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Le Président parle comme dans un grin … : Il faut arrêter la démagogie maintenant et regarder la réalité en face

Le Président a parlé comme dans un grin….
Gueux : personne qui vit dans la misère et qui est réduite à la mendicité (Larousse).
Selon les chiffres nationaux, plus de la moitié de la population (51%) vit sous le seuil de pauvreté (établi à $1.25/jour). Avant la crise politique et économique de 2012, le Mali figurait au 175e rang de l’indice du développement humain (IDH) établi par les Nations Unies. Mais en à peine un an, il a reculé de sept places dans l’IDH et fait désormais partie des cinq pays les plus pauvres du monde.
Le Mali a perdu une centaine de jeunes dans les récents drames de l’immigration en Méditerranée. Ces jeunes fuyaient la misère de leurs villages.
Nous ne sommes pas des gueux ? Certainement pas, nous sommes seulement très très pauvres. Les ressources minières, nous ignorons où elles vont pour soulager la misère. Les fonds détournés (ou mal gérés, selon le langage qu’on veut utiliser) sont de plus en plus importants : 153 milliards les deux dernières années.
Qui est responsable ?

 

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Il faut nous respecter : Le respect se mérite
Les institutions, à qui on demande de nous respecter, sont présentes dans notre pays suite à une demande explicite du peuple malien. Leurs règles d’engagement sont discutées avec les autorités du pays. Le Mali fait partie de l’ONU. Il y a des instances appropriées de discussion où ces questions peuvent être discutées et où les représentants légitimes du Mali peuvent faire valoir leur éventuel mécontentement. Ce 15 mai, en public, dans une salle de conférence, n’était ni le moment ni le lieu de tenir de tels propos. Le Président s’est exprimé comme un activiste pour toucher la fibre patriotique des maliens. Erreur diplomatique et absence de vision stratégique.
La fibre nationaliste des maliens a été touchée, certes. Tout le monde a applaudi, comme après, la visite de l’ex premier ministre a Kidal. On en connait les conséquences…
Le Président a parlé comme s’il était impuissant face à la situation. S’il estime que les partenaires auxquels il a fait appel pour l’aider, ne travaillent pas conformément à ses souhaits, il y a des mécanismes plus appropriés pour faire passer ce message.
Il semble même que le Président n’ait pas une connaissance exhaustive de la situation de son pays. Ce ne sont pas seulement les enfants de Kidal qui ne vont pas à l’école, ceux de Mopti non plus à cause de l’insécurité. Le Mali a l’obligation d’instruire ses enfants, tous ses enfants. Nos partenaires peuvent nous aider à le faire, mais c’est notre première responsabilité.
Qu’a voulu dire le Président ? A ce niveau de responsabilité, lorsqu’on s’exprime, on fait passer des messages. On n’est pas sensé exprimer des sentiments.
J’ai du mal avec la faculté malienne de toujours accuser les autres. Il y a une vérité indéniable : les autres vous traitent comme vous le permettez. C’est la défaillance du Mali qui fait qu’il y a une mission UN de stabilisation dans le pays. C’est contreproductif de toujours accuser les autres. Il faudrait donner les orientations nécessaires et fixer le cadre d’intervention de ces acteurs externes, si on en est capable, ce qui semble loin d’être garanti….
Le Président a eu un discours populiste s’adressant encore une fois à la fibre nationaliste des maliens comme il l’a fait pour se faire élire. Le résultat, on le connait. Au-delà des discours grandioses sur L’honneur et le bonheur des maliens…, la situation s’est notoirement dégradée. Le Président n’a pas été en mesure de donner l’impulsion nécessaire pour ne serait-ce qu’initier un début de solution des grands maux du pays : La sécurité s’est dégradée, la cohésion sociale est en lambeaux, il y a plus de groupes armés que lorsqu’il a été élu et la liste est loin d’être exhaustive.
Il n’a pas pris la peine de s’adresser aux maliens pour leur expliquer clairement comment il compte régler les nombreux maux, On ne l’a vu que rarement auprès des maliens à l’intérieur du pays. Il s’est rendu, comme à contre coeur, à Gao, quelques heures seulement.
Ce 15 mai, j’aurais souhaité que le Président commence par s’incliner sur la mémoire des nombreux morts, civils comme militaires, de cette crise interminable, y compris la mémoire des 35 casques bleus tués au Mali. J’aurais voulu entendre que tout sera mis en oeuvre pour rendre justice aux soldats massacrés à Aguelhok et aux femmes violées pendant l’occupation. J’aurais aimé voir un plan d’action pour la mise en oeuvre de l’Accord d’Alger. J’aurais aimé entendre des choses concrètes.
Il faut arrêter la démagogie maintenant et regarder la réalité en face. Le Mali dépend plus que jamais de l’extérieur, pour ne pas dire qu’il est même actuellement sous tutelle. Cette situation
est déplorable certes, mais elle est réelle. Alors, au lieu de crier au scandale, il convient de tout mettre en oeuvre pour réduire cette dépendance. Il est temps de juger les responsables à leurs actions et non les discours.
Enfin, la déclaration qui a fait perdre son calme au Président, je reconnais qu’elle était peu diplomatique, mais elle était disponible depuis longtemps. Si on avait correctement fait son travail, on aurait dû en avoir connaissance et ne pas se laisser surprendre par sa lecture. Encore une fois, il convient d’utiliser les canaux formels pour faire passer les messages comme il se doit au lieu de parler comme dans un grin…
Mamadou Yacine Konate

Source: Lerepublicainmali

 

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