Le meilleur héritage qu’on lègue à la postérité est le pays (pensée d’un indien)
Dans le sillage des événements du 26 mars 1991 sous la direction d’hommes politiques idéologiquement hétérogènes, le Mali dans le brouhaha continue sa marche vers une destination inconnue. Le multipartisme intégral, né de l’euphorie du succès des événements du 26 mars 1991 et le manque de patriotisme chez les citoyens, ont beaucoup contribué, à la situation désastreuse que nous vivons aujourd’hui. Tel que nous l’avons vécu jusqu’ici, le multipartisme intégral consacré par la Constitution, peut être qualifié sans exagération d’anarchie politique achevée.
L’exercice du multipartisme intégral a favorisé l’émiettement des partis politiques, aiguisé les ambitions personnelles, exacerbé les hostilités entre acteurs censés incarner ou porter un destin national. Il a divisé, séparé et opposé des camarades de lutte de la clandestinité et des compagnons des geôles du régime militaire et engendré la dispersion des efforts pour le sursaut national. La scène politique malienne est aujourd’hui marquée par la perte de confiance de la population dans la classe politique en laquelle elle ne voit que des acteurs qui n’agissent que pour leurs intérêts. Un parti politique porte toujours un projet de société dont l’édification avec un chronogramme prenant en compte les besoins fondamentaux des populations, est définie dans un plan de développement économique, social et culturel.
150 partis politiques, nécessaires ?
Après les évènements du 26 mars 1991, malgré le nombre important de compétences nationales dans divers domaines, les gouvernements successifs jusqu’à ce jour, n’ont pas suivi ce schéma. Ils se sont contentés des Déclarations de Politique Générale (DPG) des Premiers ministres, déclarations qui n’étaient en fait que des chapelets d’intentions dont le 10ème n’était jamais réalisé.
Pour 18 millions d’habitants, 150 partis politiques sont-ils nécessaires ? Peut-il exister pour l’édification efficiente du Mali 150 projets de société différents ? Absolument non. L’idée du financement des partis politiques née du noble idéal, à savoir, la contrepartie de l’éducation politique des militants (citoyens) par leur parti a fort malheureusement été détournée de son but. Des sommes faramineuses, argent du contribuable, variant de 1.2 à 1.4 milliards suivant les années, ont servi à enrichir certains et à arrondir des fins du mois chez d’autres.
L’administration d’Etat est corrompue dans sa grande majorité. Elle est népotiste, affairiste, clientéliste, absentéiste, dénuée du sens de l’Etat à tous égards, n’agissant promptement et efficacement que pour et par l’argent. Que peut-on attendre de bon, de constructif d’une telle administration lorsqu’il est établi que dans le processus de l’édification de l’Etat, l’Administration publique par sa qualité et son dynamisme joue un rôle extrêmement important ?
Les évènements que nous avons vécus au début de l’année 2018 jusqu’à ce jour, singulièrement ceux avant, pendant et après l’élection présidentielle du 29 juillet et du 12 août 2018, ne sont pas de nature à apaiser le climat social encore moins le climat politique. La grève des magistrats, qui s’est durcie après la réquisition du gouvernement et des déclarations va-t-en-guerre de ces dernières semaines de l’opposition ne sont-elles pas le prélude à un bras de fer aux conséquences imprévisibles ? Ces différents évènements sont la preuve de l’effritement du tissu social et du manque de souci de la classe politique pour la cohésion autour de grands projets qui conditionnent le devenir du pays.
Le Mali va mal. Il est malade, malade de l’incapacité de sa classe politique à trouver les solutions aux préoccupations des populations, malade de ses pratiques bureaucratiques, malade des conséquences de l’application des politiques inadaptées conçues et conseillées par des Experts étrangers ignorant totalement nos réalités.
L’école publique est une calamité. L’école privée, dans bien de cas, est un bazar où l’argent fait la loi. Dans l’enseignement supérieur, par l’enchevêtrement des années universitaires, aucun étudiant ne termine plus les études dans le temps normal de formation et une fois les études terminées, il passe un an sinon plus avant d’avoir son attestation de diplôme. Voilà une situation qui interpelle jusqu’au plus haut point, à laquelle les responsables en charge de l’éducation doivent immédiatement trouver la solution.
Le mal est au comble. Les populations sont désabusées, la jeunesse désemparée. Une jeunesse qu’on ne trouve en liesse qu’autour du thé ou d’une manifestation sportive ou folklorique parrainée par tel député ou tel maire mais jamais réunie autour d’activité de développement de la cité. Dans ce tohu-bohu, avec des implications aux aspects divers qui rendent la situation plus complexe encore, l’on se demande par où commencer pour sortir le pays de l’ornière. Dans ces conditions, que faire ? Humblement il faudrait !
Que chaque Malienne, chaque Malien particulièrement les responsables des partis politiques mettent bas leurs prétentions et ambitions personnelles pour ne songer qu’au Mali et au Mali seul. Cela acquis : Il faut :
1- Déclarer solennellement le quinquennat 2018-2023, quinquennat du renouveau.
2- Organiser des assises nationales pendant 3 semaines au plus, dont les travaux vont déboucher sur la mise en place d’un Conseil National de Réhabilitation (CNR) chargé d’élaborer un plan d’urgence de développement économique et social qui définira pour cinq ans les tâches réalisables pour un démarrage dans tous les domaines de la vie nationale.
3- Désigner un gouvernement de missions chargé de l’exécution des tâches définies par le programme d’urgence de développement.
4- Mettre en œuvre tous les moyens possibles pour sécuriser le nord et le centre du pays.
5- Mener la lutte implacable à tous les niveaux contre la corruption, la spéculation foncière et l’impunité, par l’accélération dans le traitement des dossiers transmis à la Justice avec la création de la Commission Nationale de Lutte contre la Corruption (CNLC).
6- Dans le plan de développement à l’agriculture, la santé, l’éducation et aux infrastructures doit être accordée une attention particulière.
7- Suspendre les activités de l’ensemble des partis politiques en vue de rassemblement aux fins d’aboutir à la création des trois grandes formations politiques qui vont compétir pour les élections de 2023.
8-Abroger purement et simplement le multipartisme intégral, le financement des partis politiques et la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI).
9-Réduire au strict minimum indispensable le train de vie de l’Etat par un abattement conséquent des budgets de la Présidence de la République, de la Primature, de l’Assemblée Nationale et d’autres secteurs.
10-Créer une commission nationale d’exploitation de 1400 milliards de projets chinois accordés au Mali lors de la visite du Président de la République en Chine. La commission doit faire l’inventaire de tous les projets d’intérêts immédiats et réalisables au bout de 3 ou 4 ans.
Les responsables des trois formations politiques qui seront créées doivent tirer tous les enseignements utiles de l’histoire politique du 19ème et du 20ème siècles ainsi que des 58 années d’indépendance de notre pays, singulièrement ceux des 50 dernières années (1969 – 2018), caractérisées au sommet par la gestion irresponsable de l’Etat et de ses biens. Il ne suffit pas d’avancer ou de foncer droit, mais il faut parfois jeter un regard critique en arrière, pour évaluer le chemin parcouru, tout en apportant les corrections nécessaires à la réussite des actions futures.
Après 27 années de prétendue démocratie, calquée sur la démocratie occidentale, dont les sociétés depuis plus de 170 ans, se débattent toujours dans des contradictions sociales, insolubles, inhérentes à ce système de développement, le quinquennat qui commence doit consacrer un nouveau départ pour le Mali. Malgré le grand espoir suscité chez les populations par le succès des évènements du 26 mars 1991, depuis cette date aucun pouvoir n’a de façon claire, posé la question fondamentale relative au devenir du Mali à savoir : Quel type de société pour le Mali et les voies et moyens pour la construire ? Culturellement, la société malienne n’est pas individualiste, encore moins ultra- libérale. Elle est communautaire. Cette réalité qui ne s’est jamais totalement noyée dans le temps, peut servir de levain aux fondements de la société malienne de demain. Une société dans laquelle le Malien où qu’il se trouve vivra bien aisément du fruit de son travail. La classe politique malienne doit se convaincre que le socle du développement capitaliste ne satisfera jamais aux besoins des masses populaires parce que conçu au détriment des démunis et fondé sur le profit pour une minorité, tandis que la grande majorité travailleuse, productrice de richesses, férocement exploitée, croupit sans pitié dans la misère. Le socialisme, qui de l’avis de certains a montré ses limites, ne peut plus en l’état être une voie de développement au 21ème siècle. Il va donc sans dire qu’il faut pour le 21ème siècle particulièrement pour nos pays, une autre voie de développement. Cette voie-là sera la symbiose des deux modes de développement économique. Elle aura dans ses fondements, obligatoirement les 85% des principes du socialisme et cela, pour la satisfaction des besoins des masses laborieuses.
Alors, sociologues, historiens, économistes, politologues, penseurs, chercheurs, hommes politiques à l’œuvre pour la réponse idoine à la question fondamentale en rapport avec le type de société pour le Mali et l’élaboration des bases théoriques de son édification.
Tout ce travail préparatoire, aussi fastidieux qu’il soit, doit être fait et terminé pour la fin du mois de février 2019. Pour qu’enfin, le Mali amorce la voie pour un meilleur devenir.
Dès l’instant que les élections législatives ont été reportées au second semestre de 2019, pour le Mali nouveau débarrassé des séquelles et de toutes les tares, à mon humble avis, rien n’empêche les décideurs d’abonder dans l’esprit de la présente contribution.
Si tous les enfants du Royaume venaient de leurs mains, boucher les trous la jarre percée, le pays serait sauvé. (Behanzin, roi du Dahomey)
Le Mali tangue. Tous, ensemble, comme un seul homme, sauvons-le du naufrage pour le bâtir. Vive le Mali !
Bamako, le 22 décembre 2018
Sékou et Riamma KEITA.
Le Challenger