Les 22, 23 et 24 novembre 2017, le président de la République était en tournée en troisième région. Une visite qui aura comblé toutes les attentes et surtout battu tous les records de mobilisation. 72 heures après cette visite historique, le président de la fédération des sections RPM de Sikasso, le ministre Nango DEMBELE, dans un entretien qu’il a bien voulu nous accorder, le lundi dernier, revient sur les raisons de cette mobilisation grandiose. Le président de la fédération des sections RPM n’a pas manqué d’appeler le président IBK à briguer un second mandat. En tout cas des actions seront posées dans ce sens dans les jours à venir.
Info-Matin : Avec la délégation présidentielle à Sikasso, nous avons constaté une mobilisation exceptionnelle. Pouvez-vous nous dire comment vous êtes parvenu à fédérer toute cette masse à la cause du Président de la République ?
Ministre Nango DEMBELE : merci pour la question. Je crois qu’il faut d’abord situer les choses dans leur cadre. Quels que soient les efforts de mobilisation, s’il n’y avait pas un engagement et une confiance méritée entre les populations et le président, elles n’allaient pas sortir. Le fait que la population a accepté de sortir massivement pour accueillir le président, c’est qu’elle croit en ce qu’il fait et elle croit également qu’il y a beaucoup de choses que le président peut faire encore pour elle. J’ai dit à quelqu’un que notre travail a tellement été facilité parce qu’il y avait un attachement des populations du Kénédougou au président de la République. Elles croient à ce président parce qu’elles l’ont vu à l’œuvre. Je vous prends simplement un seul secteur, l’Agriculture, sur les 1 000 tracteurs subventionnés, selon les chiffres qui ont été annoncés par Bakary TOGOLA, la région a enregistré 522. Quand vous prenez la subvention des engrais, Sikasso est la plus grande région agricole au Mali en termes de valeur. Si l’on devait faire la répartition, je vous dis Sikasso doit avoir plus du tiers sur le montant total des subventions. Pendant les 4 années du président, si ma mémoire ne me trahit pas, Bakary TOGOLA a parlé de près de 240 milliards de FCFA mobilisés, en termes de subvention. Pour les populations, je crois que ça, c’est quelque chose à l’actif du Président. Pour la première fois dans l’histoire, les tracteurs ont été subventionnés à 50 %, c’est du jamais vu au Mali. D’abord, l’État paye aux fournisseurs, il prend en charge la moitié et on fait une facilité aux paysans auprès de la banque pour payer pendant 5 ans la moitié de ce que le paysan doit pour compléter la mise. Je crois que c’est l’expression de tous ces remerciements au Président qui a facilité le travail de mobilisation de la Fédération RPM de Sikasso.
Si le président n’avait pas fait quelque chose, je ne suis pas sûr que toutes les stratégies que nous avons mises en place pour mobiliser allaient réussir.
Pour revenir justement en termes de stratégies, je dois tirer le chapeau à la jeunesse RPM. Une semaine en avance, elle était sur le terrain pour mobiliser et sensibiliser les populations et leur dire de sortir massivement pour rencontrer leur Président. Une chose est de dire que le Président a beaucoup fait pour nous, une autre en est de sortir ou de faire sortir pour lui manifester publiquement ce geste de bonne gouvernance. Donc, c’était une façon pour dire aux populations, on n’est tous d’accord qu’il a beaucoup fait le Kénédougou, donc sortons massivement pour lui montrer notre gratitude par rapport à ce qu’il a fait et on a encore des doléances qu’on va pouvoir lui présenter pour le futur. Je crois que c’est ce travail de sensibilisation qui a permis à la jeunesse d’atteindre les résultats que nous avons pu obtenir au niveau de Sikasso.
N’oubliez pas aussi qu’il y avait beaucoup de paysans qui étaient à Sikasso. Tous ceux qui sont à 5 ; 20 et 25 km de Sikasso, ont été informés par voix de radio, de cette visite.
Vous regardez depuis pratiquement Ouélessébougou, dès que les populations ont appris que le Président était de passage sont sorties massivement pour se mettre au bord de la route pour l’accueillir et lui signifier leur reconnaissance par rapport à tout ce qu’il a fait.
Au-delà du secteur agricole, le Programme d’urgence social a été, je crois, très important dans la mobilisation des populations. Vous avez été à Missirikoro, les témoignages de cette dame sur l’accès à l’électricité, le désenclavement, le pont de Kouoro-barrage, c’était l’extase ! Le président a dit qu’il est comblé. Il a dit tout simplement merci à Sikasso, merci au Kénédougou. Notre stratégie, c’est d’abord la sensibilisation, faire connaitre ce que le président a fait pour la région et maintenant aider les gens, le jour de l’arrivée du président, à se mettre sur le site. Dieu merci, tout s’est fait sans incident. Dieu merci, parce qu’on avait des inquiétudes compte tenu de l’insécurité qui prévaut dans notre pays. Dieu merci, les dieux des Sénoufo ont été avec nous, même un seul cas d’accident ne s’est produit. Dieu merci, les choses se sont très bien passées.
Je crois que la jeunesse RPM et la concertation avec les partis membres de la CMP (Convention de la majorité présidentielle) a aussi joué un grand rôle. Il faut le dire, ce n’est pas seulement le parti RPM. Il y a aussi les autres partis membres de la CMP avec lesquels le RPM a eu quelques rencontres pour bien préparer l’arrivée du Président.
Un autre aspect qu’il ne faut pas oublier, quand le président arrive dans une région, il mobilise obligatoirement le gouvernement, les préfets et autres structures de l’État. Mais des gens qui ne comprennent rien disent que nous avons pris les moyens de l’État. Non ! Ce n’est pas les moyens de l’État, c’est le chef de l’administration. C’est comme moi ministre de l’Agriculture, quand je me rends à Sikasso, toutes mes directions sont obligées d’être là. C’est automatique, donc vouloir essayer de trouver d’autres explications à ça, c’est vraiment méconnaitre la nature de l’administration et son mode de fonctionnement.
Info-Matin : Monsieur le Ministre, depuis votre désignation à la tête de la Fédération tout semble rentrer dans l’ordre. On a échangé avec certains cadres qui nous ont fait savoir que l’unanimité est faite autour de votre personne. Quel commentaire faites-vous de cela ?
Nango DEMBELE : Bon, je dirai tout simplement que c’est peut-être dans ma nature. Je suis issu de ce milieu et je crois aussi être ouvert à tout le monde, d’être à l’écoute des gens, de dire que les décisions sont collectives. Je ne prends pas la décision pour dire que c’est comme ça que ça va se passer. Il y a toujours la concertation et c’est ensemble que nous décidons. Cela n’a pas commencé aujourd’hui, mais depuis la création de l’antenne à Bamako qui aide le parti à mobiliser les cadres ressortissants et sympathisants du parti. Je crois que c’est depuis là-bas les gens ont commencé à me connaitre. Je ne suis pas un politicien dans l’âme, pour ceux qui ne le savent pas, je suis un chercheur. J’ai beaucoup travaillé dans la recherche agronomique, la plupart des chercheurs de l’IER me connaissent. Je suis aussi universitaire, ancien professeur d’une université américaine. Donc, l’université, l’académie et la politique n’est pas toujours… Mais mon amour pour IBK parce que je crois à IBK, à son amour pour le Mali, son engagement pour le Mali, c’est ce qui m’a amené à franchir le pas pour me retrouver sur le terrain politique. Ça ne colle pas tellement avec ma nature.
Mais comme je l’ai dit, ce que je comprends, on peut tirer les meilleurs de qui que ce soit. On peut toujours tirer le meilleur de l’homme. Chacun a sa façon, la façon dont vous approchez les gens, être à l’écoute des gens et s’assurer que les décisions sont collectives. Je crois que quand tu respectes le Malien, il te respecte en retour. Donc, il faut toujours respecter les autres, je crois que peut-être, c’est ce qui explique cette amélioration ces derniers temps.
Info-Matin : Monsieur le président, vous n’avez pas fermé l’œil pendant tout le séjour du président. Depuis combien de temps, vous étiez à Sikasso et combien tout cela a coûté ?
Ministre Nango DEMBELE : Bon je vais vous dire que moi j’étais d’abord à Abidjan pour le SARA (le Salon agricole d’Abidjan) où j’ai participé à l’ouverture. Quand je suis arrivé, je me suis rendu immédiatement sur le terrain, à Sikasso. Mais avant, j’avais envoyé le président de la Fédération des jeunes RPM sur le terrain. Il y a eu une rencontre à Bamako avec l’antenne, dont le président est le secrétaire général de la section RPM de Sikasso, le ministre Ousmane KONE. On s’est concerté sur la stratégie. J’ai écrit une lettre que j’ai adressée à la section de Sikasso pour dire que j’ai la responsabilité de la mobilisation des populations de la ville de Sikasso. Toute la logistique a été gérée à leur niveau. Notre appui a été essentiellement le support, les affiches, les tee-shirts, les banderoles, les casquettes qu’on a mis à la disposition de la jeunesse. Aujourd’hui, vous allez me demander un montant précis que nous avons donné. Je peux vous dire que cela est difficile. Je dois vous dire également que la prise en charge de certains acteurs a été faite par des gens au niveau de Sikasso. Bakary TOGOLA a eu à faire par exemple la confection de tee-shirts, il y a l’honorable Yacouba Traoré qui a fait aussi des appuis en matériels. Les montants que j’ai pu lire pour la mobilisation au cours de cet événement font rire. Certains ont dit que nous avons fait venir les paysans à 10 000 FCFA/personne. Est-ce que vous imaginez le nombre de personnes qui était à Sikasso si on devait donner 10 000 chacun, le ministre Boubou CISSE allait démissionner du gouvernement. Il faut être réaliste, raisonnable, ce n’est pas toujours les moyens, on a beau sortir les moyens si les gens n’étaient pas prêts à venir, on n’allait pas atteindre une telle mobilisation. Il y a des vieux qui ont dit à Sikasso que depuis l’indépendance, c’est peut-être la deuxième fois, sinon la première fois qu’ils voyaient une telle mobilisation. Donc, vouloir croire que ce sont les moyens qui ont permis de sortir les Sikasso, je crois que ce serait une insulte à leur l’intelligence, à la dignité des Sénoufos. Les Sénoufo n’ont pas encore changé, on peut acheter les gens, mais pas les Sénoufos. On ne peut pas les acheter. Bien sûr qu’au niveau de la section et de la Fédération, il fallait mettre un peu de ressources pour les supports. Sur les différentes contributions, on va faire le bilan après, mais présentement, je ne peux pas vous dire combien ç’a pu coûter !
Info-Matin : Qu’est-ce que vous envisagez pour retourner auprès des populations afin de les remercier ?
Ministre Nango DEMBELE : Bien sûr, nous avons déjà, ce matin, commencé à faire des lettres pour la section des jeunes, pour les remercier, ensuite j’ai envoyé mon adjoint rencontrer une délégation du gouverneur pour les remercier et toutes les bonnes volontés qui ont eu à nous appuyer. Je crois que nous allons procéder à des communiqués dans les radios à Sikasso pour remercier la population, peut-être à Bougouni aussi et partout où la mobilisation a été faite.
Info-Matin : Monsieur le Ministre la mobilisation à Sikasso a été de taille. À la fin, IBK a dit ceci : « Que du bonheur » ! Est-ce que ça veut dire qu’il va se présenter en 2018 ?
Ministre Nango DEMBELE : Je crois que la décision d’être candidat ou pas dépend du président. Le souhait de la fédération des sections RPM de Sikasso est qu’il soit candidat. Nous sommes prêts à lui faire la demande. Les paysans lui ont demandé d’être candidat pour 2018. Personnellement, lors des tournées que j’ai eu à faire, les paysans ne sont pas passés par 4 chemins pour l’appeler à briguer un second mandat. Ils m’ont dit, ‘’Monsieur le Ministre, dès que vous arrivez à Bamako, dit au président que nous sommes avec lui’’. Nous attendons son mot d’ordre. Quand IBK vous dit : « rien que du bonheur », il veut parler de la communion qu’il a sentie entre lui et tous ces gens dans la rue qui venaient à lui, ce n’est pas seulement dans l’objectif de 2018. Il l’a dit en conseil, qu’il a vraiment savouré ces moments. Même si ça s’arrête là, lui IBK est comblé. Il ne peut pas remercier assez du Kénédougou. C’est un moment magique, entre lui et la population du Kénédougou. Certainement, il ne s’attendait pas à un tel niveau d’accueil. Je crois qu’il a été surpris lui-même, il a eu des larmes aux yeux. Cet attachement qu’il a senti au niveau des populations, je crois que ça lui a beaucoup touché.
Je crois que les gens ne réalisent pas le nombre de paysans qui ont eu accès aux tracteurs. En 2018, nous allons distribuer près de 300 tracteurs. À peu près, 500 motoculteurs pour l’office du Niger, plus de 1000 charrettes, 1000 multiculteurs. Il y a des équipements pour les éleveurs. Et ça, ça va continuer. Le président a arrêté un taux d’équipement de 70 % des producteurs. C’est un objectif politique qu’il a arrêté. Donc, les paysans lui sont reconnaissants à tous ces efforts. Un paysan a l’habitude de me dire : « Monsieur le ministre, je ne dis pas que les autres présidents n’ont pas fait quelque chose pour le monde rural, mais IBK est exceptionnel ». Et sans compter qu’il est à peu près à 100 mille hectares de terres aménagées. Nous sommes à peu près à 80 milles. Donc, imaginer en 5 ans 100 000 hectares, alors que depuis l’indépendance à nos jours, nous sommes environ à 200 000 hectares. Il faut le croire et le décider. Ce qui est important, c’est que la plupart de ces programmes sont financés sur budget national, pas par un quelconque prêt. C’est ça qu’on ne dit pas assez. Il y a une amélioration nette de la gouvernance budgétaire au Mali.
Aujourd’hui, l’équipement militaire, les avions et autres sont tous sur budget national. C’est dire que nous avons aujourd’hui les moyens de mobiliser nos ressources locales pour financer une bonne partie de notre développement.
Info-Matin : Est-ce que notre agriculture peut atteindre la sécurité alimentaire ?
Ministre Nango DEMBELE : J’ai toujours eu des problèmes avec les gens avec cette question de sécurité alimentaire. Le terme que je n’aime pas trop souvent, c’est celui de l’autosuffisance alimentaire. Même s’il y a l’autosuffisance alimentaire, il faut des ressources pour y avoir accès. Dans un pays qui se développe normalement, structurellement, le nombre de paysans diminue. Pour nous, les agro-économistes, la sécurité alimentaire repose sur 4 dimensions, à savoir : la disponibilité des céréales, l’accessibilité économique, un régime équilibré et enfin la stabilité dans l’offre et l’accessibilité économique.
IBK est venu aux affaires avec ces milliers de chômeurs créés par le coup d’État. C’est pourquoi quand je vois des gens crier ‘’IBK nos 200 0000 emplois, on va manifester’’, je me dis qu’ils n’ont rien compris.
Dans ces conditions, la situation de la sécurité alimentaire s’est dégradée, mais est-ce que ça veut dire pour autant que le Mali ne produit pas assez de céréales ?
Non ! L’année dernière, nous étions à 2 millions tonnes d’excédents. On attend toujours la publication de chiffres de cette année. Pour autant on n’aura pas réglé le problème d’insécurité alimentaire.
Depuis Moussa TRAORE, on a réglé le problème d’offre alimentaire au Mali. Mais jusque-là, le problème de sécurité alimentaire n’est pas réglé. Malheureusement, ça se dégrade d’année en année. Parce que, tant qu’on n’aura pas créé suffisamment d’emplois pour permettre à ces jeunes de travailler, ça ne marchera pas.
S’agissant des chiffres de la production nationale qui font souvent l’objet de contestation de la part de certaines opinions, le ministre a fait savoir qu’il n’y a aucune relation entre le niveau de production et le fait que des populations éprouvent des difficultés de se nourrir. On a beau produit, tant que des gens n’ont pas les moyens financiers pour y accéder, ils ne mangeront pas. Aujourd’hui, on estime qu’il y a aujourd’hui 3 millions de Maliens qui sont en insécurité alimentaire.
Je suis d’accord que la priorité accordée par le chef de l’État à l’agriculture va permettre la réalisation de la sécurité alimentaire. Mais pas parce ce que le Mali aura produit assez de céréales. Mais c’est parce que le développement du Mali partira du secteur agricole.
Aujourd’hui au Mali, nous avons besoin de mettre l’accent au niveau de la transformation des produits de l’agriculture. C’est à ce niveau qu’on peut créer des emplois.
Imaginez que nous ne transformons aujourd’hui que 2 % de la production de notre production de coton. Ce qui ne crée que quelques milliers d’emplois. Alors que si on transformait au moins la moitié, cela créerait des millions d’emplois.
Propos recueillis par Abdoulaye OUATTARA
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