Monsieur le Président,
Je voudrais vous féliciter pour votre réélection à la magistrature suprême de la République française.
Ce nouveau quinquennat représente à mes yeux une opportunité pour réorienter les relations de votre pays avec ses partenaires d’Afrique. Une amélioration des relations, de nouveaux liens avec l’Afrique francophone et anglophone que vous appeliez déjà de tous vos vœux dans votre discours prononcé en 2017 à l’Université de Ouagadougou.
Cinq ans plus tard, vous conviendrez qu’il y a encore du chemin à parcourir pour rompre avec les traumatismes du passé. Vous me permettrez de faire l’économie du contexte tendu et délétère qui prévaut aujourd’hui entre la France et nombre de pays africains, dont le mien, le Mali.
Ces soubresauts, j’en suis convaincu, n’ont pas altéré votre volonté d’aller de l’avant, ni celle, sur le continent, de tous ceux qui aspirent à des relations décomplexées, franches, respectueuses, égalitaires et mutuellement profitables entre la France et les pays africains.
J’en fais partie. C’est pourquoi, sans prétention, je voudrais faire des propositions, en portant la voix de nombreux Maliens de ma génération qui refusent de jeter le manche après la cognée.
Il me semble primordial de dénouer la crise diplomatique et de rétablir un dialogue franc, sincère et surtout d’égal à égal dans l’intérêt de nos deux peuples. À cet égard, je propose de rétablir la coopération technique et économique entre la France et le Mali. Je salue du reste le maintien de la coopération culturelle et la volonté de poursuivre l’accompagnement du peuple malien par l’entremise des Organisations de la Société Civile.
Mon pays, mon peuple, a besoin de partenaires avec lesquels les relations sont mutuellement bénéfiques. Cela ne peut se faire que si le partenariat permet d’exprimer nos divergences de points de vue dans le strict respect des codes de la diplomatie et s’il tient compte des aspirations des différents peuples et de leur diaspora.
Une implication inclusive de la société civile malienne dans les processus de développement et de promotion de la démocratie et de l’Etat de droit devrait se faire en bonne intelligence et de manière transparente.
L’aide au développement devrait être transparente pour les populations maliennes et les contribuables français. Elle serait mieux servie par un mécanisme de redevabilité pour mieux évaluer son efficacité.
Le secteur privé ne doit pas être en reste dans le renforcement des relations de coopération économique entre votre pays et l’Afrique en général et le Mali en particulier.
Rétablir une communication directe avec nos autorités, selon les codes de la diplomatie, malgré les antécédents serait un symbole de grandeur.
Je vous exhorte à prendre la hauteur nécessaire pour écouter et entendre nos vérités, qui peuvent être en dissonance avec les vôtres, mais qui sont souvent le fruit de frustrations et parfois d’incompréhensions.
Les relations durables et productives sont fondées sur des vérités et la capacité de compréhension de leurs origines, même si elles sont parfois difficiles à entendre.
Les autorités sont toujours temporaires, mais les peuples sont permanents
Nous devons apprendre de notre coopération en acceptant chacun de se remettre en cause, pour réussir notre destin commun inéluctable : réussir le développement économique et social, faire face au terrorisme et à la recrudescence de la criminalité et des violations des droits humains, mieux répondre aux défis environnementaux, maîtriser la démographie, créer de l’emploi décent pour les jeunes et accompagner nos États à s’affranchir progressivement de l’aide et à s’industrialiser. La finalité est d’assurer le mieux-être de nos populations respectives et leur épanouissement.
Je ne doute guère que nos relations finiront par être normales, vu les enjeux géopolitiques et géostratégiques du moment. J’attire votre attention sur le fait que les autorités, quel que soit leur mode d’accession au pouvoir, sont toujours temporaires, à la différence des peuples qui, eux, sont permanents. Leur bien-être devrait donc être notre seule boussole.
Parfois en temps de crise, les voix qui portent ne sont pas celles qui font le plus de sens. Il faut beaucoup d’attention et de sagesse pour entendre le silence parfois assourdissant de la grande majorité.
Je vous exhorte à rétablir la coopération avec notre pays au profit de nos peuples et à plaider auprès des institutions régionales et internationales à faire de même pour alléger les souffrances du peuple malien.
Monsieur le Président de la République, je vous réitère mes sincères félicitations et espère que ces mots du citoyen malien d’Afrique que je suis, qui croit en l’ouverture et en la force positive du partenariat respectueux et mutuellement bénéfique entre les États et leurs peuples, trouveront écho auprès de vous.
Veuillez agréer, Monsieur le Président de la République, les assurances de mes salutations distinguées.
Tidiani TOGOLA, Fondateur et CEO
Tuwindi, Baco Djicoroni ACI, Bamako
Source: Le Challenger