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Législatives: la quadrature du cercle

À j-3 de la date limite de dépôt des dossiers pour les élections législatives, plusieurs candidats n’ont pas encore obtenu leurs casiers judiciaires, en raison de la grève illimitée des magistrats hypothéquant ainsi sérieusement la tenue de ce scrutin crucial pour notre démocratie dont les plaies de la présidentielle ne sont pas encore cautérisées

C’est pour le dimanche 28 octobre 2018 que le collège électoral est convoqué sur toute l’étendue du territoire national, à l’effet de procéder à l’élection des députés à l’Assemblée nationale. Un second tour aura lieu le 18 novembre 2018 dans les circonscriptions où aucun candidat ou liste de candidats n’aurait obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour.
Mais un obstacle de taille se dresse sur la route de ces élections législatives, à savoir celui de la constitution des dossiers de candidature. Précisément l’obtention du casier judiciaire, une pièce ‘’indispensable’’ constitutive du dossier de candidature. Cela, en raison de la grève illimitée décrétée et exécutée par le corps des magistrats.
Selon nos informations, si certains candidats plus avisés ont pu obtenir ce précieux document, dont la durée de validité est de 6 mois, d’autres, par contre, sont dans l’impasse. Les magistrats étant les seuls habilités à délivrer cette pièce dont la fourniture n’est pas facultative.
Conséquence : en l’état, de nombreux candidats potentiels seront disqualifiés, faute d’avoir pu verser au dossier de candidature toutes les pièces prévues par la loi.
Cependant, étant donné que ce ne sont pas ces candidats potentiels qui sont en cause, mais des agents de l’État, payés par le Trésor public, leur disqualification serait injuste. Ils ne devraient en aucun cas être privés de leur droit de participer à une compétition électorale, parce que des hommes de droit ont des revendications en souffrance.
Dès lors, deux choix se dégagent pour les autorités nationales :
-prendre les mesures nécessaires de sorte à faire accepter les dossiers de candidature sans le casier judiciaire. Ce qui ne serait pas sans poser un sérieux problème de droit ;
-reporter les élections législatives à une date ultérieure, en attendant le retour des magistrats dans les tribunaux. Ce qui discréditerait sérieusement notre pays qui avait bénéficié d’une vague de solidarité exceptionnelle et qui commence à présent à lasser tous ses soutiens, en raison des caprices de certains acteurs nationaux.
Une solution médiane serait d’obtenir un moratoire de quelques jours avec les magistrats pour la délivrance des casiers judiciaires. Ce qui comporterait également une bonne dose d’injustice, d’autant plus que d’autres Maliens devant se présenter à des concours en ont été privés, faute d’avoir fourni leur casier judiciaire. En effet, l’article 2 de la Constitution dispose : ‘’Tous les Maliens naissent et demeurent libres et égaux en droits et en devoirs. Toute discrimination fondée sur l’origine sociale, la couleur, la langue, la race, le sexe, la religion et l’opinion politique est prohibée.’’
Les candidats potentiels aux législatives et aux différents concours ne sont pas seules victimes de cette grève des magistrats. L’on apprend que les Commissariats des Police sont surpeuplés désormais et que certains envisageraient de libérer purement et simplement les auteurs de délits mineurs, sous peine eux aussi de se trouver en porte à faux avec la loi. Le délai de la détention provisoire étant de 48 heures (Cf article 10 de la Constitution : ‘’ Toute personne faisant l’objet d’une mesure privative de liberté a le droit de se faire examiner par un médecin de son choix.
Nul ne peut être détenu pendant une durée supérieure
à quarante-huit heures que par décision motivée d’un magistrat de l’Ordre judiciaire.
Nul ne peut être détenu dans un établissement pénitentiaire que sur un mandat délivré par un magistrat de l’ordre judiciaire’’).
En l’absence de Procureur (en grève illimitée) pour prolonger le délai de détention provisoire, toute garde à vue au-delà des 48 heures serait un abus. Ainsi, la société est encore mise en danger : on arrête des malfrats, on ne peut pas les garder au-delà des délais légaux ; alors on les reverse dans leur milieu naturel et ils renouent avec leurs activités délictueuses.
La grève, bien entendu, est un droit constitutionnel en République du Mali. La Constitution du 25 février dispose en effet, en son article 21 : ‘’ Le droit de grève est garanti. Il s’exerce dans le cadre des lois et règlements en vigueur’’. Faudrait-il pour autant au nom de cette liberté prendre en otage, pour une durée indéterminée, les droits des citoyens ?
En tout état de cause, cette grève des magistrats devrait interpeler quant à la concentration des pouvoirs entre leurs mains. Une piste de réflexion : les autorités ayant le pouvoir de délivrer l’acte de naissance ; la Carte nationale d’identité ; de célébrer des mariages et qui sont des officiers de police judiciaire ne pourraient-elles pas délivrer les casiers judiciaires ? Cela, au prix d’une modernisation de l’administration. Par-dessus tout, il faudrait un courage politique. Parce qu’il est clair que le modèle existant qui n’est qu’un copier-coller (une transposition du système du maître d’hier) pose plus de problèmes qu’il n’offre de solutions.

Par Bertin DAKOUO

Info-matin

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