« Les rebellions récurrentes dans l’Adrar des ifogas, région de Kidal », tel était le thème d’une conférence débat organisée le samedi 21 décembre 2013 à la Maison de la presse de Bamako par la Coordination malienne des organisations démocratique (Comode). Cette conférence était animée par l’ancien premier ministre du Mali, Ahmed Mohamed Ag Hamani et le Pr Naffet Keïta, en présence du président de la Comode Ali N Diallo et de nombreuses autres personnalités. Le conférencier Ag Hamani a sans ambages affirmé que si le dialogue échoue avec le Mnla, la solution militaire devient malheureusement inévitable. Avant de préciser que le Mnla est une milice armée qu’il faut démanteler faute de quoi, il n’y’aura pas de paix au Mali. Mais selon d’’autres intervenants à l’instar de l’ancien ministre des Affaires étrangères Tiebilé Dramé, la récupération de Kidal est possible par le dialogue dans le cadre du consensus international matérialisé par l’accord de Ouagadougou. Pour lui, toute solution militaire en l’état actuel de notre armée serait hasardeuse.
Plusieurs personnalités ont pris part à cette conférence débat dont certains anciens premier ministre du Mali, le représentant de la Cedeao, Cheaka Aboudou Touré, le représentant du secrétaire général de l’Onu, les représentants des partis politiques et bien d’autres. Dans son speech, le président de la Comode, Ali N Diallo a fait savoir que la souveraineté du Mali ne s’exerce pas de façon pleine et entière dans la région de Kidal.
Selon lui, malgré la présence de la force Serval, de la Minusma, de l’armée malienne, deux journalistes français ont été assassinés, trois ministres maliens chahutés, le premier ministre malien empêcher d’atterrir sur le tarmac de Kidal. « Tous les touareg du Mali ne sont pas des rebelles. Cependant toutes les rebellions déclenchées au Mali l’ont été par des maliens principalement originaire de l’Adrar des Ifogas », a-t-il dit. Le conférencier Ag Hamani, a axé son exposé sur l’historique des rebellions au Mali, le statut de Kidal, l’analyse des différentes crises et des propositions de sortie de crise.
Selon lui, le Mali a connu, de l’indépendance à nos jours, quatre épisodes de rébellion, à savoir : 1962-1964, 1990-1994, 2006 et 2012. Il a fait savoir que la région de Kidal a été créée à la suite des accords de Tamanrasset mais qui n’a pas connu tout récemment le même schéma de libération que Gao et Tombouctou. Ag Hamani a souligné que malgré la présence française et la Minusma, Kidal demeure sous le contrôle du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (Mnla) en violation flagrante de l’intégrité territoriale du pays.
Pour le conférencier, le règlement des crises ont été marquées par l’impunité. Comme proposition de sortie de crise, il a suggéré le démantèlement de toute les milices armées à caractère ethnique, raciale ou régionaliste ; la coopération des pays du champ, de la France, de l’Union Européenne, de l’union Africaine, des Nations unies, de la Cedeao pour exercer une pression sur le Mnla et ses alliées afin de libérer les zones occupées et procéder à un désarmement total. «Si le dialogue échoue avec le Mnla, la solution militaire devient malheureusement inévitable. Le Mnla est une milice armée qu’il faut démanteler si non, il n’y’aura pas de paix au Mali», a-t-il dit. Avant de souhaiter le renforcement des moyens matériels et militaires de l’armée malienne et de la Minusma pour la sécurité des personnes et de leurs biens.
L’ancien premier ministre a fait savoir que l’exploitation des ressources naturelles est synonyme de développement. « Le Mali doit se doter d’un observatoire pour la prévention des crises et l’élaboration des stratégies pour corriger les effets négatifs », a-t-il conclu. Le deuxième conférencier Naffet Keïta a apporté des éclaircissements. Au total plus d’une dizaines de personnes ont fait des interventions pertinentes. Et les avis sont souvent divergents. Pendant que certains prônent le règlement de la situation de Kidal par le dialogue à l’intar de l’ancien ministre Tiébilé Dramé d’autres dont l’ancien ministre Choguel K Maïga envisage l’option militaire.
« L’accord de Ouagadougou a permis de tenir l’élection présidentielle, mais ce n’est pas que ça. Il traduit le consensus international et reconnait l’intégrité territoriale, l’unité nationale et la forme républicaine de l’Etat, le redéploiement de l’armée et de l’administration. Mais l’accord n’a pas été mis en œuvre par toutes les parties prenantes… Il faut que cet accord soit appliqué dans son entièreté par les acteurs », a dit Tièbilé Dramé. Le Pr Amadou Seydou Traoré (Seydou Djicoroni) a indiqué que la priorité d’aujourd’hui est la libération de Kidal. Dr Mariam Djibrilla Maïga a souligné que les femmes doivent jouer leur rôle d’éducatrice et de sensibilisation. L’honorable Assarid Ag Imbarcawane a rappelé que l’Etat n’a pas été vigilant pour empêcher les rebellions. « Les touareg doivent se démarquer officiellement des rebellions car le sous-développement ne doit pas être un prétexte pour prendre les armes », a dit un participant nommé Younoussa Touré
La Comode projette une marche pacifique le dimanche 29 décembre, du monument de l’indépendance à la primature, et une conférence de presse le lundi 30 décembre prochain, pour la libération de Kidal.
Aguibou Sogodogo
* Assarid Ag Imbarcaouane, député réélu à Gao / « La création du réseau et du Mnla sont à la base de la rébellion de 2012 »
Lors du débat organisé le 21 décembre à la Maison de la presse par la Coordination malienne des organisations démocratiques, sur « les rebellions récurrentes de l’Adrar des Ifoghas », le conférencier Ahmed Mohamed Ag Hamani a situé l’origine de toutes les rebellions du Mali dans l’Adrar des Ifoghas, région kidaloise. Cette démonstration a été contestée par un intervenant du nom de Mahmoud Cissé, qui se referait à une présumée déclaration de Assarid Ag Imbarcaouane, un député touareg, vice président de l’Assemblée nationale. Selon Mahmoud le député aurait déclaré un jour que la rébellion de 2012 était partie de Bamako et non de Kidal. En effet, poursuit Mahmoud Cissé, au Mali, il ne devrait pas y avoir un problème de réconciliation nationale, et le ministère de la réconciliation nationale et du développement des régions du nord serait inutile.
Et Mahmoud de poursuivre en interpellant Assarid « il serait bien que Assarid Ag
Imbarcawan dise de qui à Bamako, la rébellion actuelle est partie ». Assarid Ag Imbarcaouane qui n’est pas du genre à fuir le débat s’est rappelé s’être expliqué sur la naissance de la rébellion, mais son propos n’a-t-elle pas été déformé ? « Je ne crois pas avoir dit que la rébellion était partie de Bamako, mais je me rappelle avoir dit qu’il y a des actes qui ont contribué à la rébellion », selon le député Adema-Pasj, fraichement réélu à Gao. Assarid a indiqué que la création du réseau [Réseau de plaidoyer pour la paix, la sécurité et le développement au Nord Mali] et du Mnla, qui disposent tous de récépissé, a alimenté les sources de la rébellion de 2012. Et les autorités de Bamako en ont été informées à temps. « Nous avons alerté sur le fait que ces gens ont un drapeau, qu’il y a un drapeau qui flotte et qui n’est pas celui du Mali ». Comme toute réponse, les autorités ont préféré attendre de voir. Et voilà !
* Ali Nouhoum Diallo, ancien président de l’Assemblée nationale / « Je n’ai pas dit qu’on a eu tort de signer l’accord de Ouagadougou »
-Au cours de la conférence-débat que son organisation, la Comode a organisée samedi à la Maison de la presse, et à laquelle ont participé des anciens Premier-ministres, de nombreux anciens ministres et personnalités de la république, Ali Nouhoum Diallo a démenti un propos qu’on lui a prêté dans la presse, la semaine dernière et qui avait pris l’allure d’un choux gras. Selon Ali Nouhoum Diallo, son propos tenu lors des assises sur le nord ou les états généraux de la décentralisation, a été mal compris ou interprété autrement.
En réalité, il avait évoqué ce qui s’est passé pendant 10 ans, à partir de 1992, alors secrétaire politique de l’Adema-Pasj, parti au pouvoir dont il a assumé les actes. Cependant il n’a pas apprécié qu’il soit accepté dans l’accord l’usage de « Azawad ». Cette partie est appelée par le gouvernement du Mali, « les régions nord », et il convenait que les deux parties décident de dire « des régions du nord ». Mais le doyen Ali Nouhoum s’avise en disant que ce ne devait pas être un motif de blocage à la signature de l’accord car le bain de sang pouvait continuer, si on ne signait pas. « Notre faiblesse est venue du fait que nous n’avons pas arrêté et condamné quiconque appellera ces régions ‘’Azawad’’. En les appelant ainsi, nous contribuons dans la promotion de la rébellion. J’ai dit qu’il faudra trouver le moyen de ne plus utiliser ces appellations comme ‘’Azawad’’. On m’a attribué de dire que nous avons eu tort de signer l’accord de Ouagadougou. Qu’on cesse de m’attribuer ça, on ne pouvait pas ne pas le signer », a indiqué Ali Nouhoum Diallo.
Tiebilé Dramé, président du Parena / « Il y a une possibilité de récupérer Kidal par le dialogue »
Tiebilé Dramé, celui là même qui a négocié et signé l’accord de Ouagadougou, en prenant le risque de prendre langue avec les groupes armés n’est pas passé par quatre chemin pour tirer son chapeau à la France et écarter toute solution militaire en vu de la libération de Kidal. Un accord qui fait l’objet de consensus international existe et il ne faut pas le gaspiller, il doit être appliqué puisqu’il ne l’a jamais été quoiqu’il soit la solution à tous nos problèmes concernant l’exercice de la souveraineté malienne à Kidal.
Pour l’ancien ministre des Affaires étrangères Tiebilé Dramé, il y a un an jour pour jour, le 21 décembre 2012, notre pays était plongé dans une nuit noire, sans perspectives, sans espoir. L’armée malienne n’était pas à mesure de faire face à la situation, elle s’était effondrée. Il a fallu l’intervention de la France pour libérer le pays, a rappelé Tiebilé Dramé. « Si nous exprimons notre insatisfaction, nous devons dire aussi notre reconnaissance à la France », poursuit-il. Cette insatisfaction tient du fait que Gao, Tombouctou ont été libérés mais pas Kidal, qui échappe à notre contrôle et cela avait commencé sous ATT. Pour ramener Kidal dans le giron malien, il y a deux options, la guerre ou la négociation. Il faut négocier selon Tiebilé Dramé. Un accord a été signé à Ouagadougou et qui fait l’objet d’un consensus international. L’accord préliminaire de Ouagadougou est réduit par certains à la seule tenue de l’élection présidentielle, alors qu’il la dépasse et comprend l’unité nationale, l’intégrité territoriale, la forme républicaine et laïque de l’Etat, le redéploiement de l’armée et de l’administration dans toutes les régions du Mali. Mais cet accord qui n’a pas été mis en œuvre par toutes parties prenant doit l’être. Les groupes armés cantonnés devaient être désarmés. On les a laissé au lieu de battre le fer quand il était chaud. Tiebilé Dramé a parlé du retour des Commandants d’Ansadine à Kidal pour être candidat aux élections législatives. Conséquences, les ministres maliens, le Premier ministre ne peuvent pas se rendre à Kidal. « Il faut résoudre le problème de Kidal », et vu l’état de notre armée, avec trois bataillons, l’option militaire serait hasardeuse, selon lui. « Il ne faut pas gaspiller le consensus international autour de Kidal. Il y a une possibilité de récupérer Kidal par le dialogue », selon Tibilé Dramé.
* Soumana Sako, président de la Cnas-Fh / Il faut démanteler la féodalité de la famille Intalla et neutraliser Iyad Ag Ghaly
Pour l’ancien Premier ministre et président de la Cnas-Fh, Soumana Sako, la libération de Kidal est une urgence et elle passe par le démantèlement de la féodalité assise et entretenue par la famille Intalla.
Le mal persistera tant qu’on n’aura pas réussi à démanteler cette famille féodale. Mais ce n’est pas tout. L’autre problème est aussi de taille, autant que le premier : c’est Iyad Ag Ghali. Pour Soumana Sako, « il faudra neutraliser ce Iyad Ag Ghali ». C’est la France qui a débauché Najim pour venir former la branche armée du Mnla, indique –t-il. Soumana Sako ne tergiverse pas sur le maintien de la forme unitaire de l’Etat : oui à la décentralisation, mais non à toute forme d’autonomie, affirme-t-il.