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Les magistrats réagissent au discours d’IBK: « La Justice a besoin de moyens, pas de mépris dans sa souffrance »

Le Syndicat Autonome de la Magistrature (SAM) et le Syndicat Libre de la Magistrature (SYLIMA) ont suivi avec déchirement le discours à la Nation du 09 juillet 2020 de Son Excellence Monsieur Ibrahim Boubacar KEITA, Président de la République du Mali et Président du Conseil Supérieur de la Magistrature, diffusé sur les antennes de l’Office de Radiodiffusion Télévision du Mali (ORTM).

En effet, lors dudit discours, le Président de la République a soutenu qu’il s’est mis d’accord avec son Premier Ministre de la nécessité de concevoir et de proposer un Accord Politique de Rassemblement National allant jusqu’en 2023 et qui reposera sur quatre idées dont la dernière consiste à «…veiller à une saine distribution de la dans toutes les juridictions… ».

A cet égard, le Président de la République a affirmé que : « Nous savons que ce pays crie depuis longtemps sa soif de justice.» ; que «…nous savons hélas que l’engouement des populations pour la justice expéditive des pseudos djihadistes s’explique par le rejet de la justice d’Etat avec ses tares qui lui sont connues dont la corruption et la durée des procédures ».

Le SAM et le SYLIMA font tout d’abord observer que la Justice, véritable service régalien de l’Etat, est une institution républicaine et apolitique indéfectiblement attachée à la réserve qui en assure la crédibilité dans son office au nom du Peuple pour la préservation et le rétablissement de la paix sociale.

Ensuite, les Syndicats de magistrats rappellent à l’opinion nationale et internationale que le Mali est l’un des rares pays au monde à n’accorder que moins d’un pour cent de son budget au secteur de la justice.

Egalement, ils portent à la plus haute attention de Monsieur le Président de la République, Président du Conseil Supérieur de la Magistrature, que les magistrats maliens, qui travaillent dans des conditions sinon inhumaines du moins dégradantes et qui vivent dans une précarité criante soigneusement entretenue, attendent depuis plus d’une année sa main tendue pour donner suite au mouvement de grève de 100 jours que l’institution judiciaire a connu et dont les risques de réitération sont malheureusement plus que réels à la date d’aujourd’hui.

Enfin, le SAM et le SYLIMA rappellent au Peuple que la volonté de faire passer la justice pour l’institution incarnant la corruption au Mali est une diversion qui ne saurait convaincre d’autant que pas un seul juge n’a été épinglé pour des faits d’atteinte aux biens publics par les nombreux rapports de vérification des structures de contrôle de la gestion des finances publiques dans notre pays. Au contraire, seuls occupent ce créneau les politiques qui, pour l’occasion, privilégient les ententes pour entretenir et favoriser l’impunité au moyen de privilèges et immunités savamment ourdies contre l’intérêt général. La Haute Cour de Justice n’a jamais tenu de procès malgré qu’il n’ait jamais manqué de justiciables et l’immunité parlementaire passe aujourd’hui pour une couverture, les demandes de levée de la mesure restant le plus souvent sans suite, ou sans suite favorable.

Le Syndicat Autonome de la Magistrature (SAM) et le Syndicat libre de la Magistrature (SYLIMA) déplorent que les propos sus-spécifiés émanent de celui-là même qui est le garant constitutionnel de l’indépendance du Pouvoir Judiciaire d’autant que lesdites affirmations jettent injustement l’anathème sur une institution qui n’a jamais retenu l’attention requise des décideurs dans notre pays. Ils rappellent gravement au monde politique que toute idée de bâtir le Mali qui ne reposerait pas sur une Justice réellement indépendante tant sur le plan fonctionnel que surtout financier aboutirait toujours à décrédibiliser l’Etat et à davantage rompre la confiance entre les gouvernants et les gouvernés.

La Justice a besoin de moyens, pas de mépris dans sa souffrance. Elle en appelle à ce que les nombreux obstacles, dressés par devant elle, soient levés afin de lui permettre de répondre convenablement aux aspirations du vaillant peuple malien qui n’aspire qu’à la paix et au développement.

Le SAM et le SYLIMA invitent les membres de la famille judiciaire, en général, et les magistrats, en particulier, à la cohésion et à la vigilance, dans une République qui désigne gratuitement l’institution judiciaire comme seule responsable de ses difficultés.

Bamako, le 09 juillet 2020.

P/le Comité Directeur du SAM

Le Président

Mamoudou KASSOGUE

P/le Bureau Exécutif du SYLIMA

Le Président

Hady Macky SALL

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