Pour le Secrétaire général de l’Amicale des anciens militants et sympathisants de l’Union nationale des élèves et étudiants du mali (AMS-UNEEM), El Hadj Patrice Seydou Dembélé, il faut consentir à chronogramme de 16 mois , à prolonger du fait de la période d’hivernage pour aller aux élections.
Quelles perspectives entrevoyez-vous pour la levée de l’embargo de la CEDEAO?
La venue de Goodluck Jonathan, l’émissaire de la CEDEAO, est salutaire. C’était attendu. C’est eux qui ont infligé à notre pays des sanctions sévères, injustes que nous avons tous déplorées. Mais qu’à cela ne tienne, c’est leur principe. De mon point de vue, ils ne l’ont pas fait par méchanceté, mais par respect pour leur principe, même s’il y’a deux poids deux mesures. Maintenant, nous avons officiellement écrit aux autorités de la transition pour dégager notre point de vue. Et notre point de vue était de tout faire pour que les sanctions soient levées. Il faut accepter le compromis sans compromission, pour que les sanctions soient levées. Et après, on peut discuter du reste. J’ai souvent fait une caricature, quand vous donnez des marchés ici aux opérateurs économiques pour un montant x. A un moment donné, on se rend compte que le montant donné ne suffit pas, on fait un avenant. Donc je dis, si nous acceptons dans un premier temps, un chronogramme, au fur et à mesure que nous avançons et que nous voyons que ça ne marche pas, ou que ça ne peut pas tenir, nous allons à la négociation. Je crois que s’ils avaient commencé avant le mois de février, on n’aurait pu gérer ça avant. Il n’est jamais trop tard pour bien faire, j’ose croire que la mission de l’émissaire de la CEDEAO va porter fruit.
Je pense que 12 mois c’est peu, c’est 16 mois qui est raisonnable, mais ça nous met dans l’hivernage et c’est pourquoi nous nous pensons qu’il faut être réaliste. Si la CEDEAO accepte de nous accorder 16 mois, je dirai qu’il faut qu’elle prolonge un peu pour nous sortir de l’hivernage. En ce moment nous sommes obligés d’aller à l’avenant, dont j’ai parlé. 16 mois, c’est d’ici le mois de juillet, c’est l’hivernage… Pourquoi ne pas aller en octobre 2023? Nous, nous voulons être pragmatiques, ça prolonge les 16 mois. Donc, en donnant 2 ans, nous Maliens, on ne peut pas dire qu’on n’a pas eu le temps, on ne peut pas dire que ça ne suffit pas. Les assises ont dit 6 mois à 5 ans et nous on veut avancer. Nous avons fini carrément le mandat d’IBK, nous avons fini de faire un certain nettoyage dont parlent certains.
Justement, la question sécuritaire se pose et l’armée malienne monte en puissance. Quel commentaire avez-vous à ce sujet ?
L’AMS-UNEEM a son démembrement un peu partout et nos camarades ? qui nous donnent des informations au centre, nous fournissent quand même la preuve que l’armée monte en puissance. Même si aujourd’hui nous constatons qu’elle n’est plus devenue la muette, l’événement exige qu’elle communique beaucoup ; ce qui est contraire au principe de l’armée normalement. Mais la chose est telle qu’il faut qu’elle rassure la population.
En 2012, nous avions écrit aux autorités en leur demandant de refuser les forces d’interposition et en demandant à tous nos partenaires qui veulent aider le Mali, de venir nous aider par la logistique et les renseignements, pas les hommes sur terre, l’histoire nous donne raison aujourd’hui.
Vous touchez du doigt à l’actualité, les autorités maliennes exigent le départ de barkhane et de ses alliés sans délai, cela est raisonnable?
Cette exigence ne nous surprend pas. Nous n’avons pas été écoutés par l’ambassadeur de la France, qu’on a mis à la porte. J’ai emmené une délégation de 10 personnes chez l’ambassadeur Joël Meyer à domicile, nous avons dit que nous ne comprenons pas le comportement de la France sur le théâtre des opérations. Nous avons l’impression que la France aide plutôt les djihadistes contre les Maliens, qu’elle s’écarte de l’objectif pour lequel elle est là…. L’officier chargé des opérations sur le terrain s’était fâché face à ces remarques…J’ai sorti une vidéo où on rapporte que les rebelles disent que les militaires ne rentreront pas dans Ber. Après, nous avons vu que les militaires étaient interdits d’entrée à Kidal et on a demandé à l’ambassadeur de nous donner des explications. Nous avons dit à l’ambassadeur de faire attention, parce que nous ne sommes plus d’accord avec cette manière de mener la guerre… Donc, cette tension avec la France se comprend aisément.
Sur un autre plan, l’AMSUNEEM s’apprête à commémorer le 42ème anniversaire de l’assassinat d’Abdoul Karim Cabral, comment entrevoyez-vous ce programme ?
La célébration du 42ème anniversaire de l’assassinat crapuleux d’Abdoul Karim Camara dit Cabral, le héros, sous le signe de la « reconquête de notre souveraineté, de notre dignité ». Et nous allons animer une conférence, dont le thème est « Le Mali à la reconquête de sa dignité et de sa souveraineté ». Et nous nous réjouissons qu’à cette célébration, le Premier ministre, Dr Choguel Kokalla Maïga, va nous aider avec les nouvelles autorités, à nous dire quelles sont les circonstances de la mort de Cabral, et où est-ce qu’il a été enterré. Parce que c’est eux qui étaient au pouvoir sous Moussa Traoré. Malgré tout cela, Choguel nous a reçus en tant que camarade à nous, parce que quand il était en terminale, j’étais en 10ème, c’est la même génération. Donc, cette célébration, nous l’a mettons sous le signe de la souveraineté retrouvée.
Je reviens en arrière, quand les jeunes Colonels ont fait le coup d’état, c’était un mardi le 18 août. Le jeudi, j’ai accordé une interview à ORTM. J’ai demandé à ce que l’interview se fasse au monument des Martyrs et j’avais dit 3 choses. La première est que la classe politique avait échoué après 31 ans de lutte politique, la deuxième chose, c’est derrière un imam qu’ils continuent le combat politique, et la troisième, c’est que nous nous attendions à ce coup d’Etat. Nous étions sûrs, qu’au regard de tout ce qui se passe, il y’a aurait une troisième force, comme l’armée sait toujours le faire et ça aussi par anticipation. Mais nous avions dit aux jeunes aussi de se méfier de faire ménage avec ces politiciens, parce que le camp IBK était le même avec le camp du M5-RFP. Nous l’avons dit et c’est vérifiable à l’ORTM. Et nous osons croire que cette fois-ci nous avons des jeunes engagés. Et jusqu’au jour où je vous parle, je ne doute pas de leur sincérité et de leur bonne foi à vouloir conquérir le Mali et c’est pourquoi effectivement l’AMS-UNEEM s’unit à cette jeunesse pour rendre hommage au héros Cabral avec les plus hautes autorités du pays.
Quel appel avez-vous à lancer aujourd’hui au peuple malien, avec le contexte de crise, les difficultés, l’embargo actuel?
Nous disons que tant que nous ne sommes pas unis, nous ne serons pas forts. Tant que certains croient qu’il y a le Malien de la première zone et le Malien de la deuxième zone, on n’avancera pas. Tant que certains pensent que nous avons la justice des vainqueurs et la justice des vaincus, nous n’avancerons pas. Il est grand temps qu’on regarde ensemble le Mali, en regardant ensemble le Mali, il faut faire le Mali ensemble. Et c’est pourquoi je salue l’initiative prise par le CNT tout récemment de relire la charte de la transition. Élargir le niveau du CNT mais ce qu’ils ont oublié et que je vais dire, c’est expurger le CNT des gens qui ne servent à rien. Il faut amener des gens qui sont utiles pour la transition, notamment des gens qui se battent au soleil jour et nuit pour l’apaisement du climat social, comme l’AMS-UNEEM, qu’on ne voit pas.
Qu’est ce que nous ne faisons pas depuis longtemps pour l’apaisement du climat social, scolaire et universitaire ? La thématique sur l’éducation, c’est nous qui l’avons demandée aux assises. Nous avons dit que nous ne ferons jamais la politique de la chaise vide. Mais nous ne sommes pas des quémandeurs de postes non plus. Donc, les Maliens doivent être unis. J’ai suivi un débat à joliba TV où celui qui a déclaré l’indépendance de l’Azawad vient dire à un jeune Malien qu’il est apatride, et que c’est lui le Malien. C’est le comble là ! L’histoire est trop ressente pour que quelqu’un qui a été nommé au CNT, mais qui a déclaré l’indépendance de l’Azawad, vienne traiter d’autres de non-Maliens. Je suis content qu’il ait abandonné les armes, mais tant que nous ne sortons pas de ce schéma, de ce clivage, ça n’ira pas. On ne va plus parler de cet accord caduc. Dès que la France est partie. Les gens du MNLA n’ont plus qu’à déposer les armes pour rejoindre le Mali, puisqu’ils sont au CNT et au gouvernement. Donc, c’est fini, cette histoire de processus de paix ou d’accord d’Alger. La France déménage et les accords aussi suivent immédiatement.
Propos recueillis par Abréhima GNISSAMA
Source : Mali Horizon