« Gérer, c’est prévoir », a-t-on coutume de dire. Et « prévoir, c’est anticiper ». Cette vérité générale est très importante surtout s’il s’agit de la gestion de l’argent, et particulièrement de l’argent public. C’est ce qu’ont certainement compris les autorités de la transition, à travers son « argentier », le ministre de l’Economie et des Finances, Alousséni Sanou, qui a lancé les travaux de l’arbitrage politique pour le compte de l’année budgétaire 2023. C’était le jeudi,21 juillet 2022, à l’hôtel des finances.
La séance d’arbitrage politique du Budget d’Etat constitue un véritable dialogue de gestion entre le ministère de l’Économie et des Finances et les ministres sectoriels ainsi que les premiers responsables des Institutions et des autorités indépendantes. Elle a pour but d’affiner la qualité de la programmation budgétaire et d’accroître l’efficacité de la dépense publique de l’Etat. Ces rencontres permettent d’obtenir un consensus sur les allocations budgétaires prévues pour le budget 2023 dont il s’agira de confirmer ou pas les propositions retenues lors de l’arbitrage technique et éventuellement de partager avec le ministre de l’Economie et des Finances d’autres préoccupations afin d’apporter les solutions.
Des travaux qui débutent par un arbitrage dit technique
Cet arbitrage technique donne lieu aux discussions entre la Direction Générale du Budget, la Direction Nationale pour la Planification du Développement et les services de la primature, des différents Ministères ainsi que ceux des Institutions de la République et des Autorités Indépendantes. Chacun d’entre eux préparant ses propositions qui comprennent la reconduction des moyens indispensables au maintien des services publics, les souhaits de mesures nouvelles à mettre en place et pour lesquelles des moyens financiers supplémentaires sont nécessaires et/ou les propositions d’économies budgétaires.
La loi de finances de l’année, communément appelée budget de l’Etat, prévoit et autorise pour chaque année civile, l’ensemble des ressources et des charges de l’Etat. Ce budget constitue le principal instrument d’opérationnalisation des politiques publiques et reflète les priorités du Gouvernement en matière de recettes et de dépenses.
La séance d’arbitrage politique dite « ministérielle » fait suite à la première phase dite « technique »
Au terme de cette séance, prévue le 02 août 2022, le maximum de consensus obtenu permettra au ministère de l’Économie et des Finances d’élaborer l’avant-projet de budget d’Etat qui sera présenté au Premier ministre lors d’un Conseil de Cabinet organisé à cet effet. Ensuite, le projet de budget d’Etat sera présenté en Conseil des Ministres pour son adoption, et par la suite, il sera approuvé par le Conseil National de Transition au plus tard le 31 décembre 2022.
Les structures concernées par les séances d’arbitrage du projet de budget 2023 sont : la Présidence de la République, la Primature, les ministères, la Cour Suprême, la Cour Constitutionnelle, la Haute Cour de Justice, le Haut Conseil des Collectivités territoriales, le Conseil Économique, Social et Culturel, le Médiateur de la République, l’Agence Nationale de la Sécurité d’Etat, le Commissariat à la Sécurité Alimentaire, le Comité National de l’Égal Accès aux Médias d’Etat, la Cellule Nationale de Traitement des Informations Financières, l’Autorité de Protection des Données à Caractère Personnel, l’Office Central de Lutte Contre l’Enrichissement Illicite, le Bureau du Vérificateur Général, la Haute Autorité de la Communication, la Commission Nationale des Droits de l’Homme, le Délégué Général aux Elections, l’Autorité de Régulation des Marchés Publics et des Délégations et Service Public, les Gouverneurs des Régions du Mali et du District de Bamako.
Par ailleurs, le document de programmation budgétaire et économique pluriannuelle sur la période 2023-2025 a fait l’objet d’un débat d’orientation
C’était le jeudi 23 juin 2022 au Centre International des Conférences de Bamako sous la présidence du ministre des Mines, de l’Energie et de l’Eau, Lamine Seydou TRAORE, assurant l’intérimaire du ministre de l’Économie et des Finances, Alousséni SANOU. La rencontre a aussi enregistré la présence du 1er vice-président du Conseil National de Transition (CNT) etdu Président de la Commission des Finances, de l’Économie, du Plan, de la Promotion du Secteur Privé, des Industries et des Mines et de plusieurs membres du CNT. « L’élaboration et l’adoption par le Gouvernement du document support du DOB se sont déroulées dans un contexte particulier marqué notamment par la persistance de la crise multidimensionnelle, la fixation de la durée de la transition, à 24 mois pour compter du 26 mars 2022, conformément au décret n°2022-0335/PT-RM du 6 juin 2022, les sanctions économiques et financières injustes des organisations sous-régionales contre le Mali depuis le 09 janvier 2022, la guerre en Ukraine avec comme corollaire la flambée de prix des produits de base notamment les produits alimentaires et les hydrocarbures. Au même moment et grâce aux engagements des plus hautes autorités de la Transition, nous assistons à la montée en puissance des Forces Armées Maliennes (FAMa) qui poursuivent la reconquête du territoire ainsi que la sécurisation des populations et de leurs biens. Malgré toutes ces contingences, le Gouvernement a tenu à organiser le DOB dans le délai prescrit par la loi, c’est-à-dire au plus tard à la fin du deuxième trimestre de l’année. Ceci dénote de l’engagement du Gouvernement à respecter les standards internationaux de bonne gouvernance et de transparence dans la gestion des deniers publics. » a expliqué Lamine Seydou TRAORE lors de la cérémonie d’ouverture.
Le Débat d’Orientation Budgétaire permet donc, sur la base d’hypothèses économiques précises et justifiées, d’analyser le document de programmation budgétaire et économique pluriannuelle (DPBEP) sur la période 2023-2025. Ce document évalue le niveau global des recettes attendues de l’État par grandes catégories d’impôts et de taxes et les dépenses budgétaires par grandes catégories de dépenses, indique l’évolution de la dette du secteur public et fixe les objectifs d’équilibre budgétaire et financier sur le moyen terme.
« Le cadrage budgétaire 2023-2025, retient un scénario de croissance du produit intérieur brut (PIB) de 5,2 % en moyenne sur la période, avec un objectif de déficit budgétaire fixé en moyenne à 3,7% sur la période, légèrement supérieure à la norme communautaire de l’UEMOA qui est de 3% et il est attendu un retour à la norme communautaire à partir de 2025. Pour respecter la trajectoire, tous les leviers doivent être utilisés, le budget de l’Etat comme celui de la sécurité sociale, les recettes comme les dépenses » a déclaré le Ministre.
Lamine Seydou TRAORE a , au nom de son collègue ministre de l’Économie et des Finances, exhorté les membres du CNT à émettre leurs observations et recommandations afin que le débat soit à la hauteur des attentes des populations dans le cadre de l’amélioration de la sécurité sur l’ensemble du Territoire national, de la mise en œuvre des réformes politiques et institutionnelles ; de la transparence et de la réduction du train de vie de l’État, de la mise en œuvre intelligente et efficiente de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali, de la consolidation des acquis des secteurs sociaux ainsi que le financement des investissements structurants dans les domaines de l’énergie, des infrastructures routières, de la protection de l’environnement et de l’agriculture.
Le ministre a félicité l’ensemble des membres du CNT notamment ceux de la Commission des Finances, de l’Économie, du Plan, de la Promotion du Secteur Privé, des Industries et des Mines pour leur mobilisation constante en faveur d’une meilleure gestion des finances publiques.
Enfin, Lamine Seydou TRAORE a remercié l’ensemble des Partenaires Techniques et Financiers pour leur soutien au processus de modernisation de nos finances publiques et leur accompagnement constant dans notre lutte contre la pauvreté à travers la mise en œuvre du Cadre Stratégique de Relance Économique pour le Développement Durable (CREDD).
Le vice-président du Conseil National de Transition et la Président de la Commission des Finances, de l’Économie, du Plan, de la Promotion du Secteur Privé, des Industries et des Mines ont salué la bonne relation de travail qui existe entre le CNT et le ministère de l’Économie et des Finances et réitéré leur engagement à jouer pleinement leur rôle dans le cadre d’une gestion efficace et efficiente des finances publiques.
Lors des travaux, des membres du CNT ont été édifiés, entre autres, sur l’état de mise en œuvre de la réforme Budgétaire au Mali, les hypothèses du cadrage budgétaire 2023 – 2025, les objectifs de la politique budgétaire, ses contraintes, les orientations prioritaires ainsi que les projections de charges et de ressources.
Qu’est ce que le document de programmation budgétaire et économique pluriannuelle (DPBEP) ?
La loi N°2013-028, modifiée, portant loi des finances, dans son article 51 annonce que le projet de loi de finances de l’année est élaboré par référence à un Document de Programmation Budgétaire et Economique Pluriannuelle couvrant une période minimale de trois ans. Conformément aux textes de gestion des finances publiques, notamment la Loi n°2013-031 du 23 juillet 2013 portant Code de Transparence dans la Gestion des Finances Publiques en son paragraphe 2.4 et la Loi N°2013-028 du 11 juillet 2013 modifiée relative aux lois de finances en son article 56, ce Document de Programmation Budgétaire et Économique Pluriannuelle (DPBEP) est adopté en Conseil des ministres avant d’être soumis au débat d’orientation budgétaire à l’Assemblée nationale, au plus tard à la fin du deuxième trimestre de l’année. Il permet au Gouvernement d’informer l’Assemblée Nationale sur l’évolution des finances publiques et de partager les objectifs, les orientations et les contraintes de la politique budgétaire à moyen terme. Cette programmation, qui s’étend sur la période 2023-2025, s’appuie sur les orientations stratégiques définies dans le Cadre Stratégique pour la Relance Economique et le Développement durable, les actions contenues dans le Programme d’Actions du Gouvernement de Transition adopté par le Conseil national de Transition et les recommandations des Assises Nationales de la Refondation. Le DPBEP est établi sur la base d’une prévision de croissance réelle de 5,3% en moyenne entre 2023 et 2025 et un taux de pression fiscale en moyenne de 16,6%.
Sur la période 2023-2025, la politique budgétaire sera soumise à des contraintes multiples, notamment la nécessité de se conformer aux critères de convergence communautaire de l’UEMOA et de la CEDEAO ainsi que la mise en œuvre des engagements pris avec le Fonds Monétaire International dans le cadre du Mémorandum de Politiques Economiques et Financières.
Les dépenses seront orientées vers la prise en charge des engagements du Gouvernement pour lesquels la priorité sera accordée, en termes d’allocations budgétaires, tels que la poursuite du renforcement des capacités opérationnelles des forces de défense et de sécurité ; l’organisation des élections générales ; le renforcement du système judiciaire ; le maintien des efforts budgétaires en faveur de l’agriculture et de l’investissement ; le renforcement des dépenses sociales et de développement prioritaire ; l’amélioration des conditions de vie des travailleurs ; l’opérationnalisation des nouveaux services publics issus des nouvelles régions ; la contribution budgétaire de l’Etat à la mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la
Réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger ; l’amélioration de la déconcentration et de la décentralisation budgétaire.
Al-Hassan Bah
Luc Sidibé
Source: Le National