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Les coups de la vie : j’ai passé l’âge d’avoir un père !

Je me nomme Thierry. Je travaille comme sous-directeur adjoint dans une grande entreprise de la place. Ma réussite je la dois à un grand homme, un homme bon et généreux qui s’est sacrifié pour mon bonheur. Il y a une trentaine d’années, ma mère travaillait comme servante chez cet homme que je nommerais mon parrain.

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Elle était la nounou de ses enfants. D’après ce qu’on m’a dit, elle était d’une très grande beauté. Elle avait fui sa famille pour échapper à un mariage forcé et avait donc eu la chance de tomber sur ce charmant couple qui l’a adoptée. Les enfants du couple l’adoraient. Elles préféraient même la compagnie de ma mère à celle de leur propre mère qui travaillait énormément. Ma mère était tellement bien traitée que certains pensaient qu’elle était de la famille de mon parrain. Ses propres parents qui étaient du nord du pays n’ont jamais su ou elle était. Elle est restée dans cette famille pendant 14 ans. A l’âge de 29 ans, ma mère est tombée enceinte. Les choses ont mal tourné pour elle. Mon parrain et son épouse voulaient savoir qui était l’auteur de la grossesse. Maman refusait de dévoiler son nom. Les mois passaient et ma mère ne parlait toujours pas. Le couple a commencé à se disputer car la femme de mon parrain soupçonnait son mari, qui était plus conciliant avec elle. Pour ne pas briser le couple, elle s’est décidée à parler. C’était le meilleur ami et le voisin de mon parrain. Les deux couples passaient beaucoup de temps ensemble et leurs épouses étaient de grandes copines .Comment régler le problème ? La femme de mon parrain était furieuse. Elle menaçait même de renvoyer ma mère. Pour elle, c’était une trahison, car Tantie Philomène était tout le temps chez eux. Mon parrain était confus. Il a décidé de parler discrètement à son ami afin qu’il trouve une solution. Contre toute attente, monsieur N’Dri a refusé la grossesse. Il a même juré ne jamais avoir eu affaire à ma mère. Mon parrain avait beau lui expliqué qu’il fallait qu’il prenne ses responsabilités, mais le voisin était ferme. Jamais il n’avait touché ma mère. Il avait tellement fait de tapage que mon parrain et son épouse ont fini par avoir des doutes. Il a été confronté à ma mère qui soutenait que c’était lui l’auteur de sa grossesse. Elle a ajouté qu’ils se voyaient régulièrement lorsque tout le monde était boulot. M.N’Dri l’a giflée lorsqu’elle a dit cela.

Il l’a traitée de menteuse et de briseuse de foyer. Il était tellement convaincant qu’il a lui-même informé son épouse de ce qu’il qualifiait de diffamatoire. Son épouse est elle aussi venue menacer ma mère. Elle lui avait même porté main avant d’exiger que mon parrain et son épouse la renvoient s’ils veulent que leur amitié continue. Contraint à agir, mon parrain a renvoyé ma mère. Il n’avait pas le choix puisque son épouse aussi menaçait de partir. Ma mère a donc été renvoyée par ses patrons. Elle  n’avait aucun endroit ou aller. Avec l’argent qu’elle avait, elle s’était réfugiée auprès de deux vendeuses de friperie qu’elle connaissait au marché. Ces deux jeunes filles lui ont volé l’argent que son patron lui avait donné pour son accouchement. Elle n’avait plus rien. Sa grossesse était assez avancée. Lorsqu’elle s’est plainte, une bagarre les a opposées. Elle fut tabassée malgré sa grossesse et jetée à la rue par ses deux copines. Ne sachant pas où aller, elle a dormi au marché ce jour-là avec les belah. Puis dans la nuit, les  contractions ont commencé. La grossesse n’était pas arrivée à terme, donc il y avait des risques. Elle a été conduite par ses compagnons d’une nuit à l’hôpital. Les médecins ont trouvé que son état était assez critique, car elle saignait énormément. Il faillait l’opérer d’urgence pour sauver l’enfant et la mère. Mais elle n’avait pas d’argent. Après plusieurs heures de souffrance, elle a donné l’adresse de mon parrain, qui, informé, est venu aussitôt à son secours. L’opération a été faite, mais malheureusement, ma mère n’a pas survécu. Mon parrain a donc décidé d’adopter l’enfant. Son épouse était contre. Elle disait que j’étais surement le fils de mon parrain. Elle voulait qu’il me mette en adoption. Mon parrain a refusé, prétextant que maman les avait servi pendant 14 ans et qu’il me devait cela. Surtout qu’il n’avait pas de garçon. Sa décision  était prise. Son épouse l’a donc quitté et les voisins ne lui adressaient plus la parole. Chacun campait sur sa position. Mon parrain m’a déclaré comme étant son fils et celui de sa sœur qu’il a fait venir pour prendre soin de moi. Ses deux filles dont ma mère s’était occupée pendant 14 ans étaient grandes. Je fus donc élevé avec beaucoup d’amour par ces trois femmes et mon parrain. Mon parrain s’était juré de faire de moi un homme respecté et envié de tous. Eh bien ! Je crois qu’il a réussi. Au fur et à mesure que je grandissais, mon parrain prenait les gens à témoin. Il était persuadé qu’il serait un jour en position de force. Je ressemblais trait pour trait à monsieur N’Dri. L’épouse de mon parrain qui venait de temps à autre voir ses enfants a compris et elle a réintégré le foyer. L’épouse de monsieur N’Dri a fini par le quitter car elle n’a pas supporté cette humiliation. J’étais le portrait de son mari. Lorsque j’ai eu 5 ans, la ressemblance était tellement flagrante que M.N’Dri a essayé de me kidnapper. On ne sait à quelle fin mais il a été arrêté de justesse par la sœur de mon parrain. Depuis ce jour, mon parrain a exigé que je sois surveillé comme du lait sur le feu. J’ai grandi dans cette ambiance jusqu’en classe de seconde ou mon parrain a exigé que je sois surveillé comme du lait sur le feu. J’ai grandi dans cette ambiance jusqu’en classe de seconde ou mon parrain m’a confié à son ami, monsieur Lambin, un Suédois, chef d’entreprise, qui connaissait mon histoire. Je suis resté avec lui 6 ans, puis je suis allé vivre en Autruche. Déjà en classe de 6ème, je connaissais mon histoire. Mon parrain et son épouse que je prenais pour mes parents biologiques m’ont tout raconté. Ce jour-là, j’ai pleuré car je trouvais mon histoire trop triste.

Je savais aussi que le voisin qui me regardait à longueur de journée était mon véritable père, mais mes parents m’avaient défendu de lui adresser la parole. Je lui en voulais beaucoup et je le tenais pour responsable de la mort de ma mère. Souvent au quartier, les gens me comparaient à ses enfants. Ils disaient que nous étions identiques. Je faisais fi de tout cela car je connaissais l’histoire. Malheureusement pour moi, il y a six mois, mon parrain est mort. Son épouse est encore là. Ce qui me réjouit, c’est que pendant toutes ces années à l’aventure, j’ai eu le temps de leur prouver ma gratitude. Je leur ai acheté une maison. Je m’occupais d’eux, même étant là-bas. C’est lorsque je suis venu aux funérailles de mon parrain que mon second père Suédois m’a mis en contact avec cette entreprise dans laquelle je travaille aujourd’hui. Il en est l’un des actionnaires. Figurez-vous qu’il y a une quinzaine de jours, alors que j’étais en plein boulot, ma secrétaire est venue me voir en disant : “Patron, votre père est là. Il veut vous voir». Surpris, j’ai demandé : Mon père ? Quel père ? Mon père est mort». Elle m’a dit : “Monsieur il ne m’a rien dit, mais comme vous vous ressembles-là…Il m’a dit M.N’Dri “j’ai tout de suite compris qui cela pouvait être. J’ai voulu refuser de le recevoir mais je voulais l’entendre. Il a donc été conduit à mon bureau. Dès qu’il m’a vu, il s’est mis à genoux. Il m’a fait de la peine. Je l’ai aidé à se relever. Il s’est installé en face de moi. A peine il arrivait à me regarder. Je lui ai demandé les nouvelles. Il a pris la parole en disant : “Mon fils pardon, il n’y a pas de mot plus grand que le pardon. J’ai honte ! Si la honte pouvait tuer, je serais le premier à mourir. Pardon ! Je suis ton père. Pardon mon fils. “Et il s’est encore mis à pleurer.  Je me disais intérieurement : “Si papa pouvait voir ça ?“.Je répondis à cet homme : “vous savez, monsieur N’Dri, cette histoire date de 36 ans. Mon papa est mort, c’est vrai ! Mais maman est là. Je leur dois tout. Vous me demandez pardon. Demandez plutôt à maman et à papa qui ne sont plus de ce monde. Moi j’ai passé l’âge d’avoir un père. Je n’ai plus besoin de père, monsieur. Désolé !“

C’est sur ces mots que nous nous sommes quittés. Et je ne regrette rien…

 

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La Rédaction

SOURCE: Le Flambeau  du   29 sept 2014.
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