Andriy Kostin souhaite la création d’un tribunal spécial pour l’Ukraine pour que le crime d’agression soit poursuivi.
Andriy Kostin est procureur général d’Ukraine depuis juillet 2022. Il coordonne le travail d’investigation mis en œuvre pour faire la lumière sur les crimes commis par les forces russes depuis le déclenchement de l’invasion de son pays, le 24 février. Il était de passage à Paris, mardi 4 octobre, pour participer à la Nuit du droit et rencontrer les autorités françaises, dont le ministre de la justice, Eric Dupond-Moretti. Combien de cas de crimes de guerre avez-vous répertoriés jusqu’ici ? Nous avons identifié plus de 36 000 crimes de guerre. Les cas prioritaires sur lesquels nous travaillons sont ceux où il y a des victimes, des personnes tuées, blessées ou des actes de torture. Nous enquêtons également sur quarante cas de violences sexuelles, dont des viols, qui ont été signalés par des victimes. Jusqu’ici, en tout, dix personnes ont été condamnées. Nous avons engagé des poursuites contre 176 personnes devant les tribunaux ukrainiens. Nous avons également 626 personnes suspectées de crime d’agression, dont un cas en particulier qui implique la plus haute hiérarchie militaire et politique russe. La plupart des crimes identifiés concernent néanmoins les destructions et dommages causés aux infrastructures et propriétés civiles. Il peut y avoir des doublons. Nous travaillons avec nos partenaires pour trouver une solution technologique afin d’éviter cela. D’autres signalements de crimes de guerre vous parviennent-ils ? Oui, en particulier depuis que nous avons libéré une partie de la région de Kharkiv, qui a été occupée pendant six mois. C’est différent de la région de Kiev, où les Russes ont fui si rapidement qu’ils n’ont pas eu le temps de détruire les preuves. A Boutcha, les victimes avaient été tuées trois, cinq ou sept jours plus tôt, donc c’était plus simple de comprendre la scène de crime et la cause des décès, avant même qu’un expert fasse un examen approfondi des corps. Pour la région de Kharkiv, nous avons plutôt trouvé l’endroit où étaient les tombes, comme à Izioum. Mais, dans presque chaque ville et village, nous avons des tombes et des informations sur les civils qui pourraient avoir été tués et torturés. Aujourd’hui, nous essayons de nous rendre dans tous ces lieux, mais certains doivent être déminés. Lire aussi : Guerre en Ukraine : six mois de conflit émaillés de crimes de guerre Quels partenaires internationaux vous aident ? La France nous fournit, notamment, une équipe d’enquêteurs présente dans la région de Kharkiv. Un second laboratoire ADN mobile doit arriver très bientôt. Nous avons d’autres types de spécialistes qui travaillent avec nous, venus de l’Union européenne, des Etats-Unis et du Royaume-Uni. On fait aussi appel à des experts qui peuvent nous aider sur l’investigation des crimes sexuels, car c’est un type de crime très sensible. Mais nous avons besoin d’autres experts encore, notamment en matière d’explosifs. Il vous reste 52.47% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
Source: Le Monde