tantôt, le début a été laborieux ; personne ne peut le nier. Il y a eu des tâtonnements ici et là. C’est vrai. Mais pour tout observateur qui vit les choses telles qu’elles sont, je crois que les actes qui sont en train d’être posés depuis un certain temps permettent d’avoir espoir. L’homme d’Etat que les Maliens connaissent, l’homme qui s’assume, l’homme de vérité commence vraiment à marquer de son empreinte la gestion du pouvoir.

Une question qui pourrait fâcher…Que répondez-vous à vos détracteurs qui vous accusent d’être trop en collusion avec le pouvoir ?

Les gens peuvent dire ce qu’ils veulent. Je ne peux pas empêcher les gens de dire ce qu’ils pensent de moi. Puisque je dis des autres ce que je pense d’eux. Ce qu’est la vérité et qui est clair, c’est que ce n’est pas Ibrahim Boubacar Kéita qui m’a réélu à la tête du Haut Conseil Islamique. J’étais déjà président du Haut Conseil Islamique quand il est venu au pouvoir. Je terminais un premier mandat de cinq ans à la tête de cette institution religieuse. Je pense que si j’ai pu être élu à un moment où il n’était pas là, il n’y a pas de mal à ce que je puisse être reconduit pour un nouveau mandat à la tête de cette organisation. Mieux, c’est moi-même qui ai organisé ce congrès électif. J’ai fait mes preuves. Qu’est-ce qui m’empêche d’être réélu ? Dire que j’ai été réélu grâce à son soutien….des gens le diront parce qu’ils veulent le dire. Mais ils savent que ce n’est pas la vérité.

Ce qui est certain et que je ne peux pas nier, c’est qu’Ibrahim est un ami. Je le dis et je l’assume. C’est un ami et cette amitié, je l’ai toujours assumée. Je ne suis pas un hypocrite qui ferait la girouette. Au moment où Ibrahim n’était pas au pouvoir, il fut mon ami. Il n’y a pas de raison qu’il cesse de l’être aujourd’hui qu’il est au pouvoir. Je n’ai pas attendu qu’il soit au pouvoir pour devenir son ami ou courir derrière lui. Nous avons passé des moments ici où il n’était président de rien, ni de l’Assemblée Nationale, ni de la République. Il y a toujours eu une amitié sincère entre nous et cette amitié, ce respect mutuel est toujours resté vivace entre nous. Aujourd’hui qu’il est chef de l’Etat, c’est la même considération, la même amitié. Pas au-delà. Mais les interprétations que les uns et les autres donnent à notre relation, je ne peux les en empêcher.

Mais qui n’est pas mon ami, qui n’est pas mon frère de tous ces hommes politiques ? Ils sont tous mes frères et mes amis. Certains sont mes camarades d’enfance, d’autres des camarades de classe. Il n’y a pas aujourd’hui, des gens de cette génération qu’on n’a pas côtoyés d’une manière ou d’une autre. Au Mali, qui n’est pas ami de qui ? Qui n’est pas frère de qui ?

Quel rôle pourra encore jouer la communauté musulmane du Mali, en particulier votre institution, dans la résolution de la crise qui secoue encore notre pays ?

L’apport de la communauté musulmane, du Haut Conseil Islamique, est visible.

Au moment où il n’y avait pas d’institutions, la communauté musulmane a joué sa partition. Aujourd’hui que nous avons des institutions légalement élues et mises en place, je crois qu’il faut laisser ces institutions faire leur travail. Notre travail consistera à les aider à consolider les acquis, les actions qu’elles posent chaque jour pour ramener la paix dans notre pays. Nous continuerons quand même à jouer notre partition dans la consolidation de la paix et de l’unité nationale.

Vous avez prié pour que la paix revienne au Mali…Les Maliens sont traumatisés, ils sont impatients….Ils attendent du pouvoir qu’il résolve les problèmes au plus vite….en tant que leader d’opinion, quel message avez-vous à leur endroit, pour les rassurer ?

Il ne sert à rien que les Maliens soient traumatisés. Ce n’est pas aujourd’hui qu’ils doivent l’être. C’est peut-être depuis les raisons qui nous ont poussés dans cette crise. C’est depuis là qu’on devrait être traumatisé. C’est en ce moment-là que tout le monde devrait perdre espoir, non maintenant où on est sur le point de sortir de cette crise qu’on doit être traumatisé. Je pense que nous avons un peuple suffisamment mûr. Qui a suffisamment de ressources. La quête de la paix et de l’unité des Maliens, à laquelle tout le monde aspire est légitime. Mais on ne doit pas être inquiets ou traumatisés. Non ! Nous sommes suffisamment responsables. C’est des négociations entre des enfants de ce pays. Des gens vont se parler, c’est laborieux au début, il peut y avoir des contradictions, des couacs par-ci par-là, mais j’ai espoir que nous finirons par nous entendre. Parce que nous sommes quand même tous des Maliens. Aujourd’hui, il y a des incompréhensions entre nous, mais nous finirons par nous entendre.

Avez-vous confiance dans la capacité d’IBK à mener à bien les missions qui lui sont confiées par les Maliens ?

Je n’ai jamais douté d’IBK. J’ai cru en lui au moment où peut-être d’autres personnes ne croyaient pas en lui. Je pense encore qu’il a des ressources, il a des capacités. Il a la méthode et le talent pour sortir le Mali de cette crise. Je crois en cela et je prie Dieu qu’il en soit ainsi. Si je ne croyais pas en lui, je n’allais pas voter pour lui ou demander à des gens de voter pour lui. Je crois en l’homme. Je peux peut-être ne pas être satisfait pour telle ou telle raison, cela peut arriver, mais je crois, je continue de croire qu’il peut conduire le bateau Mali à bon port.

Dernière question… quel message avez-vous à l’endroit des Maliens ? Quel conseil avez-vous pour le président IBK pour les quatre années à venir ?

Je n’ai pas la prétention de donner des conseils à tout le monde. Dans ce pays, il y a des personnes qui sont des maîtres à moi. Il y en a qui m’ont enseigné, il y en a qui sont mes aînés…d’autres qui sont mes parents. Donc, on ne peut prétendre donner de conseils à tout le monde. En ma qualité de Président du Haut Conseil Islamique, en porte-voix de la communauté musulmane du Mali, je peux me permettre de dire certaines choses. Il faut s’armer de plus de courage, de plus d’unité… C’est au moment des grandes épreuves que les grands hommes se révèlent. Le peuple malien est un grand peuple. La nation malienne est une grande nation, qui a traversé beaucoup de crises, qui a eu à faire face à beaucoup d’épreuves. Ce n’est pas la crise actuelle qui nous fera nous effondrer. Je crois en la capacité de notre pays de rebondir. Je pense que chaque fois que les Maliens se donnent la main, s’unissent…, ils peuvent vraiment relever beaucoup de défis.

Propos recueillis par Amadou Salif Guindo

Source: L’Enquêteur

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