En préambule de cette contribution, je revendique haut et fort une écriture paraissant digressive par moment. Le sujet l’impose.
Écoutez et entendez ce que disait dans la première moitié du XXème siècle un penseur majeur : « Je le répète : Le colonialisme n’est point mort. Il excelle, pour se survivre, à renouveler ses formes ; après les temps brutaux de la politique de domination, on a vu les temps plus hypocrites, mais non moins néfastes, de la politique dite d’Association ou d’Union. Maintenant, nous assistons à la politique dite d’intégration, celle qui se donne pour but la constitution de l’Eurafrique. Mais de quelque masque que s’affuble le colonialisme, il reste nocif. Pour ne parler que de sa dernière trouvaille, l’Eurafrique, il est clair que ce serait la substitution au vieux colonialisme national d’un nouveau colonialisme plus virulent encore, un colonialisme international… »
Ces propos tenus par Aimé Césaire, parus dans « La Nouvelle Critique » de janvier 1954, bien avant les indépendances formelles des années soixante, demeurent d’une sinistre réalité sur la forme et le fond.
Sur la forme et à preuve les appellations évolutives imposées au Mali avec les SERVAL, BARKHANE, TAKUBA qui n’étaient que des circonvolutions intellectuelles ayant le dessein ultime de maintenir le pays sous occupation. Du saupoudrage sémantique. Une réminiscence du système de tutelle des Nations Unies qui a longtemps maintenu sous domination occidentale de nombreux pays entre 1945 et 1994 alors que son but affiché était l’émancipation.
Il s’agit des mêmes procédés décrits par Aimé Césaire sur les mutations du discours colonialiste prédateur, la substitution d’une forme à l’autre. Chaque changement de forme s’accompagne d’utilisations d’une ou plusieurs satrapies locales : On appelle Alassane OUATARRA de la Côte d’Ivoire, Macky SALL du Sénégal, Deby fils du Tchad et, pour faire bonne mesure, on embauche des anglophones et lusophones Nana AKUFO ADDO du Ghana, Umaru Emballo de Guinée Bissau et le flambant neuf Ahmed Bola TINUBU du Nigeria. Ce dernier ne se souvient plus des responsabilités de Charles de Gaulle dans la guerre du Biafra ayant valu à son pays, le Nigeria, des centaines de milliers de morts dans les années soixante-dix. Sa volonté d’envahir le Niger avec les soudards de la CEDEAO pour en découdre avec les tombeurs de BAZOUM vient d’être contrariée par le Sénat nigérian et les menaces des autorités burkinabè et maliennes d’entrer en guerre auprès du peuple nigérien.
La logique voudrait qu’il ne soit pas confié le soin de débrouiller une affaire à ceux qui l’ont préalablement embrouillée. La gestion des problèmes africains ne doit pas être soumise à l’expertise des anciennes puissances esclavagistes, ensuite colonialistes et maintenant néocolonialistes. De tous les peuples, les Africains sont les seuls à s’accommoder de telles injustices. Le bourreau chargé de juger les conséquences de son acte. L’Occident est à la manœuvre derrière les sous-préfets de la CEDEAO.
Sur le fond, comme tout l’Occident est vassalisé par les États-Unis, l’OTAN devient la principale force de l’internationalisme colonialiste. Et aujourd’hui, sa base avancée sur le continent se trouve au Niger et c’était avec la bénédiction du truculent et verbeux BAZOUM. Tous les ténors de la CEDEAO, ces collabos, sont au service de cette machine démoniaque otanesque.
Cette fois il s’agit de réaliser un doublé : S’emparer des pays africains territorialement d’une part et, dans le même temps, empêcher les BRICS, pays émergents constitués du Brésil, de la Russie, de l’Inde, la Chine et Afrique du Sud d’avoir accès aux ressources de ces pays. Ce qui, de facto, anéantirait les velléités de ces pays de demeurer prééminents au détriment de l’occident.
Pour atteindre cet objectif des services spéciaux ont inventé les mouvements terroristes appelés DAESH, AL QAIDA, AL NOSTRA, AL MOURABITUM et j’en passe. Ces mouvements semant la terreur dans différents pays, ce même Occident ayant mis le feu, se propose de l’éteindre en recolonisant les pays cœurs de cible qui sont stratégiquement intéressants pour les ressources et /ou la position géographique.
Et, malheur, le pays pilote de l’OTAN s’est toujours distingué par sa brutalité sanguinaire : l’extermination des peuples autochtones d’Amérique et grand remplacement, la guerre au Vietnam, la bombe atomique au Japon, les invasion du Panama pour arrêter son président Manuel NORIEGA avec 25 000 morts au passage en 1989-1990, l’invasion de l’Irak avec l’assassinat par pendaison de Saddam HUSSEIN et 1 500 000 morts dont surtout des civils en 2003. Durant cette guerre imposée à l’Irak par le mensonge des armes de destruction massive, Joseph Robinette BIDEN, l’actuel président démocrate des États-Unis, était le plus fieffé partisan du président républicain Georges Walker BUSH. Aujourd’hui, il est le principal va-t-en-guerre dans le conflit Russie-Ukraine qui n’est autre que la guerre ouverte par l’OTAN contre la Russie. Nous sommes peut-être au début d’une troisième guerre mondiale que l’Occident planifie pour empêcher la Chine d’éclipser définitivement les USA et ses vassaux. On cherche l’effondrement de la Russie, un des BRICS ayant une frontière commune avec la Chine pour ainsi affaiblir cette dernière. La Chine aussi a une frontière commune avec l’Inde. On le constate donc, aucun de ces trois pays n’a intérêt à un affaiblissement de son voisin par les coups de boutoir des occidentaux. Si la Russie tombe, la Chine suivra et ensuite l’Inde. Une équation funeste.
La ruée vers l’Afrique est dans la même logique. L’intérêt de l’Occident est la seule donnée normative majeure et il doit être préservé y compris par les moyens les plus atroces, les plus inhumains.
D’organisation défensive à sa création en 1949 pour protéger l’Europe de l’Ouest de la poussée communiste de l’URSS, l’OTAN, au lieu de se dissoudre après la dislocation du régime soviétique en 1991, a montré son vrai visage. Une meute de loups qui sème le carnage même lorsqu’elle est rassasiée : tout pour elle, rien pour les autres.
Le schéma est grippé en Afrique francophone où des militaires citoyens panafricanistes font débarrasser le plancher aux bons dictateurs de l’Occident : IBK, Roch Marc C. KABORÉ et DAMIBA, Mohamed BAZOUM. Le cas guinéen demeure insaisissable pour le moment. L’homme est un ancien de la légion étrangère française et ses liens avec les autorités françaises de la Françafrique posent question.
Ces militaires, citoyens panafricanistes, sont en communion avec leurs peuples malgré les montages grossiers d’ONG à la solde des fabricants de mensonge, Human Rights Watch, Amnesty International parfois, Haut-commissariat pour les Droits de l’Homme… Toutes ces organisations qui vitupèrent pour la protection des droits humains font peu de cas des massacres perpétrés par les États-Unis, la France, l’Angleterre dans la période contemporaine et se font concurrence pour vomir sur les dirigeants que l’Occident veut abattre pour dominer son pays. Lula au Brésil, Maduros au Venezuela en savent quelque chose. Pour les Maliens, les mensonges du Haut-Commissariat sur les Droit de l’Homme de l’ONU sur le massacre de Mourra en 2022 l’illustrent.
Comme si l’acquis a muté en inné chez elles, les ex puissances colonialistes et racistes, parce que l’un ne va pas sans l’autre, Allemagne, Angleterre, Belgique, Espagne, France, Hollande, Portugal… ont créé les USA en y envoyant leurs ressortissants. Ils y ont exercé, développé et amplifié leurs instincts mortifères.
Aimé Césaire en disait encore ceci : « Le colonialisme porte en lui la terreur. Il est vrai. Mais il porte aussi en lui, plus néfaste encore que la chicotte des exploiteurs, le mépris de l’homme, la haine de l’homme, bref le racisme. »
Ce racisme intemporel, récemment illustré par les propos du conseiller européen aux affaire étrangères, l’Espagnol Josep BORREL dans son discours d’ouverture à l’Académie diplomatique européenne, le 13 octobre 2022 à Bruges, Josep Borrell s’adressait à l’experte italienne en islam et ancienne communiste Federica Mogherini, rectrice du Collège d’Europe, ancienne Haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, fait réfléchir : « Oui, l’Europe est un jardin. Nous avons construit un jardin […] Le reste du monde – et vous le savez très bien, Federica [Mogherini] – n’est pas exactement un jardin. La plus grande partie du reste du monde est une jungle, et la jungle pourrait envahir le jardin. »
Les plus criminels utilisent les notions de droit de l’homme pour fondre sur des pays et y commettre plus de massacres que les dirigeants accusés d’irrespect pour ces mêmes droits : Irak et Libye.
L’OTAN, avec Barak OBAMA, Nicolas SARKOZY, les dirigeants du Qatar, entre autres, sont responsables des massacres dans nos pays : Burkina Faso, Mali, Niger. Ils ne peuvent pas être la solution, ni y contribuer. Leur plan est et demeure la création du chaos pour piller facilement ou dominer totalement. Ce chaos que l’on a mis en place en RDC depuis la chute de Mobutu Sesse Seko en 1997, un ex sous-préfet de la CIA.
Ceux qui sont responsables des plus grands mensonges et mystifications par leur réécriture de l’histoire.
Ceux qui justifient l’esclavage en rendant les victimes responsables du fait, et vulgarisent ces théories fétides occultant totalement que les plans, les budgets, les constructions de navires venaient d’Europe.
Ceux dont les mains et les âmes sont souillées par leur responsabilité dans les pires carnages de l’histoire humaine : explorations espionnages, esclavages, colonisation.
Ceux dont l’acte d’accusation relaverait d’une gageur par la multiplicité des horreurs commises se lancent aujourd’hui dans une nouvelle reconquista, une réoccupation des pays africains.
Bref, ceux qui sont fabricants et exécutants des plus grandes abominations humaines veulent continuer, confondant allègrement pouvoir et droit ou substituant volontairement le premier au deuxième, à se repaître du sang des autres.
Les remparts, heureusement, sont constitués des peuples soutenus par ces militaires citoyens, les sociétés civiles décomplexées, les BRICS qui n’entendent plus laisser l’Occident pérégriner bestialement, effroyablement, sataniquement, voulant toujours nous faire prendre les vessies pour des lanternes.
Yamadou Traoré
Analyste politique.
Source: L’Aube