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L’incroyable histoire de l’étudiante de l’Ucad amoureuse d’un soldat de Boko Haram

Libération révèle que la Division des investigations criminelles (DIC) a frappé au cœur d’un réseau terroriste présumé en enquêtant sur une affaire de trafic d’êtres humains vers la Lybie. Au cœur de cette affaire, on retrouve Mame S. D, étudiante en première année au département Arabe de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar et son frère, Adama S. D., étudiant en licence I Comptabilité à l’ITECOM. L’étudiante était par ailleurs la fiancée de Mohamed M., un combattant de Boko Haram proche de Makhtar Diokhané qui a été arrêté récemment par la Section Recherches de Dakar.

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Le dispositif mis en place par le Sénégal pour faire face au terrorisme a encore payé. Et on peut dire sans risque de se tromper que la Section recherches de Dakar et la Division des investigations criminelles (DIC) ont frappé tour à tour dans le même réseau.

Il y a de cela quelques jours, la Police judiciaire sénégalaise a reçu des renseignements faisant état d’un réseau d’émigration clandestine vers l’Europe, entre le Sénégal, le Mali, le Niger et la Libye. Parmi les membres du réseau figurent la dame Mame S. D. et son frère Adama S. D., domiciliés à la Cité Soprim de Dakar et en relation avec leur frère Saliou, alias Baye Zale, basé en Libye.

Le mode opératoire est rôdé. Mame S. D. reçoit auprès des familles des candidats de l’argent qu’elle transmet aux passeurs associés à son frère, Baye Zale, et jalonnant le parcours du voyage.

Par ailleurs, la source a révélé que Mame S. D. était fiancée avec le djihadiste Mouhamed M. Ce dernier ferait partie d’un groupe de jeunes combattants sénégalais de Boko Haram qui avait quitté le Niger pour rejoindre le terroriste présumé Makhtar Diokhané qui a été extradé vers le Sénégal et écroué depuis.

Pour découvrir la vérité, mission a alors été donnée aux éléments du Groupe de Recherches et d’Interpellations (GRI) de recouper lesdites informations. Au terme des vérifications, il a été établi de manière formelle que la dame Mame S. D., qui porte le voile, et son frère Adama S. D., tous deux étudiants, sont effectivement impliqués dans le réseau d’émigration clandestine vers l’Europe via la Libye, entretenu par leur frère Baye Zale. Ils se chargent régulièrement de réceptionner, notamment directement à leur domicile, des fonds versés pour le compte des candidats qu’ils renvoient à des tiers sur instructions de Baye Zale, via les sociétés de transfert d’argent.

Le 15 juin dernier, tôt le matin, les mis en cause ont été appréhendés à leur domicile et la perquisition effectuée a permis de saisir notamment des ordinateurs et téléphones portables qui ont été mis à la disposition de la Brigade spéciale de lutte contre la cybercriminalité (BSLC) pour exploitation, des reçus d’envoi et de réception d’argent, et plusieurs documents rédigés en arabe.

Ils se disent être des ‘’Akhlou Souna’’ mais…

Conduits à la DIC et interrogés sous le régime de la garde à vue, Mame Sow D. et son frère Souleymane D. se disant des «Akhlou Souna»- c’est-à-dire ayant pour seule et unique référence le Prophète (PSL)-, ont reconnu avoir été sollicités régulièrement depuis 2015 par leur demi-frère, parti en Libye deux ans plus tôt, mais présentement en Algérie, pour réceptionner des envois d’argent dont les montants varient entre 200 000 et 1 000 000 FCFA.

En dehors de la prise en charge des dépenses familiales, ils réacheminaient ces montants au profit de tierces personnes, associées à leur frère mais qui leur sont inconnues. Ces destinataires des transferts de fonds, selon la version des mis en cause, résident au Niger, au Mali et au Burkina Faso. Interpellés sur l’identité des expéditeurs et des bénéficiaires des fonds en question, Mame S. D. a déclaré ne pas s’en souvenir car c’est son frère (Baye Zale) qui l’appelait via les applications WhatsApp et Viber pour lui communiquer ces informations et notamment l’utilisation qui devait être faite des fonds.

Des manuscrits sur la libération des étudiantes de Cheybook au Nigeria découverts lors des perquisitions

Quant à Souleymane D., il a précisé qu’il a commencé à travailler pour le compte de son frère dans le courant de l’année 2017. La seule personne à qui il a envoyé de l’argent sur ses instructions se nomme Y. A. Wahab, son principal partenaire vivant à Bamako ou à Niamey et les sommes variaient entre 500 000 et 1 000 000 FCFA.

D’après leur frère, cet argent était versé par des candidats au voyage pour l’Europe ou par leurs proches, et il servait à couvrir leurs frais de transport et de nourriture en terre libyenne. Ils ont soutenu qu’ils percevaient de modiques sommes en guise de commission variant entre 2500 et 10 000, rarement 50 000 FCFA. Déclarant ignorer que leur frère, qui se disait cambiste, était impliqué dans un réseau d’émigration clandestine jusqu’à un passé récent, quand ils ont reçu des coups de fils d’individus appelant d’Italie et qui remerciaient vivement Baye Zale de les avoir aidés à regagner l’Europe.

Sommés de s’expliquer sur les documents en Arabe trouvés lors de la perquisition, ils ont expliqué qu’il s’agit de supports didactiques pour leurs études. En outre, Mame S. D. a souligné que le manuscrit relatif à la libération des étudiantes de Cheybook au Nigeria provient de son brouillon lors des examens de l’année dernière à l’UCAD. Des déclarations qui n’ont pas convaincu les enquêteurs.

Par ailleurs, les nommés Souleymane D. et Mame S. D ont confirmé connaître le nommé Mouhamed M., un proche de Makhtar Diokhané, présumé djihadiste présentement en détention pour activités liées au terrorisme. Ils ont précisé qu’il a eu à leur enseigner le Coran avant de partir en République de Guinée. Mame S. D. a juré que Mouhamed M. et elle se seraient mariés s’il n’y avait pas eu de divergences entre les deux familles sur le montant de la dot.

A signaler que ce dernier, qui ferait partie du groupe de combattants sénégalais de Boko Haram qui avaient quitté le Niger pour rejoindre Makhtar Diokhané au Sénégal, a récemment été arrêté par la Section de recherches de la gendarmerie.

Son fiancé, Mohamed M., combattant de Boko Haram arrêté par la Section de recherches

Interpellés sur les relations supposées entre leur frère, basé en Algérie selon leurs dires, et le présumé djihadiste Mouhamed M., ils ont confirmé qu’ils se connaissaient et qu’ils ont même séjourné ensemble en Mauritanie en2015pourparfaire leur apprentissage de la religion musulmane.

Souleymane D. a ajouté qu’en 2015, alors qu’il venait d’adhérer au Mouvement «Akhlou Souna», Mouhamed M., après une longue absence est réapparu en lui disant qu’il était parti en Mauritanie pour des études islamiques qui lui ont permis de mieux comprendre la pratique de la religion. Il se serait donc radicalisé après ce séjour parce qu’il lui vantait souvent les mérites du Djihad à l’occasion de ses prêches.

Après le départ de Mouhamed M. en Guinée, il a découvert son vrai visage et s’est estimé heureux de n’être pas tombé dans le piège de la propagande djihadiste qu’il lui tendait à travers son discours, a-t-il ajouté. N’empêche, malgré les multiples indices graves et concordants les deux mis en cause présumés ont été mis à la disposition du parquet de Dakar.

 

Cheikh Mbacké Guissé – Libération

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